Les hôpitaux « assiégés » par les étrangers bénéficiant de l’AME ? La nouvelle sortie de Zemmour ulcère des médecins

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Publié le 18/10/2021

Crédit photo : PHANIE

Supprimer l’aide médicale d’État (AME) : la proposition est revenue sur le tapis par la voix d’Éric Zemmour. Le journaliste et « presque candidat » à la présidentielle l’a twittée samedi 16 octobre, justifiant cette mesure : « L’hôpital est assiégé par une population venue du monde entier », écrit-il sans nuance.

Le polémiste s’est immédiatement attiré l’ire de plusieurs médecins sur les réseaux sociaux. « L’hôpital n’est pas assiégé, on n’assiège pas un refuge », a répliqué sur Twitter le Dr Jérôme Marty, président de l’UFML-S. Les soignants prennent en charge les malades indépendamment de leurs origines, rappelle le généraliste de Fronton, parce que « telle est leur mission, tel est leur serment. […] Face à la souffrance, face à l’urgence, nous soignons, nous soignerons, toujours, quels que soient les fantasmes d’un Le Pen Nain ».

Vision apocalyptique

Eric Zemmour s’est également fait reprendre sur les chiffres, la réalité étant assez éloignée de la vision apocalyptique qu'il décrit. « Médecin dans un service de dernier recours, dans un CHU de ville moyenne, j’ai pris en charge tout juste cinq patients avec l’AME en 10 ans. Dur de résister au siège »ironise un médecin sur Twitter.

Selon un rapport de l’IGAS (Inspection générale des affaires sociales) publié en 2019, 2 513 bénéficiaires de l’AME avaient été pris en charge au sein des établissements de l’AP-HM en 2018. Aux Hospices civils de Lyon (HCL), ils étaient 905 sur l’année…

Le nombre de bénéficiaires est toutefois en hausse : fin 2018, 318 106 étrangers en situation irrégulière ont bénéficié de l’AME, ils étaient environ 383 000 en 2020. Le coût de cette mesure est également en sensible progression. Le projet de loi de finances en discussion au Parlement prévoit une enveloppe d’un milliard d’euros en 2022, contre un budget de 904 millions d’euros en 2018 (montant sous-évalué selon l’IGAS).

Migration pour soins

L’IGAS accrédite cependant « l’hypothèse d’une migration pour soins, qui n’est clairement pas un phénomène marginal », établie à partir de l’analyse des données de soins des assurés sociaux et des bénéficiaires de l’AME. Elle a mis en évidence des atypies qui ne relèvent pas des spécificités de cette population. « Les plus nettes concernent les accouchements, l’insuffisance rénale chronique, les cancers et les maladies du sang », écrivent les experts qui préconisent de lutter contre la fraude.

Pas question cependant de remettre en cause ce dispositif, qui répond à des motivations éthiques, humanitaires et de santé publique, ce que rappelait avec conviction le Dr Mathias Wargon, en 2019, alors qu’il répondait déjà à Éric Zemmour sur ce sujet de l’AME (voir la vidéo ci-dessous).

L’IGAS relève également que cette aide répond à « des obligations d’ordre juridique, nationales comme internationales ». Tous les pays européens ont mis en place des dispositifs similaires, plus ou moins restrictifs pour les étrangers en situation irrégulière.


Source : lequotidiendumedecin.fr