« Pas de femme voilée dans mon cabinet » : la généraliste entendue, l'Ordre rendra sa décision dans un mois

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Publié le 06/09/2016
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Crédit photo : PHANIE

Samedi 3 septembre, une généraliste iséroise a été entendue par la chambre disciplinaire de l'Ordre régional des médecins de Rhône-Alpes, après une altercation avec une patiente.

L'affaire remonte à juin 2015. Une femme, voilée, se rend chez son généraliste en Savoie, pour un problème de tension trop basse, mais en l'absence de celui-ci, elle est reçue par une remplaçante, inscrite à l'Ordre départemental de l'Isère.

Comme l'a rapporté la patiente au « Quotidien » fin avril, la médecin remplaçante, lui semblant « pressée », prend sa tension « sans lui relever la manche et sans l'examiner davantage ».

Elle lui prescrit ensuite un médicament que la patiente refuse, car ce n'est pas son traitement habituel et qu'elle craint d'avoir des effets secondaires.

C'est à partir de ce moment que la consultation aurait dégénéré. La patiente refuse de payer. La médecin remplaçante déchire l'ordonnance, et déclare notamment à la patiente qu'elle « ne veut plus de femmes voilées dans son cabinet ». À ce moment-là, la patiente sort son téléphone et filme la médecin, qui accepte, comme on peut le voir sur la vidéo.

Elle déclare notamment qu'elle souhaite que leur différend soit médiatisé car elle ne veut « plus de femmes voilées en France »Elle assure que la législation française interdit le port du voile, et conclut : « Vous êtes un scandale pour toutes les femmes, si j'étais installée, ce serait marqué sur ma porte. »

Chacun reste sur ses positions

À la suite de cette altercation, la patiente décide de porter plainte devant la justice, puis d'alerter la chambre disciplinaire de l'Ordre, qui tente d'abord une conciliation avant l'audience de samedi dernier.

« La médecin est restée sur ses positions lors de l'audience, elle ne s'est pas posée de questions par rapport à son comportement », regrette la patiente, qui a depuis déménagé en région parisienne.

« Pour moi, cela va bien plus loin qu'une consultation impayée. La médecin n'a pas fait son travail, c'était bâclé, poursuit-elle. J'étais fatiguée, j'avais besoin d'une écoute, or ce n'est pas ce qu'elle a fait. »

« Je suis d'autant plus humiliée qu'une autre femme me dise que je suis un scandale pour toutes les autres, précise enfin cette mère de famille, qui indique élever seule ses enfants. Je défends les femmes, j'ai été élevée dans le respect et je prends mes propres décisions, je n'accepte pas qu'on me parle ainsi. »

Affaire regrettable

« Ce médecin a écrit par la suite qu'elle soupçonnait ma cliente de faire partie d'un mouvement radical [...], a déclaré Me Maati, l'avocat de la patiente au quotidien régional le Dauphiné. Quand bien même elle aurait peu d'estime pour la tenue de ma cliente, ce qui est son droit, elle a des obligations déontologiques. »

De son côté, le Dr Pascal Jallon, président de l'Ordre départemental de l'Isère, refuse de limiter le contentieux à la question du voile et évoque plutôt une « consultation qui dégénère ».

« C'est une affaire que l'on cherche à monter en épingle, précise au "Quotidien" le Dr Jallon. Il y a des mots qui n'auraient pas dû être dits, c'est sûr… Nous avons des métiers stressants, la consœur s'est emportée, même si cela n'excuse pas tout. »

« J'étais à l'audience en tant que témoin, je ne sais donc pas quelle sera la décision de la chambre disciplinaire, reprend le président de l'Ordre départemental. Ce qui est sûr, c'est que cette affaire est regrettable pour tout le monde, pour les patients comme pour les médecins. »

La généraliste n'a pas souhaité communiquer sur cette affaire. Son avocat n'a pour le moment pas encore répondu à nos sollicitations. 

La chambre disciplinaire de l'Ordre devrait rendre sa décision dans un mois.


Source : lequotidiendumedecin.fr