Un plan triennal, 350 millions d’euros d’économies

Carotte et bâton pour relancer les génériques

Publié le 26/03/2015
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Crédit photo : PHANIE

Le gouvernement a présenté cette semaine son plan national de promotion des médicaments génériques. En mobilisant tous les acteurs, et en premier lieu l’hôpital, l’objectif est d’augmenter de cinq points la prescription dans le répertoire - les génériques représentent 40,14 % du marché en volume et 28,18 % en valeur. À la clé, une économie de 350 millions d’euros est attendue à l’horizon 2017.

Ce plan, qui implique les prescripteurs, les pharmaciens, les établissements ou encore les EHPAD, mêle incitations et mesures dissuasives. Une charte d’adhésion aux objectifs du plan a été élaborée. Las, échaudés par le projet de loi de santé en discussion à l’Assemblée nationale, les syndicats de médecins libéraux ont prévenu qu’ils ne la signeraient pas en l’état.

Les mesures sont dictées par la nécessité de ne pas laisser la France à la traîne. « Le pourcentage en volume du marché des génériques dans le marché des médicaments non protégés est en France d’un peu plus de 50 % alors qu’il dépasse les 70 % au Royaume-Uni et en Allemagne, et atteint 80 à 90 % au Canada et aux États-Unis », précise le ministère de la Santé.

Choix par menus déroulants

L’hôpital est au cœur de l’offensive. Le plan ambitionne de décourager les laboratoires d’y vendre leurs princeps à « prix très bas » pour gagner le marché en ville. L’action sur la prescription est privilégiée par plusieurs mesures (utilisation de la DCI, emploi généralisé des LAP, identification par son numéro RPPS de chaque prescripteur hospitalier, y compris les internes...).

Les hôpitaux devraient respecter un taux prévisionnel de prescription de médicaments inscrits au répertoire pour les prescriptions de sortie et les consultations externes. Une « ROSP hospitalière » [rémunération sur objectifs] est envisagée ainsi que la mise en place d’indicateurs de performance. Autre piste : des ordonnances suivant un protocole par pathologie avec « choix par menus déroulants ». L’objectif est d’aider les prescripteurs à s’adapter aux bonnes pratiques et à privilégier la prescription dans le répertoire.

Au chapitre de la dissuasion, l’intention est de placer sous surveillance les établissements qui prescrivent « massivement hors répertoire » et ne jouent pas le jeu. Le document évoque des contrats de bon usage (CBU) pour atteindre les objectifs fixés et des stratégie de bonus/malus. Les pharmaciens hospitaliers sont sollicités, notamment pour promouvoir les génériques dans les services.

Les EHPAD ne sont pas oubliés. Le plan prévoit la généralisation de « listes préférentielles » et livrets thérapeutiques, et une communication ciblée à destination des personnes âgées.

Mise sous accord préalable

En ville cette fois, le plan rappelle aux praticiens qu’ils ont l’obligation de prescrire en DCI depuis le 1er janvier 2015. La généralisation de l’utilisation des LAP certifiés est mise en avant, sans préciser les moyens. Autre piste classique : utiliser le levier de la ROSP libérale pour booster les génériques. Plus original, le plan suggère la création d’un répertoire recensant les « me-too » et de l’intégrer aux logiciels d’aide à la prescription. Des objectifs de prescription générique pourraient être fixés aux praticiens territoriaux de médecine générale (PTMG) et aux nouveaux médecins en zone isolée (qui bénéficient de bonus).

Le plan défend aussi la dissuasion. L’utilisation « abusive » de la mention « NS » serait mieux contrôlée. Les prescriptions de nouveaux médicaments dépourvus d’ASMR pourront être mis sous accord préalable si leur niveau de prescription dépasse un seuil à définir.

Dans les officines, le tiers payant contre génériques pourrait être généralisé aux ordonnances hospitalières, ainsi qu’aux patients en CMU, AME ou AT-MP. Les officinaux seront associés à une campagne d’information grand public. Enfin, les accords interprofessionnels seront complétés par un article relatif à l’utilisation des génériques.

Quant aux industriels, ils pourraient être invités à inscrire la DCI « en plus gros » sur les boîtes. La question sensible de la « générication » du Paracétamol devra être « arbitrée », stipule le plan.

Échaudes, les libéraux traînent des pieds

« On ne signe pas ce texte, tranche le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF. Il donne aux caisses primaires un blanc-seing pour sanctionner les médecins utilisant la mention NS ». Pour MG France, parapher cette charte « est le cadet de nos soucis dans l’état actuel de nos rapports avec le ministère ». Le Dr Claude Bronner, patron des généralistes de la FMF, estime que ce plan « ne casse pas trois pattes à un canard ». Au SML, le Dr Éric Henry a « d’autres chats à fouetter avec le projet de loi de santé ».

Henri de Saint Roman

Source : Le Quotidien du Médecin: 9398