Des violences envers les femmes encore mal repérées et prises en charge, des outils pour les soignants de premier recours

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Publié le 24/11/2023

Crédit photo : VOISIN/PHANIE

Malgré leur ampleur, les violences subies par les femmes restent mal repérées et mal prises en charge, relève la Haute Autorité de santé (HAS) à la veille de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, le 25 novembre. L'autorité sanitaire publie les résultats d’une enquête sur l’appropriation de ses recommandations de 2019 par les professionnels de santé de premier recours (généralistes, gynécologues, pédiatres, urgentistes, sages-femmes...).

La Haute Autorité insiste sur la nécessité de systématiser les questions sur les violences subies (physiques, verbales, psychologiques, sexuelles…) de la part de leur partenaire, que ces violences soient présentes ou passées, et « même en l’absence de signes d’alerte ». Il s’agit, est-il expliqué, de « faciliter la parole des victimes en normalisant le sujet ».

Les femmes favorables au questionnement systématique

Selon les estimations de la HAS, en moyenne, « trois à quatre femmes sur 10 pourraient être victimes de violences conjugales dans la patientèle d’un médecin généraliste ». Mais, selon le baromètre mené avec l’Institut BVA en octobre 2022 et en octobre 2023, seules 14 % des femmes ont été interrogées par leur généraliste sur leurs relations avec leur partenaire. Et, 3 % déclarent avoir été directement questionnées sur d’éventuelles violences conjugales.

Plusieurs freins pourraient expliquer la relative réticence des médecins : « méconnaissance de l’ampleur du problème ou du phénomène d’emprise, sentiment d’impuissance et découragement, peur de dégrader la relation avec la patiente… », liste la HAS.

La plupart d’entre elles (96 %) sont pourtant favorables à ce questionnement systématique, même si une partie indique qu'elles pourraient se sentir gênées (23 %), jugées (15 %) ou choquées (13 %). Interrogées sur une batterie d’items, neuf femmes sur 10 estiment qu’aborder ce sujet en consultation est important, légitime et rassurant.

Pour ouvrir le dialogue, les médecins sont invités à faire savoir à leurs patientes qu’ils sont des interlocuteurs à leur écoute. La démarche peut commencer par la mise à disposition d’affiches et de brochures en salle d’attente. L’adoption d’une attitude impliquée, bienveillante et déculpabilisante est encouragée.

Les signes de gravité sont à analyser et peuvent conduire à la mise en place de mesures de protection. De même, l’impact sur les enfants du foyer doit être envisagé. « Toute situation de violence au sein du couple constitue une situation de maltraitance pour les enfants qui y sont exposés », rappelle la HAS. Il peut également être utile de rappeler aux victimes leur droit de déposer plainte et de les orienter vers les structures associatives, judiciaires et sanitaires qui pourront les aider.

Des outils pour aider les soignants

Pour aider les professionnels, plusieurs outils sont disponibles : à côté des recommandations de 2019 et fiches pratiques associées, la HAS a élaboré un outil d’aide au repérage (format court) et a mis en ligne deux vidéos sur le même sujet (une courte et un webinaire).

Un guide pour effectuer un signalement au procureur de la République a également été présenté par Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l’Organisation territoriale et des Professions de santé. En l’absence d’accord de la victime, la loi « introduit une dérogation possible à la règle du secret professionnel, lorsqu’une victime de violences conjugales se trouve en situation de danger immédiat et sous emprise », est-il rappelé. Un vade-mecum « secret médical et violences au sein du couple », élaboré par le ministère de la Justice en partenariat avec le conseil national de l’Ordre des médecins et la HAS, est disponible.


Source : lequotidiendumedecin.fr