Réforme des retraites : la profession dit non au régime universel

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Publié le 19/12/2019
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Disparition des caisses autonomes, menace sur les réserves, baisse des pensions : pour les libéraux de santé, la réforme des retraites présente de nombreux dangers.

Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

Rien n'y a fait. Ni les réunions de déminage, ni les simulations flatteuses du ministère : les libéraux de santé en général et les médecins en particulier n'auront jamais été convaincus par la réforme des retraites. 

Fin 2018, le cadrage du régime universel annonce des bouleversements d'ampleur : système par points qui remplacera les 42 régimes actuels, large périmètre jusqu'à 120 000 euros de revenus par an, taux cible de cotisations de 28 %.

La profession redoute de suite ce « saut dans l'inconnu ». Elle s'inquiète pour le sort de la CARMF et de ses réserves, l'avenir de l'ASV, la future gouvernance et la baisse des pensions. Dans nos colonnes, le Dr Thierry Lardenois, président réélu de la CARMF, ne mâche pas ses mots : le système universel à trois plafonds de la Sécu est « un tour de passe-passe » qui conduit à la « catastrophe ». Le haut-commissaire Jean-Paul Delevoye répond que le basculement du régime des médecins ne posera aucune difficulté.

Les premières réunions avec les libéraux ne lèvent aucune inquiétude. Le 18 juillet, le rapport Delevoye confirme leurs craintes. Pour l'Union nationale des professions libérales (UNAPL), la réforme conduit à la disparition des caisses professionnelles. Les mêmes griefs reviennent : les fourmis payeront pour les cigales, les réserves seront versées dans un pot commun… L'été apporte une autre mauvaise surprise avec le projet de transfert aux URSSAF du recouvrement des cotisations de retraite des praticiens. Un « hold-up » estival pour les syndicats.  

Douche froide

Dès la rentrée, les libéraux partent l'arme au pied. Réunies en collectif SOS retraites, avocats, pilotes, infirmières, kinés mais aussi deux organisations de praticiens (UFML-Syndicat, FMF) appellent à manifester le 16 septembre pour défendre les caisses autonomes « qui ne sont pas des régimes spéciaux ». Des milliers de blouses blanches et de robes noires défilent à Paris. 

Désormais au gouvernement, Jean-Paul Delevoye lance les discussions avec les partenaires sociaux et promet en octobre des simulations profession par profession. Mais la CARMF dévoile ses propres projections et c'est la douche froide : 26 % à 37 % de baisse de pension pour les médecins libéraux.

Les syndicats représentatifs (CSMF, SML, FMF, MG France et Le BLOC) s'unissent sur des points non négociables : les droits acquis « à l'euro près », le respect du contrat conventionnel (ASV), la place de la profession dans la gouvernance, les missions sociales de la CARMF, la sauvegarde des réserves et le rapport cotisations/prestations. 

Le 11 décembre, l'annonce par Édouard Philippe du projet détaillé ne rassure en rien les libéraux en dépit de la promesse d'une réforme de la CSG, d'une convergence des cotisations sur 15 ans et d'une sanctuarisation des réserves. Le 16 décembre, Jean-Paul Delevoye démissionne du gouvernement après les révélations sur ses mandats non déclarés. Une mobilisation des libéraux est déjà prévue début 2020. 

Cyrille Dupuis

Source : Le Quotidien du médecin