Entretien avec le rapporteur général du projet de loi santé

Dr Thomas Mesnier (LREM) : « Je repousserai toute mesure coercitive à l'installation »

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Publié le 14/03/2019
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LE QUOTIDIEN : Dans quel état d'esprit abordez-vous l'examen de ce projet de loi ?

THOMAS MESNIER : C'est une brique importante du plan Ma santé 2022. Ce projet de loi apporte une réponse globale aux défis structurels. Sur le long terme, il prévoit la suppression du numerus clausus avec l'objectif d'augmenter de 20 % le nombre de médecins formés par an. A court et moyen terme, l'accent est mis sur l'organisation territoriale avec la création du projet territorial de santé. Il doit servir de base à un dialogue entre la médecine libérale, le secteur hospitalier et le médico-social. Le développement des soins coordonnés et le partage des tâches sur lequel nous devons avancer améliorera l'accès aux soins.

Vous souhaitez autoriser les pharmaciens à délivrer des médicaments à prescription médicale obligatoire. Pourquoi passer par la loi ?

Il s'agit de permettre aux pharmaciens formés de délivrer certains traitements selon un protocole et un panier de soins définis par la Haute autorité de santé (HAS). Cela me semble important d'apporter une réponse politique et législative qui encadre et sécurise une pratique qui existe aujourd'hui. Cette réponse favorisera l'accès aux soins et pourra potentiellement dégager du temps médical. Elle devra être proposée dans le cadre de l'exercice coordonné, par une équipe de soins, une maison de santé ou une CPTS. Le texte de loi n'oblige personne ! Chacun dans son exercice pourra s'en emparer sur le terrain. 

Mon amendement est soutenu par les députés de la majorité mais aussi par le MoDem, l'UDI, le PS et le groupe Libertés et Territoires – qui ont tous déposé des amendements similaires. J'espère un soutien du gouvernement et une adoption par l'Assemblée nationale.

Soutenez-vous d'autres dispositifs de partage de compétences ?

J'ai un autre amendement concernant les infirmiers. Il s'agit là aussi de sécuriser une pratique qui se fait beaucoup sur le terrain. Avec l'accord du médecin traitant, les infirmiers pourront adapter les posologies de traitements anticoagulants (AVK), par exemple lorsque l'INR du patient est en dehors de la zone cible. Cela permettrait, là encore, de soulager les médecins qui le souhaitent.

Allez-vous soutenir des amendements visant à instaurer la coercition à l'installation ?

Non, je repousserai systématiquement toute mesure coercitive. Ce n'est pas l'esprit du gouvernement et des députés de la majorité. C'est une fausse bonne idée, contre-productive et potentiellement créatrice d'une médecine à deux vitesses.

Y a-t-il d'autres amendements auxquels vous serez attentif ?

Sur les hôpitaux de proximité, j'ai demandé qu’on puisse transformer une partie de l'ordonnance en texte de loi. J'ai bon espoir de voir les missions socles des hôpitaux de proximité inscrites dans le projet de loi. Ces hôpitaux assureront des services de médecine, des soins de suite et de réadaptation, des consultations spécialisées avancées. Ils seront en soutien de la médecine de ville. Je n'intégrerai pas les services d'urgences dans les missions socles des hôpitaux de proximité mais il est tout à fait possible qu'un hôpital de proximité puisse assurer des urgences.

 

Propos recueillis par Loan Tranthimy Exergue/Il s'agit de permettre aux pharmaciens formés de délivrer certains traitements selon un protocole et un panier de soins définis par la HAS

Source : Le Quotidien du médecin: 9732