Pathologies respiratoires chroniques

Les macrolides sur le devant de la scène

Publié le 28/01/2016
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Comment utiliser au mieux les macrolides dans le cadre d’un traitement chronique de certaines maladies respiratoires comme la BPCO, les dilatations des bronches ou la mucoviscidose ? Et comment éviter notamment l’émergence de résistances avec une prescription sur une longue période de ces traitements antibiotiques ? Ces questions seront, lors du CPLF, au centre de l’atelier « Les macrolides et les maladies respiratoires chroniques » auquel doit participer le Pr Gaëtan Deslée, chef du service de pneumologie du CHU de Reims.

« En plus de leur effet antibactérien, les macrolides ont des propriétés immunomodulatrices et anti-inflammatoires. Les macrolides sont désormais utilisés à faibles doses dans le traitement de certaines maladies respiratoires chroniques. Et il est important à l’occasion de ce CPLF de faire le point sur les données actuelles concernant le niveau de preuve et le niveau de sécurité des macrolides dans ces pathologies chroniques », indique le Pr Deslée.

Réduire le nombre d’exacerbations

Au départ, les macrolides ont été utilisés dans le traitement de la panbronchiolite diffuse, une pathologie relativement rare en France et surtout présente dans le sud-est asiatique. « On a alors constaté que ces médicaments avaient une efficacité assez importante. Mais aujourd’hui, la panbronchiolite n’est plus la seule pathologie pour laquelle les macrolides présentent un intérêt. Plusieurs études ont montré un niveau de preuves d’efficacité dans le traitement des dilatations des bronches ou de la BPCO. Les macrolides ont notamment permis une diminution assez nette du nombre d’exacerbations », souligne le Pr Deslée.

Les macrolides sont également utilisés depuis plusieurs années chez certains patients atteints de mucoviscidose, là encore avec l’objectif de réduire les exacerbations infectieuses. « Pour chacune des pathologies respiratoires chroniques, les macrolides sont prescrits à de faibles doses. Le produit le plus utilisé est l’azithromycine à une dose de 250 mg : soit une fois par jour, soit trois fois par semaine. L’objectif est d’obtenir une modulation inflammatoire et réduire le nombre d’exacerbations », explique le Pr Deslée, en ajoutant que les indications, les phénotypes répondeurs, la durée optimale et la posologie de ces traitements par macrolides restent encore discutés.

Prescription au long cours

Dans le cadre des pathologies respiratoires chroniques, les macrolides sont délivrés pour une période de six mois en moyenne. « Dans la littérature, il y a aussi des essais avec une délivrance sur un an. Il s’agit bien sûr de durées longues alors que dans le traitement antibiotique des infections aiguës, la prescription est de cinq jours en moyenne. C’est d’ailleurs pour cette durée que ces médicaments disposent de leur autorisation de mise sur le marché (AMM) », précise le Pr Deslée, en insistant sur la nécessité de discuter la stratégie thérapeutique à mettre en œuvre pour la BPCO et la mucoviscidose.

« Une certaine toxicité a été mise en évidence dans les études, avec notamment des problèmes de tolérance gastro-intestinale au long cours chez certains patients. Il faut aussi s’interroger sur la toxicité cardiaque puisqu’on a aussi constaté, dans certains cas, un allongement de l’espace QT au niveau de l’électrocardiogramme. Il a également été constaté une toxicité auditive chez certains patients mais qui n’est pas retrouvée dans toutes les études », souligne le Pr Desléeé.

L’autre grande interrogation concerne le risque, à terme, de sélection de pathogènes résistants avec ces prescriptions à faible dose au long cours. « On ne peut pas écarter le fait que cela puisse favoriser l’émergence de résistances aux macrolides mais aussi aux autres classes d’antibiotiques. Pour l’instant, les études montrent une augmentation de la résistance aux macrolides au bout d’un an mais pas de réelle émergence d’infections de type mycobactéries atypiques, comme on avait pu le craindre à un moment », indique le Pr Deslée.

Ce problème d’écologie bactérienne pourrait se poser d’une autre manière si les macrolides devaient être utilisés chez un nombre plus important de patients atteints de pathologies respiratoires chroniques. « Pour l’instant, on traite assez peu de patients avec ces macrolides au long cours. Le problème serait différent si tous les patients BPCO étaient sous macrolides. Aujourd’hui, il faut donc élaborer une stratégie thérapeutique au cas par cas, chez les patients qui ont des exacerbations fréquentes. Il faut d’abord tenter d’identifier toutes les causes possibles de ces exacerbations. Et c’est uniquement si on n’a pas identifié de cause possible qu’on peut envisager les macrolides », souligne le Pr Deslée.

D’après un entretien avec le Pr Gaëtan Deslée, service de pneumologie du CHU Reims, INSERM UMRS 903
Antoine Dalat

Source : Le Quotidien du Médecin: 9466