Le point de vue de Morgane Soulier

La médecine de demain passera-t-elle par le numérique ?

Publié le 28/10/2022
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Accélérés par la pandémie, la gestion de notre santé se fait de plus en plus via les outils numériques : prise de rendez-vous, téléconsultation, contrôle de nos constantes… Demain, la réalité virtuelle devrait accélérer le mouvement. Pour le plus grand bénéfice des patients et des médecins

Crédit photo : DR

Rappelons plusieurs éléments de contexte. Et d'abord qu'en France, près de 17% de la population serait concernée par la fracture numérique, selon l'INSEE. Ensuite, toutes les pathologies ne peuvent pas être traitées à distance. Par contre, le numérique peut aider à accélérer les diagnostics, à désengorger les salles d'attente, à mieux diriger et orienter le patient vers le bon professionnel, pour une prise en charge plus ciblée, plus efficace, plus rapidement. Un exemple concerne les maladies qui vont nécessiter une auscultation externe d'une partie du corps, grâce à la possibilité d'envoyer une photo de cette partie du corps (une tâche, une blessure, ...). Enfin, le numérique ne remplace pas l'échange humain nécessaire à de nombreux patients qui ont besoin d'être rassurés, de se sentir accompagnés, de bénéficier d'un peu d'empathie. Un chatbot ne remplacera pas la chaleur humaine ou le lien rassurant qui se crée parfois entre le patient et son équipe thérapeutique.

Ceci posé, les nouvelles technologies pourraient ouvrir la voie à de nouvelles possibilités en matière de santé. Meilleurs soins, prévention plus efficace, téléconsultation et télésurveillance améliorées, évolution des formations, … Le metavers de la santé pourrait être l'une des solutions permettant de relever plusieurs défis en matière de soins.

Grâce à la réalité augmentée et à la réalité virtuelle, de nombreuses facultés de médecine forment déjà les chirurgiens de demain via des outils de simulation et de reproduction d’opérations qui ont vraiment eu lieu permettant aux étudiants d’explorer le corps humain, de s’entrainer, d’être « au contact » de vrais patients ou d’hologramme plus efficacement que sur un corps déjà mort ou dans des livres. Et ces nouveaux outils pourraient permettre aux étudiants des zones à faibles revenus d’accéder aux ressources des meilleures institutions du monde, par le biais d'expériences virtuelles immersives.

En juin dernier, un chirurgien de l'hôpital John Hopkins à Baltimore, dans le Maryland, a réalisé la première chirurgie de la colonne vertébrale guidée par un casque de réalité augmentée. Ces nouveaux outils sont assimilables à des microscopes en réalité augmentée qui superposent des informations essentielles et un visuel détaillé de la partie du corps qui est en train d'être opérée, comme un GPS qui donnerait des indications précises aux praticiens, ou des projections sur la peau qui montreraient précisément où se trouvent les veines et les valves dans le corps d'un patient. Ces technologies rendront les procédures médicales plus rapides et plus fiables.

Rapprocher médecins et patients

Si la pandémie a accéléré l’adoption des téléconsultations, patients et professionnels de santé s’accordent sur ses limites : manque d’intimité ou de cadre médical qui peut mettre le patient en confiance. Grâce au métavers, la distance entre les patients et les équipes médicales pourrait être réduite. Les nouvelles technologies permettront au patient d’être immergé sans bouger de chez lui dans le cabinet de son médecin, et ce en 3D.

De plus en plus de médecins recourent par ailleurs à des jeux de réalité virtuelle pour traiter dépression, syndromes post-traumatiques, phobies ou hyperactivité. Concernant la phobie sociale, une étude de l'Université d'Oxford a montré que les patients qui ont bénéficié d’un traitement faisant appel à la réalité virtuelle ont connu une diminution de 38 % de leurs symptômes. Et une expérience menée par l'association des narcotiques anonymes a montré les bénéfices de la réalité virtuelle pour réunir un groupe de patients dans le metavers. Rassemblés via leurs avatars, les patients témoignent d'une expérience agréable, permettant de s'exprimer librement.

Il est évident que nombreuses innovations viendront améliorer encore et encore la qualité des soins... Cela soulèvera évidemment des questions d'éthique et de protection des données auxquelles il faudra savoir répondre.

Morgane Soulier, consultante indépendante, spécialiste web 3 et nouvelles technologies.

Source : Le Quotidien du médecin