À SantExpo, Frédéric Valletoux continue les négos avec le privé lucratif pour éviter la grève du 3 juin

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Publié le 22/05/2024
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Le ministre délégué à la Santé Frédéric Valletoux fait tout pour éviter la grève des cliniques, annoncée le 3 juin. Dans sa besace au congrès de SantExpo, le 22 mai, un cadeau d’apaisement : l’ouverture de discussions sur un protocole de financement pluriannuel, attendu de longue date par l’ensemble des fédérations hospitalières.

Crédit photo : Romuald Meigneux / Phanie

En ce deuxième jour de SantExpo, le grand congrès annuel du monde hospitalier, Frédéric Valletoux, ministre délégué chargé de la Santé et de la Prévention, assurait ce mercredi 22 mai le service après-vente de sa ministre de tutelle Catherine Vautrin, présente la veille lors de la conférence inaugurale. Plus encore que cette dernière, Frédéric Valletoux est dans son jardin. Il connaît tous les acteurs, serre des mains et tutoie tout le monde. L’ancien patron de la Fédération hospitalière de France (FHF, pendant onze ans) se laisse porter par le flot de sa déambulation dans les stands, bien cadré par ses conseillers qui veillent au grain pour respecter l’agenda ministériel.

Devant les journalistes conviés à un micro tendu au stand de la FHF, le ministre répond calmement et sereinement aux questions qui fusent dans la chaleur et le brouhaha. Sur une petite vingtaine de minutes généreusement accordées, le sujet le plus sensible est celui des cliniques, qui ont lancé un mouvement de grève inédit qui doit démarrer le 3 juin. Les discussions avec les représentants de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) vont bon train et se poursuivent avant la date fatidique du début du conflit, explique le ministre. Qui se veut rassurant : « Je souhaiterais qu’on évite cette grève qui n’est pas opportune pour les patients. Éviter un conflit, c’est toujours mieux que de rentrer dans des blocages, des postures. L’idée est de répondre à certaines des attentes des cliniques et de leur redonner un peu de perspectives.  »

Pas de retour en arrière sur la campagne tarifaire 2024

Une chose est certaine. Le ministre ne compte pas revenir en arrière sur les tarifs publiés pour la campagne tarifaire 2024. Et il ne répondra pas non plus aux attentes de la FHP qui souhaitait piocher dans les fonds des Migac (missions d’intérêt général) liés à la permanence des soins : « Nous ne déshabillerons pas Pierre pour rhabiller Paul. J’ai fait des propositions structurantes », explique Frédéric Valletoux, qui préfère ne pas en dire trop tant que les pourparlers sont en cours. Quant à l’argument formulé par Lamine Gharbi, président de la FHP, selon lequel les cliniques génèrent plus d’activité que l’hôpital public qui n’a toujours pas rattrapé son retard lié à la crise sanitaire, Frédéric Valletoux défend son ancienne maison qui, effectivement, « met […] plus de temps que le privé à remonter la pente depuis le Covid, peut-être parce que les hôpitaux ont absorbé plus violemment le choc que les cliniques ».

Apaiser les tensions par un protocole pluriannuel

Sur les déficits des hôpitaux et des Ehpad publics pointés du doigt par le président de la FHF Arnaud Robinet lors de la conférence inaugurale, le ministre a beau jeu de mettre en avant l’enveloppe débloquée début 2024 de 500 millions d’euros pour limiter les impacts de l’inflation, et ainsi résorber une partie des déficits. Là encore, l’ancien maire de Fontainebleau cherche à apaiser les esprits agités, soulignant la révision des modes de financements en cours et la reprise de l’activité.

Et si on parvenait à calmer les tensions des deux côtés, public comme privé, par la création d’un nouveau protocole pluriannuel de financement ? C’est l’annonce surprise de Frédéric Valletoux. Très prochainement, le locataire de Ségur ouvrira des discussions avec les fédérations hospitalières sur ce sujet pour mettre en place un dispositif sur les années 2025-2026-2027, tout en déplorant que le précédent protocole 2019-2022 instauré par son prédécesseur Agnès Buzyn n’ait pas été renouvelé.

Le principe de la tarification pluriannuelle (sur le modèle des lois de programmation militaire sur cinq ans) appliqué à la santé est une revendication de longue date de l’ensemble des fédérations hospitalières, lasses de négocier le bout de gras année après année et en quête de davantage de souplesse et de visibilité pour leurs établissements.

En posant cette option sur la table, Frédéric Valletoux fait un pas important en direction des cliniques. Et offre, potentiellement, un joli cadeau de réconciliation politique avec son (ancien) meilleur ennemi Lamine Gharbi.


Source : lequotidiendumedecin.fr