Jean-Louis Thiériot est député Les Républicains (LR) et vice-président de la commission de la défense nationale et des forces armées. Avocat de formation, il a déposé une proposition de loi (PPL) le 11 avril « visant à lutter contre la désertification médicale en autorisant à titre expérimental l’ouverture du secteur 2 aux médecins s’installant ou exerçant dans les zones déficitaires d’Île-de-France » – soit 97 % de ce territoire.
Le pire est à venir, pour la région, puisque 46 % des médecins libéraux franciliens ont plus de 60 ans et prévoiraient d’arrêter leurs activités d’ici cinq ans. Ce qui causerait un déficit de 9 600 médecins supplémentaires, dont 4 000 médecins généralistes d’ici 2028, sur les 21 000 actuellement en exercice.
76 % d’adhésion chez les médecins de sa circo
Constatant que, dans sa circonscription de Seine-et-Marne, la démographie médicale est sinistrée (avec, en moyenne, 6 généralistes pour 10 000 habitants), le député rapporte que 7 des 79 médecins installés se sont déconventionnés. Sur le terrain, raconte-t-il, si les jeunes ne sont pas intéressés par « l’abattage » induit par le secteur 1, les praticiens les plus âgés envisagent de partir en retraite, faute de revalorisation tarifaire conséquente. La solution du secteur 2 pour tous lui est donc apparue comme la panacée tant attendue en termes d’attractivité. D’autant plus, conte-t-il, que sur les 79 médecins de son territoire à qui il a envoyé sa PPL, 60 y ont adhéré « et avec enthousiasme », précise-t-il.
Aujourd’hui, l’accès au secteur 2 est réservé aux médecins titulaires d’un clinicat ou d’un assistanat ou aux anciens praticiens hospitaliers. Par choix ou parce qu’ils n’ont pas fait les études ou le parcours adéquats, 97 % des généralistes diplômés en France exercent en secteur 1.
Une économie pour la Sécu ?
Le premier jet de cette PPL visait les jeunes médecins, mais devant la menace des départs à la retraite des plus anciens, le député a préféré faire bénéficier tous les médecins volontaires, sans contrepartie. La Dr Valérie Briole, présidente de l’Union régionale des professionnels de santé (URPS) médecins libéraux d’Île-de-France, qui a appuyé cette idée après du député, explique que si cette mesure ne s’adressait qu’aux jeunes, les plus âgés ne comprendraient pas, sachant qu’ils assurent une place primordiale dans l’accès aux soins dans la région.
La patronne de l’UFML-S en région francilienne, rhumatologue à Paris (en secteur 2), aimerait réaliser, avec ce texte de loi, « un appel d’air à l’installation », lequel pourrait s’étendre à tout le territoire. Elle argumente même que « la Sécu gagnerait de l’argent, car elle paye une partie des charges sociales pour les médecins en secteur 1, ce qui n’est pas le cas en secteur 2 ! »
Vers un texte transpartisan
Toutefois, Jean-Louis Thiériot se dit prêt à négocier et, le cas échéant, à accepter un compromis. Par exemple, il envisage une obligation de pourcentage de patients à prendre en charge aux tarifs du secteur 1 pour ces praticiens – ce qui rappelle furieusement le principe de maîtrise tarifaire de l’Optam et Optam-co. Selon des chiffres de l’URPS francilienne, les médecins de secteur 2 (en Optam ou pas) réalisent 42,5 % de leur activité à tarif opposable. Autre chiffre : 42 % des actes avec dépassements d’honoraires demandés par ces professionnels de la région se situent entre 0 et 10 % du tarif opposable.
Le député suggère également qu’en secteur 2, les complémentaires pourraient financer les dépassements d’honoraires – ce qui est déjà le cas à un certain degré. Et « si le médecin fixe le prix de sa consultation à 50 euros, comme le font, en moyenne, les médecins en secteur 3, ça ne me choquerait pas qu’il y ait un reste à charge de 20 euros ! S’ils le souhaitent, les patients pourront toujours aller chez un médecin en secteur 1 », affirme le député, qui dit croire aux lois du marché. « Si un médecin abuse au niveau de ses tarifs, les patients n’iront plus chez lui ! », conclut-il.
Quant au chemin parlementaire, pour le député, pas d’empressement. L’idée est de poser un jalon avant la rentrée de septembre et d’en discuter d’ici là avec les autres groupes politiques. « Ce n’est pas un texte figé ! Loin de là », insiste-t-il. Cette proposition de loi pourrait être examinée post-PLFSS, dans le cadre de la niche parlementaire LR ou à l’occasion d’une initiative transpartisane, pourquoi pas portée par la frange la plus à droite de la majorité présidentielle, ceux qu’on appelle les « Solféri-No ». Pour l’instant, les députés Renaissance à qui Le Quotidien a soumis l’idée, eux, disent… no.
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