Relations entre libéraux et administrations : l'IGAS pointe les « irritants », la simplification pas au rendez-vous

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Publié le 08/10/2018
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Crédit photo : PHANIE

À l'heure où le poids des formalités administratives pèse sur les médecins libéraux, l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) publie un rapport dans lequel elle exhorte les pouvoirs publics à accélérer la simplification des relations entre la profession et les administrations (caisses primaires, agences régionales de santé, maisons départementales des personnes handicapées, communes, collectivités territoriales).

Pluie de certificats et d'attestations

Certes, des mesures de simplification ont été menées localement, à l'initiative de conseils départementaux ou de sociétés privées qui proposent des prestations digitales telles que la prise de rendez-vous en ligne. Mais la situation demeure très inégale selon les territoires, les caisses ou les ARS, souligne le rapport.

De façon générale, l'environnement professionnel se complexifie sans cesse en dépit des beaux discours sur la simplification. La mission a constaté « la perception par les professionnels de santé d’une complexité croissante des exigences administratives pour différents aspects de leur pratique professionnelle (installation, paiement des actes, coordination des soins, contrôles) », résume l'IGAS.  

Les médecins subissent d'innombrables sollicitations : « certificats » ou « attestations » pour justifier une absence à la cantine ou à une séance de TD à l'Université, une adaptation à un poste de travail tous les six mois, une demande d'aide-ménagère ou pour remplir un dossier médical pour demande de prêt. Ces requêtes s'ajoutent aux demandes plus « officielles » de certificats pour les dossiers MDPH, d'allocation personnalisée d'autonomie (APA) ou de placement en maison de retraite.

Des irritants à la pelle

A ces demandes diverses et variées s'ajoutent divers « irritants », observe l'IGAS, autant de bugs et dysfonctionnements qui font naître l'exaspération.

Ce sont par exemple les rejets de facturation (26 % de médecins insatisfaits), qui supposent un travail de recherche et de rectification des erreurs pénible et chronophage. « Bon nombre de médecins ne prennent pas ce temps et renoncent à des paiements », résume le rapport pour qui 5 à 10 % environ des consultations ou des soins réalisés en ville ne sont pas payés. 

Toujours avec la Sécu, les irritants sur la « complexité administrative » concernent surtout les droits du patient (gestion des AT/MP sujette à de nombreux contentieux, échéances ALD, intervention du service médical en cas d'arrêt de travail de plus de six mois, etc.). 

Autres motifs croissants d'irritation : la « diversification des actes à tarifs majorés et des modes de rémunération » (qui obligent les médecins à se justifier) mais aussi les « contrôles de pratique » sur la base de moyennes ou de ciblages statistiques. « Parfois les incompréhensions demeurent et peuvent conduire à des réorientations de professionnels vivant mal les délits statistiques pour lequels », met en garde l'IGAS. 

Conduite de projets, pas si simple

Les grandes étapes de la vie professionnelle ont leur lot de complexité – installation en ville, départ à la retraite – tout comme les changements de situation (déménagement, statut). La conduite de projets (maison de santé pluriprofessionnelle, communauté professionnelle territoriale de santé – CPTS – ou plateforme territoriale d'appui – PTA – mais aussi pilotage du parcours de santé des aînés PAERPA) est jugée « difficile et chronophage », rappelle l'IGAS. « Les médecins estiment n'être pas formés pour cela », relève l'IGAS. 

Au-delà, c'est l'environnement même qui est jugé trop confus et évolutif : règles tarifaires négociées avec la CNAM (nomenclature), politiques incitatives multiples de l'État (« maquis » d'aides, zones bénéficiaires, conditions d'octroi, concurrence entre territoires) mais aussi contraintes d'accessibilité aux cabinets pour les personnes handicapées ou encore stationnement et accès aux centres-villes. « Les politiques municipales (...) ont été évoquées comme un irritant de plus en plus fréquent », relève la mission.   

Relation client avec le médecin

Dans ce contexte, l'IGAS, préconise de traduire les démarches de simplification dans la stratégie globale de transformation du système de santé (STSS). Les professionnels doivent être associés aux réponses pour éviter le décalage entre la vision théorique et la réalité. « Les mesures de simplification doivent être engagées en s'assurant de leur faisabilité », résume l'IGAS.

L'assurance-maladie doit assurer de son côté « une vraie gestion de la relation client », c'est-à-dire entretenir une relation personnalisée et partenariale avec les professionnels. Les expériences conduites par les caisses locales doivent être généralisées si elles sont efficientes. Il convient aussi de faciliter l'accès et les déplacements en ville des soignants intervenant à domicile.

L'accompagnement des professionnels dans un projet de maison de santé doit être systématique et un cadre pérenne de financement doit être apporté pour les dispositifs de coordination des soins de ville, recommande l'IGAS. Surtout, il faut préparer les professionnels à l'exercice en libéral dès la formation initiale.

L'IGAS préconise enfin de dématérialiser les formulaires de certificat médical pour le dossier MDPH – ainsi que tous les dossiers que les professionnels de santé doivent transmettre à l'administration, sauf exception. Les formulaires de déclaration d'accidents du travail et maladies professionnelles doivent être « uniformisés », ainsi que les documents à fournir pour les agents publics.


Source : lequotidiendumedecin.fr