Pharmaco-épidémiologie

Un surrisque possible de cancers cutanés sous hydrochlorothiazide

Publié le 16/11/2018
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Suite à deux études récentes retrouvant un surrisque de cancers cutanés (hors mélanome) sous hydrochlorothiazide, l'ANSM préconise d'informer et de surveiler les patients. 
Cancer cutané

Cancer cutané
Crédit photo : MION/PHANIE

« Les patients qui prennent de l’hydrochlorothiazide (HCTZ) seul ou en association doivent être informés du risque de cancer de la peau non-mélanome (CPNM) et de la nécessité de vérifier régulièrement l’état de leur peau. »

Dans un courrier aux professionnels de santé, l’ANSM a lancé un pavé dans la mare des thiazidiques. Alors que ces diurétiques sont utilisés depuis des décennies, deux études pharmaco-épidémiologiques danoises récentes « ont montré un risque accru de CPNM lors de l’exposition à des doses cumulatives croissantes d’HCTZ ».

La première a porté sur 71 533 cas de carcinome basocellulaire (CBC) et 8 629 cas de carcinome épidermoïde (CE). L’utilisation d’une forte dose d’HCTZ (dose cumulative ≥ 50 000 mg) était associée à un odds ratio (OR) de 1,29 pour le CBC et de 3,98 pour le CE. Une relation dose-effet cumulative a été observée à la fois pour le CBC et pour le CE, sachant qu’une dose cumulative de 50 000 mg correspond par exemple à 12,5 mg d’HCTZ/j pendant 11 ans.

Un second travail a montré une association entre carcinome épidermoïde de la lèvre et HCTZ, avec là encore une relation dose-effet cumulative : OR allant de 2,1 pour les patients ayant juste « déjà utilisé l’HCTZ », à 3,9 en cas de forte dose (25 000 mg) et 7,7 pour la dose cumulative la plus élevée (100 000 mg).

Ainsi, la prise d'HCTZ multiplierait le risque de carcinome épidermoïde par 4 à 7,7 selon les doses et celui de basocellulaire par 1,3. Si ces chiffres sont élevés en valeur absolue, « le CPNM est un évènement rare », tempère l'ANSM. Les actions photosensibilisantes de l’HCTZ pourraient expliquer en partie ce surrisque.
En pratique, les patients sous HCTZ doivent être informés du risque et les lésions cutanées suspectes examinées. « Il sera conseillé aux patients de limiter l’exposition au soleil et aux UV et d’avoir une protection adéquate », ajoute l’ANSM. Enfin, « l’utilisation d’HCTZ doit être réexaminée avec attention chez les patients présentant un antécédent de cancer de la peau ».

En France, plus de 300 médicaments contiennent de l’HCTZ, leur RCP sera modifié.

Bénédicte Gatin

Source : lequotidiendumedecin.fr