Dans le Val d'Azun, un médecin roumain et les professionnels « du pays » réunis dans un nouveau pôle de santé

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Publié le 20/08/2018
Désert médical

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Crédit photo : Phanie

Aucun est un petit village de 250 habitants niché dans les montagnes des Hautes-Pyrénées, à une vingtaine de kilomètres de Lourdes. À l'automne, la mairie inaugurera la maison de santé du Val d'Azun, qui va regrouper sur 500 m2 une dizaine de professionnels de santé libéraux, dont un médecin généraliste tout juste arrivé de Roumanie, où il exerçait jusque-là.

L'histoire de la création de cette nouvelle structure de santé (qui se nomme « maison de santé » mais n'en est pas une, faute d'un second médecin) illustre les difficultés récurrentes des petites communes à trouver un nouveau médecin de famille après le départ en retraite des professionnels. Car à Aucun, tous les soignants impliqués dans la maison sont des « gens du pays », sauf… le Dr Radu Tudose, qui vient d'emménager dans la commune avec sa famille. 

« La pharmacienne, les kinés, la sophrologue et la naturopathe, ce sont tous des professionnels du pays, explique le Dr Jean-Patrick Bouchède, médecin généraliste de 72 ans, retraité et cofondateur du projet. La sage-femme, qui n'a pas 30 ans, n'est pas née ici mais elle venait dans le coin étant gamine, c'est tout comme ! »

Échecs de recrutement

Le Dr Bouchède est le dernier généraliste libéral de la vallée. Après avoir fermé son cabinet sans avoir trouvé de successeur, en 2012, il lance l'association Azun santé avec pour objectif de séduire un nouveau confrère en lui proposant de s'installer dans une structure pluridisciplinaire flambant neuf. L'enjeu était également de délocaliser l'officine du village de Arrens-Marsous à Aucun, situé quelques kilomètres plus bas dans la vallée et mieux situé par rapport à la station de ski d'Argelès-Gazost. Martine Fayard, pharmacienne de 63 ans, voulait recentrer son activité au cœur du Val d'Azun pour « faciliter la vie des habitants qui vieillissent énormément »  mais aussi « maintenir [son] chiffre d'affaires », corrélé à la présence d'un médecin. Le bassin de vie regroupe 2 200 personnes. « Et puis, ajoute-t-elle, c'est une économie de temps pour nous sur le portage de médicaments chez les patients. Les nouveaux locaux sont au top pour la préparation des doses à administrer (PDA) et pour développer l'aide à la personne à domicile. » Le temps de la retraite venu, cette modernisation sera très certainement « un plus », espère Martine Fayard, qui pense tenir la barre « encore huit à dix ans ».

« La pharmacie était en danger, il nous fallait agir, renchérit le Dr Bouchède, installé en 1985 dans la vallée. Après deux échecs de recrutement, on a enfin trouvé notre médecin ! Le Dr Tudose est venu trois fois nous rendre visite, il a toutes les autorisations pour exercer, je ne doute pas qu'il va vite s'insérer dans le paysage médical. »  Le Dr Bouchède a décidé qu'il raccrocherait définitivement le stéthoscope quand son confrère sera « bien intégré »

Un contrat PTMG en cadeau

Pour ce faire, la mairie d'Aucun a mis la main au portefeuille avec l'aide de l'agence régionale de santé. Le Dr Tudose s'est vu offrir un local mis gratuitement à sa disposition le temps des travaux (les fondations de la structure pluridisciplinaire viennent tout juste d'être posées). Il y entamera ses premières consultations début septembre. « Ensuite, quand il emménagera dans ses nouveaux locaux, il devra payer un loyer comme les autres professionnels de santé », indique la mairie au « Quotidien ». 

La structure pluridisciplinaire a coûté près d'un demi-million d'euros, financés à 70 % par des subventions publiques. La commune, qui a dû emprunter, devrait se rembourser sur les loyers.

Le Dr Tudose a également signé un contrat de praticien territorial de médecine générale (PTMG), qui lui garantit des revenus pendant deux ans (6 900 euros brut par mois) et une protection sociale améliorée en échange de son installation dans cette zone fragile. En revanche, étant le seul médecin, il ne percevra pas la rémunération prévue pour les maisons de santé.


Source : lequotidiendumedecin.fr