Un après-midi d’enfer

Publié le 27/05/2009
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ANTONY

Dr SYLVIE BOMBERT

LE 6 AVRIL, jour de malheur, je me rends en tant que patiente à mon rendez-vous en chirurgie orthopédique, prévu à 16 heures. Ayant l’habitude naïve (mais répandue) d’être à l’heure à mes rendez-vous, je suis donc assise dès 16 heures dans la salle d’attente avec mes compagnons d’infortune et nous nous échangeons les quatre revues faméliques mises à notre disposition. À 16 h 45, mon dernier compagnon est appelé et je me réjouis pour lui, car il se tortillait depuis une demi-heure sur un fauteuil orthopédique semblant rempli d’oursins. Et je reste seule dans les locaux désertés.

À 17 heures, un éclair de compréhension me traverse l’esprit : j’ai été oubliée ! Je pars à la recherche de la secrétaire : mais non, je n’ai pas été oubliée (?). Pas un bruit, personne (...)

Gentils docteurs.

À 17 h 35, une aimable infirmière me fait asseoir dans une salle de consultation vide. Je commence à m’affaler sur le bureau quand, soudain, j’entends du bruit dans mon dos et une dizaine d’êtres (humains ? Ils ne semblent pas habilités à dire bonjour), vêtus de blanc prend place en face de moi.

Deux minutes plus tard, à nouveau du bruit dans mon dos, une seconde colonne d’être vêtus de blanc prend place à ma gauche. Le dernier entré s’assoit sur mon manteau, que j’avais posé imprudemment sur la chaise à côté de moi. Et soudain retentit, toujours dans mon dos, une voix qui m’annonce : « Il y a beaucoup de docteurs, aujourd’hui, mais ils sont tous très gentils. » Et en me retournant, je découvre le consultant, qui veut me serrer (enfin) la main, ce qui est difficile car elle est paralysée, c’est d’ailleurs le sujet de cette consultation.

Et là, je suis vraiment en enfer.

Au total, plus d’une heure et demi de retard sans explication, pour être l’objet d’une consultation publique sans qu’on m’en ait préalablement demandé l’autorisation, mise ainsi devant le fait accompli par une phrase infantilisante.

Depuis, je demande des excuses sans en obtenir.

Est-ce vraiment gentil d’avoir 1 h 30 de retard sans avoir l’idée de prononcer un mot d’excuse ? Ni de le faire savoir dans la salle d’attente, afin que chacun puisse prendre ses dispositions (...) Est-ce gentil (ni même légal) de ne pas demander à l’avance au patient si la présence d’étudiants ou d’autres consultants le gêne ? Est-ce poli de s’adresser aux patients dans leur dos ? Enfin, avant de s’autoproclamer « gentil », ne faut-il pas commencer par être poli et laisser les autres juger si vous êtes « gentil » ?

Pourtant, de nos jours, la plupart des consultants s’efforcent d’être bienveillants et respectueux. Si échec, quel danger à s’excuser ?

Le Quotidien du Mdecin

Source : lequotidiendumedecin.fr