Marche arrière sur la responsabilité civile médicale

Les obstétriciens soupçonnent des intérêts cachés

Publié le 29/06/2009
Article réservé aux abonnés
1276109301F_600x_75054_IMG_16813_1246333827360.jpg

1276109301F_600x_75054_IMG_16813_1246333827360.jpg
Crédit photo : S TOUBON

QUELLE sera notre couverture en cas de réquisition, alors que nous ne sommes pas autorisés à exercer sans assurance ? Songeant à se « désassurer » de manière collective, les obstétriciens libéraux posent la question au gouvernement. Pour l’heure, pas de réponse.

Les accoucheurs libéraux (1 200 en France) n’ont pas digéré le retrait, au sein du projet de loi HPST (Hôpital, patients, santé et territoires), d’une disposition qui réglait en partie leur problème de responsabilité civile professionnelle (RCP). Un problème en suspens depuis des années. Le Syndicat national des gynécologues obstétriciens de France (SYNGOF) n’hésite pas à pointer du doigt d’éventuels intérêts cachés. «  La commission mixte paritaire a supprimé l’article  18 quater  B. Qui a commandité cette suppression  ?  », questionne le syndicat.

L’article mentionné, introduit par le Sénat, prévoyait la suppression des recours de l’ONIAM (Office national d’indemnisation des accidents médicaux) contre les obstétriciens de secteur I impliqués dans un sinistre de plus de 3 millions d’euros. Pourquoi la commission mixte paritaire a-t-elle fait marche arrière et supprimé cet article ? Le Dr Jean Marty, secrétaire général du SYNGOF, pense que certains assureurs ont fait pression sur le Trésor afin de maintenir les règles du jeu actuelles. Du côté du gouvernement, on évoque a contrario les pressions exercées par le SYNGOF pour «  nationaliser la couverture en RCP des obstétriciens libéraux  ». «  Ce n’est pas l’orientation du gouvernement  », précise cette source gouvernementale. De son chapeau, le Sénat a sorti l’article 18 quater B. Un compromis que le gouvernement a accepté, en le limitant aux seuls spécialistes de secteur I. Au final, la CMP a opté pour le statu quo. Si l’article était passé, le marché de la RC médicale, aux mains de quelques assureurs, aurait été bousculé. Du côté du gouvernement, on ne semble guère regretter l’article 18 quater B. «  Jamais l’ONIAM n’a été amené à se retourner contre un médecin pour un sinistre de plus de 3  millions d’euros. Si le cas ne s’est jamais présenté, c’est qu’il n’y a pas de problème. Ce n’est donc pas la peine de légiférer  », selon notre source.

La CMP a proposé, lorsqu’elle a examiné le projet de loi HPST, que le débat soit approfondi à l’occasion du prochain PLFSS (le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2010, qui sera débattu à l’automne). Le dossier ne devrait donc pas connaître de rebondissement durant le trimestre à venir. Les obstétriciens le regrettent. La situation, connue depuis des années, reste sans solution, déplore le Dr Marty, et «  la profession, aveuglément, paye des primes toujours plus chères  ». Redoutant qu’aucune solution ne soit intégrée au sein du PLFSS 2010, le SYNGOF maintient la pression sur les pouvoirs publics, et suggère aux obstétriciens, dès la loi HPST votée, de demander à leur assureur de suspendre leur couverture pour les accouchements. «  Ils bénéficieront ainsi d’une réduction de prime dès le mois suivant  », prévient le SYNGOF, qui demande au gouvernement «  des engagements immédiats  » sur le dossier. Lequel gouvernement rappelle que d’autres leviers sont à l’étude, par exemple l’augmentation de l’aide publique versée aux obstétriciens par l’Assurance maladie dans le cadre de l’accréditation. À suivre.

 DELPHINE CHARDON

Source : lequotidiendumedecin.fr