Des habitants immobiles, figés comme dans un arrêt sur image. Plus de 200 habitants de Bourth ont participé, samedi 1er avril, au tournage d’un clip vidéo de quelques minutes sur le principe du mannequin challenge.
La mairie compte sur ce format très populaire sur le Web depuis plusieurs mois, et sur sa viralité, pour attirer l’attention sur le village à la recherche d’un médecin. Depuis le mois de mars et le départ d’un praticien prévu depuis octobre 2016, Bourth ne compte plus qu’un généraliste pour un bassin de population de 4 000 à 5 000 habitants.
Le clip promotionnel, tourné par une société de production locale, met en scène une médecin circulant dans le village au milieu des gens immobiles, jusqu’à la maison médicale, où il appose sa plaque. « À ce moment, tout le village revit et se remet en mouvement », explique Jacky Vivier, maire de Bourth convaincu que cette initiative peut faire bouger les choses.
La vidéo sera largement diffusée avant la fin du mois d’avril sur les réseaux sociaux et dans les facultés de médecine environnantes, à Caen et à Rouen. Le pari est déjà à moitié réussi. La presse locale et nationale s’est largement emparée de l’évènement. France 3 Normandie lui a même consacré un reportage vidéo (voir ci-dessous).
La coercition ? « Ce n’est pas dans mes gènes »
Petites annonces, contact auprès de l’ARS… Les solutions classiques ont été testées, sans succès précise l’élu. « Nous sommes aussi en contact avancé avec des cabinets de recrutement spécialisés, mais c’est une procédure longue, coûteuse et vous n’êtes pas certain qu’une autre commune ne va pas surenchérir », indique Jacky Vivier.
Malgré les difficultés, le maire ne plaide pas pour des méthodes plus coercitives vis-à-vis des professionnels. « On ne peut pas obliger un médecin à venir s’installer, ce n’est pas une bonne solution de forcer les gens, affirme-t-il sans hésiter. Et puis je suis trop attaché à la liberté, ce n’est pas dans mes gènes. » En revanche, il n’est pas contre l’idée de trouver une solution pour faire venir des jeunes à la fin de leurs études et leur faire découvrir l’exercice dans la région.
Le médecin qui viendrait s’installer à Bourth serait accueilli dans la maison médicale du village, où travaillent déjà une dizaine de professionnels de santé, dont un cardiologue. Le maire assure qu’il ne manquera pas de patients avec un minimum de trente visites par jour.
La municipalité prévoit aussi un coup de pouce pour le nouveau venu : 6 mois de logement gratuits, 3 mois d’exonération de charge pour le cabinet et un loyer modéré, de 240 euros par mois. Les charges de la maison médicale, en partie payées par la mairie, ont par ailleurs été revues à la baisse.
« Bourth est à une heure de Paris et de la mer ! », argumente Jacky Vivier. Malgré cela, l’Eure reste l’un des départements français les moins bien lotis en termes de densité médicale. Selon l’atlas de la démographie médicale de l'Ordre, le nombre de médecins en activité régulière a baissé de près de 2 % entre 2007 et 2015. Et la tendance ne devrait pas s’inverser dans les prochaines années. Plus de 37 % des généralistes en exercice avaient plus de 60 ans en 2015.
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