Le patron de la Cnam opposé au conventionnement sélectif des médecins libéraux

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Publié le 19/10/2022

Crédit photo : Senat

Alors que tous les amendements sur le budget de la Sécu introduisant le conventionnement sélectif ont été repoussés en commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale la semaine dernière, les futurs installés ont trouvé un nouvel allié de poids.

En effet, le directeur général de l'Assurance-maladie, entendu ce mercredi par la commission des affaires sociales du Sénat, a pris ses distances avec cet outil de régulation de la médecine libérale, alors que s'ouvriront dans quelques jours les négociations en vue de la prochaine convention médicale. « La question de mécanismes contraignants se pose très différemment selon que la démographie des professionnels est plus ou moins en tension, a exposé Thomas Fatôme devant les sénateurs. Aller interdire l'installation de médecins dans certains endroits alors qu'à peu près toutes les zones – même si certaines le sont plus que d'autres – sont en tension, est une proposition sur laquelle le ministre a déjà pris position. » 

La Cnam a introduit un mécanisme d'installation nouvelle conditionnée à un départ dans les zones surdenses dès la fin des années 2000 pour les infirmières libérales puis pour les masseurs-kinésithérapeutes. Le dispositif a eu un certain succès mais aussi parce que leur démographie était favorable : le nombre d'infirmières libérales a doublé en 20 ans et celui des kinés a augmenté de moitié en dix ans. Mais cette piste ne paraît guère adaptée à la pénurie médicale. « Il est important de bien mesurer les différences fondamentales entre les professions, a martelé le directeur de la Cnam. La densité médicale n'a cessé de diminuer et nous sommes face à des situations de tensions à peu près partout. » 

Clarification utile

Cette clarification n'est pas inutile dans la mesure où l'article 22 du projet de loi de financement de la Sécu (PLFSS), examiné à partir de demain à l'Assemblée nationale, peut être interprété comme ouvrant la porte au conventionnement sélectif. « L'intérêt de cet article est de créer une base transversale pour l'ensemble des professions de santé, a évacué Thomas Fatôme. Il pose un principe de responsabilité pour que les partenaires conventionnels puissent se saisir de tous les leviers. » Manière positive aussi de mieux faire valoir les outils qui « marchent » selon lui : assistants médicaux ou développement des coopérations avec les autres professionnels notamment.

Et s'il attend encore la lettre de cadrage du ministre de la Santé pour démarrer les négos, le directeur de la Cnam a confirmé devant les sénateurs ses orientations. Interrogé sur la part des rémunérations forfaitaires, il a rappelé leur progression constante sur les 15 dernières années et la nécessité de poursuivre dans cette voie. « Le double mouvement de l'augmentation de la valeur des actes, dans un contexte inflationniste, et notre volonté d'augmenter la place des forfaits met en tension l'enveloppe financière globale qu’il faut mesurer et maîtriser, ce sera un élément compliqué de la discussion », a expliqué Thomas Fatôme face aux sénateurs, donnant une idée du tour délicat que va prendre la prochaine négociation.

Rémunérations attractives

En revanche, alors que le Sénat a adopté hier une proposition de loi sur la quatrième année de médecine générale durant laquelle les internes seraient payés à l'acte, le patron de l'Assurance-maladie s'est dit prêt à y « mettre les moyens ». « Je suis intimement convaincu qu'il faudra trouver des rémunérations attractives pour cette quatrième année, dernière de formation et première d'exercice », a-t-il ajouté sans se prononcer explicitement sur un paiement à l'acte.

L'idée semble faire son chemin puisque la rapporteure du PLFSS à l'Assemblée nationale, Stéphanie Rist, ne s'y est pas opposée mardi lors d'une rencontre avec l'Association des journalistes de l'information sociale (Ajis). La mission de concertation lancée par la ministre – et qui vise également à déminer la contestation grandissante des internes – devra trancher cette question d'ici à la fin de l'année.


Source : lequotidiendumedecin.fr