Un centre national de ressources et de résilience

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Publié le 07/01/2019
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CHRU Lille

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Crédit photo : AFP

La création du centre national de ressources et de résilience (CN2R) dédié au psychotraumatisme a été annoncée en novembre. Porté par deux psychiatres experts du sujet, il coordonnera 10 centres de soins régionaux, déterminera des bonnes pratiques et développera la recherche.

Ce centre national, piloté par le Pr Guillaume Vaiva (CHU de Lille) et le Pr Thierry Baubet (Assistance publique-Hôpitaux de Paris), vient combler un vide dans le paysage de la santé mentale française. Le CN2R est le fruit de « la complémentarité de notre approche, souligne le psychiatre du CHU francilien. Nous sommes tous les deux des cliniciens et travaillons depuis 20 ans sur le psychotrauma ». Lui a développé une expertise sur les enfants, les victimes du terrorisme et les migrants alors son confrère lillois est spécialisé sur le « psychotrauma du quotidien » comme les violences faites au femmes et aux enfants ou les accidents de la route. Cette approche globale du patient psychotraumatisé a convaincu dans le cadre de l'appel à projet du ministère de la Justice. 

Diffuser l'expertise

Géré par un GIP* indépendant, le CN2R a pour mission première de « coordonner » les 10 centres de soins régionaux dédiés au psychotraumatisme. Une coordination qui ne sera pas hiérarchique mais portera sur la diffusion de l'expertise, des bonnes pratiques et la constitution d'une base de travail commune afin d'améliorer la prise en charge des troubles psychiques post-traumatiques. 

Le centre pourra s'appuyer sur les publications de la Haute autorité de santé (HAS) en la matière, voire les enrichir. « Nous allons organiser des focus groups de professionnels de terrain, pas forcément médecins, mais en contact avec des victimes et des patients », précise le Pr Vaiva. Le CN2R devrait proposer aux centres régionaux d'adopter l'approche du « patient partenaire » et des recommandations adaptées au terrain (tous les professionnels n'étant pas formés aux procédés préconisés en première intention). « Il est important que nous prenions position rapidement sur certaines techniques qui pourraient être nocives », illustre le Pr Baubet.

Former les confrères, pompiers, journalistes…

Le calendrier de travail 2019 sera bientôt arrêté. Il comprendra des journées de formation thématiques, par exemple sur la maltraitance infantile, le viol, le terrorisme, les accidents de la route, les enfants ou les migrants.

La formation constitue en effet l'une des missions centrales du CN2R. Elle pourra prendre la forme de e-learning, de MOOC, de DU/DIU et d'une veille scientifique. Au-delà des psychiatres, les deux confrères souhaitent développer la formation auprès des médecins généralistes, urgentistes, gynécologues mais aussi des infirmiers et professionnels non médicaux comme les pompiers, les journalistes ou les professionnels de la justice.

Articulation avec les sciences humaines

Le développement de la recherche en matière de psychotraumatisme et de résilience « est un des points clés de notre candidature », insiste le Pr Guillaume Vaiva. « Nous allons travailler sur un dossier de soin du patient qui pourra se transformer automatiquement, après anonymisation, en dossier de recherche, explique-t-il. Cela nous donne accès à des cohortes de sujets considérables ».

Très importants, les besoins sont apparus au grand jour depuis les attentats de 2015 et 2016. Le psychotraumatisme a longtemps été « un sujet délaissé, aussi bien au niveau de l'enseignement que de la recherche, regrette le Pr Thierry Baubet. Il est important que le savoir dans ce domaine se développe et soit partagé afin qu'il ne soit pas réservé aux seuls spécialistes ». C'est pourquoi, poursuit-il, « dès la conception (du CN2R), nous avons pensé que la question du psychotraumatisme et de la résilience ne pouvait pas s'envisager avec une seule discipline. Nous avons mis en place un consortium qui comprend des laboratoires de recherche en sciences humaines (sociologie, droit, histoire…) ou en neurosciences, des associations engagées dans l'aide aux victimes ou des chercheurs individuels ». Il s'agit de nourrir les travaux des uns et des autres tout en développant un savoir pluridisciplinaire.

Une dernière mission du centre consistera à fournir des informations au grand public sur les symptômes du psychotraumatisme et l'aide que les victimes peuvent obtenir.

* Groupement d'intérêt public où seront réunis les financeurs, le CHU de Lille & l’APHP, des représentants associatifs ainsi que les futurs centres collaborateurs adhérents.

 

De notre correspondante Géraldine Langlois

Source : Le Quotidien du médecin: 9713