Dyspnée en fin de vie  : prise en charge en soins palliatifs

Publié le 23/10/2012
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SELON la définition internationale de l’American Thoracic Society, la dyspnée est une sensation subjective, consciente (respirer n’est plus inconscient, le patient pense à son souffle), déplaisante et laborieuse d’inconfort respiratoire variable en intensité, que l’on tente de qualifier.

La dyspnée est fréquente chez les patients en soins palliatifs, qu’ils souffrent d’une pathologie respiratoire (insuffisance respiratoire notamment) ou non. Chaque patient a ses propres mots pour la décrire : essoufflement, oppression, manque d’air, respiration rapide, effort inspiratoire anormal. La quantification de la dyspnée est difficile ; plusieurs échelles sont disponibles (Borg, Sadoul, échelle visuelle) mais elles sont monodimensionnelles et restent subjectives. Une évaluation plus objective peut être obtenue avec la mesure de la saturation en oxygène ou le test de marche de 6 minutes, en sachant toutefois qu’il n’y a pas de corrélation entre leurs résultats et la sensation subjective de dyspnée.

L’oxygène, symbole de vie.

Chez un patient en fin de vie se plaignant d’essoufflement, certaines causes sont curables : obstruction tumorale qui peut bénéficier d’une thérapeutique spécifique (chimiothérapie ou radiothérapie décompressive) , anémie, maladie thrombo-embolique, infection, épanchement pleural, insuffisance cardiaque…..

Le traitement du symptôme « dyspnée » fait appel à différentes mesures. « L’oxygénothérapie n’a pas fait la preuve de son efficacité dans les études, mais elle représente un symbole de vie et joue un rôle de réassurance du patient. Elle est indolore et peu contraignante et est donc volontiers proposée », note le Dr Prudhomme. Les morphiniques constituent la voie thérapeutique d’excellence. Selon Ambrosino et al (Respir Med 2007), « la morphine peut significativement réduire la dyspnée ce qui ne signifie pas accélérer la mort ». Lorsqu’elle est bien utilisée, la morphine n’a pas d’effet dépresseur respiratoire. Elle permet de réduire la sensation de dyspnée par l’intermédiaire d’une diminution de la sensibilité des centres respiratoires à l’hypoxie et l’hypercapnie et d’une réduction de la consommation d’oxygène, du travail respiratoire, de la toux et de la douleur.

Chez les patients naïfs d’opioïdes, il est fait appel à des opioïdes à faible dose, en débutant par la moitié de la posologie initiale antalgique recommandée dans le résumé des caractéristiques. Chez les patients recevant déjà un morphinique, la posologie de base est augmentée de 25 à 50%. Il est recommandé de pratiquer une titration de doses, avec utilisation d’interdoses lors des premiers jours de traitement.

Dans un contexte de fin de vie, dyspnée et anxiété sont souvent liées, et certains patients ont d’ailleurs du mal à les distinguer. Et bien qu’ils n’aient pas fait la preuve de leur efficacité dans les études cliniques et qu’ils n’aient pas de place en première intention, les anxiolytiques tels que les benzodiazépines, peuvent être prescrits en association aux opioïdes sans crainte d’une dépression respiratoire.

Les mesures non pharmacologiques ont toutes leur place. La dimension émotionnelle de la dyspnée chez le patient et son entourage doit bien sûr être prise en compte. Air froid, éventail, acupuncture, psychothérapie peuvent être utiles.

D’après un entretien avec le Dr Anne Prudhomme, service de pneumologie, centre hospitalier de Bigorre, Tarbes.

Dr ISABELLE HOPPENOT

Source : Le Quotidien du Médecin: 9179