« On a eu une chance extraordinaire », concède Jean-Charles Grosdidier, maire d'Arinthod (Jura). Cela fait trois ans que l'édile avait tout tenté pour qu'un médecin généraliste accepte de venir s'installer dans ce bourg de 1500 âmes, proche des lacs jurassiens mais loin de la première agglomération.
À 27 ans, le Dr Pierre Gaillard, entame ses premières consultations comme médecin titulaire. « Ça va être dense : en une journée, on a eu 500 appels en absence, a-t-il confié à l'AFP. La secrétaire n'a pas pu répondre à tout le monde, la ligne était saturée. Je ne m'attendais pas à autant de demandes, c'est un peu flippant ». Son arrivée est un soulagement pour le canton. En Bourgogne Franche-Comté, 76 % du territoire est sous-doté en médecins. Et l'actuel généraliste du village prend sa retraite dans quelques mois.
La promesse de rester 20 ans au village
Attaché à ce département où il est né, le Dr Gaillard se faisait « un devoir » de venir exercer dans ce « désert médical ». Mais avant de visser sa plaque, il a posé plusieurs conditions à la commune : prime d'installation de 50 000 euros, pour s'équiper en matériel médical ; prise en charge intégrale du salaire de son assistante ; et surtout création d'une maison de santé, dans l'optique de faire venir d'autres professionnels de santé pour créer une dynamique. Le tout contre la promesse de rester 20 ans au village.
Pour la mairie, ces exigences coûteront environ un million d'euros, soit peu ou prou la moitié du budget annuel d'investissement. « Ça va nous impacter sur d'autres projets, a reconnu le maire. On va différer certains investissements. Mais c'est un choix politique. La santé, c'est une priorité ».
Gabegie
Ces aides communales s'ajoutent aux dispositifs nationaux prévus pour attirer les médecins en zone tendue : le contrat d'engagement de service public (1 200 euros par mois dès la deuxième année d'étude de médecine), le contrat d'aide à l'installation (CAIM), une (autre) prime de 50 000 euros pour les jeunes médecins ; le contrat de début d'exercice (CDE) d’une durée de 3 ans, non renouvelable, qui garantit un revenu mensuel (brut) pendant la première année d’exercice.
Cette abondance de dispositifs est regardée d'un mauvais œil par le Dr Jean-François Louvrier, président de l'Ordre départemental des médecins qui dénonce une « gabegie ». « Est-ce que c'est normal d'aider une profession qui est de toute façon au plein-emploi ? », déclare-t-il. D'autant que, face au manque de médecins candidats à l'installation en zone rurale, les collectivités se font concurrence et jouent parfois la surenchère pour attirer les perles rares. Selon le Dr Gaillard, une commune dans le Jura lui proposait « 150 000 euros par exemple ». « Ils sont prêts à débourser des sommes mirobolantes », confie le jeune médecin.
Littérature ou médecine ? Cette interne n’a plus besoin de choisir : « Je veux continuer à écrire ! »
Ecos tests : 288 étudiants en médecine concernés par la perte de leurs grilles d’évaluation en raison de bugs
C’est quoi ta spé ? – Épisode 02
[VIDÉO] « On nous imagine avec une mallette de seringues remplies de botox » : Gabriel, interne en chirurgie plastique, démonte les clichés
Souffrance des soignants : 6 000 appels recensés sur la plateforme SPS en 2023, dont un tiers d'étudiants