Tribune Jean-Pierre Blum

Le Gartner enfonce le Cloud

Publié le 26/08/2021

Dans la dernière livraison du son « Magic Quadrant », le Gartner Group pointe les déficiences et autres légèretés des fournisseurs de Cloud américains. Entre autres dysfonctionnements, il est dénoncé le caractère illisible des offres par ailleurs en poupée russe et le nombre croissant de pannes récurrentes.

Ce constat est partagé par le tout nouveau conseiller en cybersécurité et ex-DSI des armées (DGNum), l’amiral Arnaud Coustillière, qui, lui, accuse frontalement les fournisseurs américains de Cloud de cacher des coûts dans des catalogues de services complexes et par suite labyrinthiques.

Le rapport du Gartner Group ne fait pas état – hélas – de notre champion OVH Cloud qui fait encore figure de nain industriel au plan mondial et qui a fortement déçu ces « afficionados » ces dernières semaines (20% de croissance au lieu des 30% promis). Dans le même temps on rappellera que les trois « grands », AWS, Azzure , Google GCP, pourtant jusqu’à 50 plus grands ont progressé de plus de 45%. La stratégie « très familiale », un tantinet erratique, du fondateur, le déficit criant de services et peu regardant sur la sécurité ou la méconnaissance des grands comptes, commence à entraver le futur du groupe franco-américain dans la compétition mondiale.

Dans la course internationale, AWS (Amazon) est premier, Azzure second et accélère (Microsoft) ; quant à Google GCP, il reste loin derrière en médaillé de bronze. Pour sa part, IBM continue a dégringoler année après année, devenant l’ombre de ce qu’il fut. Le dernier rapport du cabinet sur les fournisseurs d’infrastructures en cloud public commençait pourtant de façon positive, remarquant les efforts d’innovation de celui-ci ou le niveau de services de celui-là. Google GCP, surprises sur prises ; mais mauvaises le Gartner Group accuse Google de pratiques déloyales en usant de prix d’appels bien plus bas que ceux des concurrents et donc de vente à perte. Cela ne saurait durer, indique le groupe d’étude. Pire, des clients se plaignent d’un service après-vente « déplorable », conséquence d’une quête de croissance à tout prix fondée sur une organisation d’amateurs.

AWS et ses commerciaux « lourds »

« 20% de croissance de la valeur des contrats », c’est l’objectif assigné par la Corp du cosmonaute Jeff Bezos. Et cela ne rigole pas, tout le monde est sur le pont, pendu au téléphone pour amicalement forcer la main des clients. Du côté d’AWS, on dénonce des commerciaux particulièrement « lourds ». Au cours des douze derniers mois, les équipes de vente du fournisseur de cloud auraient mis leurs clients sous pression pour qu’ils augmentent leurs dépenses au sein du catalogue de services. « Des dizaines de clients de Gartner, répartis dans plusieurs pays, ont fait état d’une pression inédite de la part des services commerciaux d’AWS. Et cela s’est empiré au fil de l’année qui s’est écoulée ». Le groupe d’audit va plus loin quand il écrit : « Comme les entreprises ont généralement une dépendance importante à l’égard de la plateforme (ndlr : cloud), elles peuvent avoir l’impression d’avoir un recours limité. Cependant, harceler les clients pour augmenter les dépenses n’est pas une politique commerciale officiellement reconnue par AWS. Donc, elle s’arrêtera net si les entreprises demandent à parler au supérieur hiérarchique du commercial ». Plus embêtant, les clients se plaignent de l’illisibilité des contrats et catalogues de services au point qu’il faut parfois voire souvent s’attacher les « services » d’une assistance conseil pour évaluer et choisir les « services » du Cloud d’Amazon. Le service n’était donc pas compris.

Azure : personne ne comprend et Microsoft non plus

« Microsoft a des licences, des contrats et des gestions comptables très difficiles à comprendre. Le phénomène aggravant est que les compétences de ses équipes sur le terrain sont inégales en la matière. » indique le Gartner Group. Il pointe également l’incompétence et le cynisme commercial des agents de la firme de Seattle. « On se croirait chez Oracle ou SAP » éclate un client outré. Pour les auteurs du rapport « les pressions commerciales exercées par Microsoft pour accroître son chiffre d’affaires sont contre-productives. Elles l’empêchent de déployer efficacement Azure, c’est-à-dire d’une manière qui ferait à la fois baisser ses propres coûts et ceux qu’il fait subir aux entreprises ». Point noir chez Azzure, le taux de pannes qui voit les clients « redouter les répercussions sur leurs activités, notamment quand des services aussi essentiels qu’Azure Active Directory ne répondent plus ». Une telle panne a eu lieu en mars dernier. « Microsoft ne réagit pas rapidement à ces problèmes de pannes. Il traîne des pieds pour redonder les ressources dans ses datacenters, avec la probabilité que certaines régions ne soient même jamais équipées de telles redondances », estime le rapport. Il constate que « certains services, dont le populaire AKS (le service Kubernetes d’Azure), continuent d’être purement et simplement coupés lors des mises à jour et des interventions pour maintenance ».

En conclusion, entre un souverain un peu à l’étroit dans ses baskets et sans services et des géants cyniques hégémoniques capteurs de valeurs, vous avez le choix. L’enfer ou l’endroit. Il vous reste à déterminer qui sera votre Cloud du spectacle. Bon courage.


Source : lequotidiendumedecin.fr