Les troubles du sommeil touchent près de 42% des patients âgées de plus 65 ans. Ils sont caractérisés par leur chronicité dans 50 % des cas avec retentissement sur la qualité de vie et la morbidité, (aggravation des symptômes anxieux et dépressifs). L’insomnie est le trouble le plus fréquent et le plus étudié chez la personne âgée. Selon l’étude de Ohayon sa prévalence serait de 30% en France, proche de la prévalence américaine (23 à 34%) établie par Foley en 1995.
Les modifications physiologiques du sommeil commencent dès l’enfance et se poursuivent tout au long de la vie. Le vieillissement normal est surtout caractérisé par une altération de la continuité du sommeil avec augmentation du nombre d’éveils (sommeil fragmenté), une réduction de l’efficacité du sommeil et parfois par une somnolence diurne avec siestes. Il est associé à des perturbations de l’horloge biologique interne en partie due à la sous exposition aux synchronisateurs externes (lumière, activités sociales). D’une manière générale, les plaintes de sommeil de la personne âgée sont la conséquence de la perturbation à la fois des processus homéostatiques et circadiens. La polysomnographie permet d’observer les modifications de l’architecture du sommeil.
Tous les types de troubles intrinsèques sont observables avec une fréquence élevée comme l’ont montré les travaux de Cohen et al. Ainsi le syndrome d’apnée obstructive du sommeil modéré (SAOS) a été observé chez un certain nombre de sujets âgés (44%) souffrant d’insomnie. Le syndrome de jambes sans repos (SJSR) était retrouvé dans presque 20% des cas chez les plus de 80 ans. Les troubles du comportement en sommeil paradoxal (TCSP), dans leur forme idiopathique comme infra clinique, sont importants. Ils doivent être rapidement diagnostiqués car ils annoncent ou accompagnent des pathologies neuro dégénératives. Leur association à une démence doit faire évoquer la maladie à corps de Lewy. Certaines études ont également fait état d’une corrélation étroite entre déclins cognitifs et troubles du sommeil, de même entre l’index d’apnée du sommeil et la sévérité de la démence chez des patients institutionnalisés.
L’évaluation de la qualité du sommeil est avant tout clinique
L’interrogatoire de la personne âgée est incontournable et nécessite souvent la présence de l’entourage du patient. Il doit être le plus détaillé possible à la recherche de comorbidités (cardiovasculaires, métaboliques/diabète, dysthyroïdie, neurologique, cognitives/démence, parkinson et psychiques/anxio-dépressifs). L’examen bucco-dentaire et ORL est également fondamental car la perte dentaire et le vieillissement musculaire peuvent favoriser les SAOS. Les effets iatrogènes des traitements (sur le sommeil) doivent être recherchés. Les habitudes de vie et de sommeil (conflit, état de santé, hospitalisation, institutionnalisation) sont autant d’autres éléments importants à analyser. Plusieurs outils sont disponibles pour évaluer le sommeil : l’agenda du sommeil et l’Echelle de Somnolence d’Epworth sont particulièrement utile et facile d’utilisation, voire le questionnaire « Observation-Based Nocturnal Sleep Inventory » utilisés plus spécifiquement en institution gériatrique.
Chez le sujet âgé, la prise en charge de l’insomnie comprend souvent le traitement d’une pathologie sous-jacente en raison de comorbidités associées. Dans cette population fragile, les thérapeutiques non pharmacologiques sont à privilégier en raison du risque iatrogène, notamment le risque de chutes liées aux traitements sédatifs. La mélatonine est intéressante pour traiter l’insomnie. Les TCSP peuvent être corrigés en partie par le clonazépam à faible dose ou par la mélatonine. Le syndrome des jambes sans repos relève des agonistes dopaminergiques. Le traitement du SAOS symptomatique passe par une perte de poids et la ventilation en pression positive. Les hypersomnies relèvent de psychostimulants centraux (modafinil, pitolizant…). Dans tous les cas, une hygiène de sommeil et de vie est recommandée : adopter des horaires de sommeil réguliers, maintenir une activité physique ou une mobilisation dès le matin, éviter l’exercice en soirée, organiser des sorties en extérieur pour faciliter l’exposition à la lumière naturelle dès le matin et durant la journée, réduire les épisodes de sommeil dans la journée à l’exception d’une sieste de 20 min maximum en début d’après-midi , adapter le programme nutritionnel aux besoins de la personne âgée (éviter de boire trop de liquide le soir ), éviter les excitants, les somnifères et aménager « la chambre, le matelas », pour réduire l’anxiété pré hypnique.
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