À la faculté de médecine de Limoges, l’affaire fait scandale. Un étudiant condamné pour agressions sexuelles et exclu par le CHU de son stage de 6ᵉ année a pu être réintégré sur décision du tribunal administratif.
Le 15 avril, la justice administrative a en effet estimé qu’il n’était « pas établi que le requérant ait été à l’origine de troubles ou d’incidents dans le cadre de ses différents stages au sein de l’établissement ». Les faits d’agressions sexuelles, rappelle le tribunal, « ont été commis entre 2017 et 2020 dans le cadre de soirées festives privées. » Or depuis, il « a opéré un travail introspectif [...] notamment en ce qu’il poursuit un protocole de soins. [...] L’intérêt public qui s’attache à l’exclusion de l’intéressé du cursus de formation universitaire qu’il poursuit n’apparaît pas suffisamment caractérisé, eu égard aux conséquences graves et imminentes susceptibles d’affecter la poursuite de ses études ».
Les prédateurs sexuels ne doivent pas devenir médecins
Intitulé d’une pétition sur change.org
« Comment est-ce possible ? Cette décision est aberrante », fustige l’une des membres du collectif d’étudiants anonymes, Emma Auclert, qui se mobilise sur les réseaux sociaux. Une lettre ouverte a été adressée aux autorités médicales et politiques et une pétition intitulée « Les prédateurs sexuels ne doivent pas devenir médecins » avait recueilli, à la date de ce jeudi 2 mai, près de 25 000 signatures. Dans un long texte, cette pétition s’emploie à décrire les faits, plusieurs réponses ordinales mais aussi le contexte des violences sexistes et sexuelles dans le milieu médical.
« Il est actuellement en sixième année. S’il devient médecin, il sera en relation avec des personnes malades, vulnérables. La blouse blanche le mettra en position de supériorité par rapport aux patients. Cela revient à prendre un risque énorme ! », confie encore une étudiante en médecine, membre du collectif.
Abasourdis
L’affaire a pris de l’ampleur ces derniers jours. Le 25 avril, un slogan « Aujourd’hui ton violeur, demain ton docteur ! » a été collé sur les murs de la bibliothèque de la faculté de médecine, avant d’être retiré. Mais depuis des semaines en réalité, la mobilisation grandit localement à l’encontre de ce jeune homme de 26 ans qui, en 2021, à Tours a fait l’objet de cinq plaintes pour viol et agressions sexuelles. Mis en examen, placé deux mois en détention, il avait été libéré et mis sous contrôle judiciaire avec interdiction de séjourner en Indre-et-Loire. L’Université de Limoges avait alors accepté de l’accueillir pour qu’il poursuive ses études.
« À Tours, aucune procédure disciplinaire n’avait été lancée ! Nous n’étions au courant de rien. C’est extrêmement rare de changer de fac de médecine en cours d’année. Il a dit que c’était pour se rapprocher de ses grands-parents, on l’a cru. Il a été très bien intégré, était plutôt sympa », témoigne une jeune femme. « Il a rapidement eu beaucoup d’amis, garçons comme filles. En public, il était à l’aise. Quand on a appris les faits par la presse locale, on a été abasourdis », ajoute cette membre du collectif qui réunit une quarantaine d’étudiants. « On a été choqué d’apprendre que ce garçon qui a partagé des cours magistraux avec les 150 élèves de sa promo de la quatrième à la sixième année, qui a effectué des gardes à l’hôpital ou encore des stages au service gynéco ait pu tranquillement poursuivre ses études », complète-t-elle.
Cinq ans de prison avec sursis
Pour les agressions sexuelles commises entre 2017 et 2020, l’externe a été condamné le 19 mars à cinq ans d’emprisonnement avec sursis, dont trois ans de sursis probatoire par le tribunal correctionnel de Tours. Des faits qu’il a reconnus et pour lequel le parquet a fait appel, jugeant la sanction pas assez sévère.
Contacté, l’avocat du jeune homme n’a pas donné suite à ce jour. L’Université de Limoges a annoncé avoir saisi la section disciplinaire pour des poursuites vers la mi-mai.
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