Des députés de gauche – soutenus par des syndicats et associations du secteur santé – se mobilisent pour l’hôpital. En septembre 2023 déjà, une centaine d’entre eux avaient cosigné une proposition de résolution (PPR) pour la création d’une commission d’enquête sur les pertes de chance aux urgences. Six mois plus tard, elle n’est toujours pas inscrite à l’ordre du jour.
Dans un contexte où plusieurs personnes sont décédées dans les couloirs d’établissements de santé ces dernières semaines – comme cette femme de 66 ans qui a patienté 10 heures aux urgences de l’hôpital Simone Veil d’Eaubonne (Val-d’Oise) ou encore trois drames d’affilée aux urgences du CHU de Toulouse – les députés veulent changer de braquet.
Dans un courrier adressé le 21 février à la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet, Damien Maudet (La France Insoumise), accompagné par cinq collègues députés et une cinquantaine d’organisations du monde de la santé (dont Médecins du monde, Attac, les fédérations CFDT, CGT, Sud, etc.) lui demandent expressément d’inscrire à l’ordre du jour de l’Assemblée la création de cette PPR réclamant une commission d’enquête sur la situation dans les hôpitaux. Pierre Dharréville (GDR), Sabrina Sebaihi (EELV), Arthur Delaporte (PS), Sébastien Peytavie (Génération.s, écologiste) et Yannick Favennec (Liot) figurent parmi les signataires.
Situations tragiques en forte progression
Qualifiant la situation des services d’urgences d’« extrêmement préoccupante », les députés et organisations signataires écrivent qu’il « ne se passe plus une semaine sans que la presse ne relaie des histoires de patients décédés aux urgences, parfois sur un brancard, dans le couloir, faute de capacité de prise en charge adéquate ». Et, regrettent-ils encore, « tout prête à croire que ces situations tragiques sont en forte progression », avec le risque de pertes de chance vitales.
Pour étayer leur propos, des chiffres glaçants sont rappelés. Durant le seul mois de décembre 2022, le syndicat Samu Urgences de France avait estimé à 150 le nombre de décès aux urgences du fait d’une trop longue attente avant prise en charge. Selon une autre étude de l’Inserm, de l’AP-HP et de l’Université de Rouen, une nuit sur un brancard pour un patient de plus de 70 ans « augmente de 40 % le risque de mortalité hospitalière » pour ce dernier. « Les soignants, soulignent les signataires, ne sont pas responsables de ces drames ». Au contraire, « depuis des années, ils alertent sur la dégradation des conditions de travail dans les services d’urgence et sur les risques pour les patients ». Les six députés invitent désormais leurs collègues, « y compris membres de la majorité présidentielle », à se joindre à l'initiative et à co-signer cette demande de commission d’enquête.
Interrogé à ce sujet par nos confrères de France Bleu à la mi-journée, le ministre de la Santé Frédéric Valletoux a d’abord salué une démarche « transpartisane », tout en estimant « qu’on prend le sujet un peu par le bout de la lorgnette, alors qu’il est plus global ». Ainsi, l’ancien patron de la FHF affirme soutenir « modérément » cette démarche, puisqu’il ne l’aurait pas « rédigé comme ça ».
De son côté, France Assos Santé, fédération de référence qui défend les usagers, rappelle ce jeudi dans un communiqué « l’urgence d’agir » face aux « décès sur les brancards », allant jusqu’à interroger : « Est-on encore en sécurité aux urgences en France ? »
[Article mis à jour à 17H]
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