Dr Y, chirurgien hospitalier en Ile-de-France, 40 ans

Publié le 21/09/2009
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« Ça m’est arrivé une fois d’être poursuivi. Je n’ai pas été convoqué, les deux assureurs se sont battus par avocat interposé. Dans le public, je ne peux être condamné qu’en cas de faute détachable du service, sinon je suis couvert par mon établissement. Dans le privé, la pression est beaucoup plus forte. Une seule plainte, et vous n’en dormez plus pendant des nuits. Vous êtes directement exposé, sauf en cas d’infection, car là, c’est la clinique qui est tenue pour responsable. Cela crée des tensions entre les cliniques et les praticiens, tout le monde se tire dans les pattes, les cliniques ne veulent plus prendre en charge les patients infectés. Les chirurgiens, surtout les libéraux, prescrivent beaucoup d’examens complémentaires dans le seul but de se couvrir. Il y a plein de pièges dans les dossiers des juges. S’il manque tel examen, vous êtes poursuivi. Beaucoup de dépenses de santé sont réalisées uniquement pour se couvrir. On ne stérilise plus les champs opératoires, les casaques des chirurgiens et certains instruments : on n’utilise plus que du matériel à usage unique. On surconsomme, on pollue, mais est-ce bien nécessaire ? Je ne sais pas. Pas facile non plus de savoir quelle information délivrer aux patients. Pour se couvrir on essaye de tout dire avant une opération, mais cela peut avoir une incidence sur le psychisme des gens angoissés, et entraîner des complications, voire des refus de soins pourtant nécessaires. Il y a des gens à qui il ne faut pas tout dire. Où mettre le curseur ? Chacun agit à sa façon, il n’y a pas vraiment de règles. Les infections, c’est très compliqué : on a du mal à en parler, c’est vrai, mais il faut dire que ce n’est pas facile d’identifier un responsable. »

 PROPOS RECUEILLIS PAR D. CH.

Source : lequotidiendumedecin.fr