L’un des premiers projets de Frédéric Valletoux à Fontainebleau concernait la santé. Pour remédier à la vétusté de l’hôpital de la ville, le néo-maire a défendu la mise en place d’une plateforme public/privé avec la polyclinique de la Forêt, laquelle devait emménager sur une zone d’ancien terrain militaire. Il réussit alors à obtenir 60 millions de l’État – et une visite du Président Sarkozy – pour financer la moitié de ce projet, qu’il qualifiait dans nos colonnes en 2012 « d’opportunité historique qui permettra d’initier de nouvelles coopérations, d’être plus attractif lorsqu’il faudra recruter des médecins ».
En 2013 pourtant, l’ARS Île-de-France signe la fin de l’opération, dans une lettre qu’a pu consulter Le Quotidien. Claude Evin, à l’époque directeur général, y écrit que « plusieurs éléments constituent le faisceau d’indices qui me font douter de la viabilité du projet de plateforme », notamment le montage juridique, « pas suffisamment sécurisé » et le projet médical « insuffisamment abouti en matière de répartition des activités ». Contacté, l’ancien ministre de la Santé confie ne « pas avoir en mémoire » ce dossier précis. Le Dr Jean-Michel Meck, aujourd’hui à la retraite, était à l’époque radiologue dans cet hôpital. Il se rappelle que « l’ensemble des médecins y était opposé, car l’espace de l’hôpital allait être réduit ». L’abandon de cette plateforme marque dès lors « un échec pour Frédéric Valletoux, qui le présentait comme la panacée », juge Dominique Lecerf, élu de l’opposition municipale, à l’époque leader d’un collectif anti-fusion de l’hôpital. « C’est très étonnant qu’un patron de la FHF soit dans ce genre de projet », commente de son côté un praticien hospitalier de Fontainebleau.
La fermeture de la polyclinique et de sa maternité
Comme d’autres édiles, le maire Frédéric Valletoux a aussi subi les décisions de restructuration du privé, qui a choisi en 2016 de fermer les portes de la maternité de la polyclinique de la Forêt, du groupe Saint Gatien. À l’époque, il s’était étonné de ne pas avoir été au courant et avait dénoncé un « comportement sauvage », « sidéré », de cette décision, tandis que cette maternité réalisait 300 accouchements par an. « On ne ferme pas en catimini et avec une telle désinvolture vis-à-vis de la ville et des patients du jour au lendemain, après quarante ans d’existence », s’était-il insurgé dans Le Parisien.
Pourtant, deux ans plus tard, c’est la polyclinique entière qui plie bagage, pour se déplacer à la clinique Les Fontaines, à Melun. Là encore, dans un courrier aux praticiens concernés, le maire affirmait avoir été informé seulement par des indiscrétions de cette fermeture, déplorant que la direction de la clinique ne juge pas utile de consulter les élus territoriaux. Frédéric Valletoux invitait les médecins à étudier ensemble « les conditions de faisabilité d’un maintien » de leur activité sur le territoire. Une demi-douzaine d’entre eux – dont des chirurgiens qui ne voulaient pas aller à Melun – a été reclassée à l’hôpital à travers un partenariat…
Le grand défi de la fusion des hôpitaux locaux
Ce sont finalement les trois hôpitaux locaux (Fontainebleau, Montereau et Nemours) qui ont fusionné en groupe hospitalier du Sud Seine-et-Marne en 2017. Une tendance au regroupement qui s’est accélérée dans tout le pays afin de réorganiser l’offre selon un principe de gradation territoriale des soins et d’économies d’échelle. Initiative sensible soutenue par le maire, malgré la mobilisation d’une intersyndicale contre cette fusion. Frédéric Valletoux déclarera plus tard que ces trois hôpitaux locaux n’auraient pas pu continuer seuls, assumant que cette recomposition permet de pérenniser les trois sites hospitaliers. Pour les détracteurs de cette approche, l’éclatement multisite ne facilite pas la lisibilité du parcours de soins pour les patients.
En septembre 2021, l’hôpital de Fontainebleau a déménagé dans de nouveaux locaux à la façade de céramique verte, équipés d’un nouvel IRM, un robot en chirurgie et de 90 % de matériel neuf, pour un budget total de 75,4 millions d’euros. Mais sans lever les critiques. De l’aveu d’un élu municipal, « cet établissement n’a pas excellente réputation. Les Bellifontains se soignent plutôt à Melun ou à Paris… » Des affirmations contestées par l’infirmière Célia Bibollet-Bonin : « La maison de santé universitaire a un lien naturel avec l’hôpital. Son directeur est très ouvert sur le volet CPTS et nous aide grandement. C’est idiot de ne pas faire vivre l’offre locale la plus proche… »
« Fontainebleau, c’est comme partout »
L’avenir, ce sont les conventions de coopérations avec les établissements parisiens, tels que la Pitié-Salpêtrière ou Henri Mondor, rapportent certains délégués syndicaux. Ainsi qu’une direction commune des hôpitaux du GHT 77 et de l’hôpital de Melun. Coopérations, fusions, mutualisation des moyens, approche territoriale… En somme, pour un de ses praticiens hospitaliers, « Fontainebleau, c’est comme partout, avec un peu d’avance. Sa spécificité, c’est qu’il n’y en a pas ! »
Fontainebleau, laboratoire des mutations du système de soins ? Frédéric Valletoux lui-même acquiesce. « Entre le premier jour de ma prise de fonction en tant que maire et aujourd’hui, les hôpitaux ont de plus en plus coopéré, agissant comme des acteurs de soins du territoire. Les médecins libéraux ont évolué aussi dans leur exercice, s’engageant ensemble et avec d’autres professionnels de santé dans des MSP et des CPTS ». Des réformes qui, en Seine-et-Marne comme ailleurs, se font parfois dans la douleur.
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