Pour améliorer la prise en charge des addictions, les Conseils nationaux de l'Ordre des Pharmaciens et des Médecins ont diffusé ce 9 juillet une mise à jour de leurs recommandations pour la prescription et la dispensation des traitements de substitution aux opioïdes (TSO). L'objectif : « garantir une prise en charge efficace et de qualité, encadrée et conforme à la réglementation en vigueur », ont expliqué les deux Ordres dans un communiqué commun. « La prise en charge des conduites addictives nécessite une bonne coordination depuis leur prescription par les médecins jusqu'à leur dispensation par les pharmaciens », a souligné Carine Wolf-Thal, présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens. L'actualisation des recommandations vise à « faciliter l’exercice des professionnels et à mieux répondre aux réalités du terrain », a-t-elle ajouté.
Plus de 177 000 patients se sont vus dispenser des médicaments de substitution aux opioïdes en 2019, en médecine de ville, en milieu pénitentiaire et dans les centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (Csapa) estiment les Ordres. La buprénorphine haut dosage (BHD) reste le médicament de substitution aux opiacés (MSO) le plus remboursé en ville, avec 57 % des délivrances de MSO en 2022, mais la part de méthadone continue de progresser et atteint 43 % en 2022 (contre 38 % en 2019). Les produits à base de méthadone sont classés comme stupéfiants (ceux à base de buprénorphine sont seulement « assimilés stupéfiants ») et leur prescription initiale doit être réservée à certains spécialistes (Csapa ou services hospitaliers d’addictologies). Les autres MSO sont prescrits essentiellement par des médecins généralistes exerçant en ville.
« Il est souhaitable et nécessaire, pour la possibilité d’une primo prescription de méthadone en ville, que les médecins et les pharmaciens prenant en charge des patients sous traitement de substitution aux opiacés puissent acquérir une formation spécifique minimale », demandent les Ordres dans ces recommandations actualisées.
Tableau synthétique et prescription dématérialisée
Le nouveau document comprend notamment un tableau détaillant l'ensemble des médicaments de substitution, à base de buprénorphine (Subutex, Suboxone, Orobupré, Zubsolv, et pour l’action prolongée, Buvidal et Sixmo) de méthadone (sirop et gélules) ou de naloxone (Prenoxad, Nyxoïd, Ventizolve) avec pour chacun le dosage, la posologie, les modalités de prescription et d'administration, les conditions de prescription et de dispensation. Pour rappel, la mise à disposition de naloxone doit être systématique.
Les recommandations insistent sur la collaboration entre médecins et pharmaciens lors de la dispensation ; un contact téléphonique entre les deux professionnels devant le patient lors de la prescription sur ordonnance sécurisée est fortement suggéré. De même, le dialogue entre les deux corps de métiers doit être systématique pour chaque nouveau patient ; lorsqu’il y a déjà un traitement de substitution aux opiacés ; à chaque fois qu'il y a modification des posologies ou chevauchement ; ou encore devant toute difficulté ou en cas de suspicion de mésusage ou de nomadisme.
Depuis le décret du 20 décembre 2023, les prescriptions doivent être dématérialisées (les médecins ont jusqu’à la fin de l’année pour s’y conformer) : le prescripteur établit une ordonnance numérique au moyen des téléservices de l’Assurance-maladie, qui est ensuite imprimée et remise au patient. Ce dernier doit ensuite la présenter au pharmacien. Elle comporte un QR code véhiculant un numéro unique de prescription, et le nom du pharmacien choisi par le patient pour la délivrance du traitement. Il est conseillé au médecin de garder une copie de toutes prescriptions. « La prescription électronique, transmise directement et de manière sécurisée au pharmacien, devrait pouvoir apporter plus de sécurité. L'échange direct, médecin prescripteur/pharmacien dispensateur choisi pour la délivrance reste fondamental », lit-on.
« Au-delà des praticiens les plus motivés et volontaires, et comme pour toute pathologie chronique identifiée comme une priorité de santé publique, une implication du plus grand nombre de médecins et de pharmaciens est nécessaire », encouragent les Ordres. Rappelant que l'addiction est une maladie chronique avec perte de contrôle, évolutive et à rechutes, les instances suggèrent de discuter avec l’Assurance-maladie de l’inclusion de cette problématique dans la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP).
Enfin, les Ordres jugent « opportune » la désignation d'un ou deux référents au sein des Conseils départementaux de l’Ordre des médecins (CDOM) et des Conseils régionaux de l’Ordre des pharmaciens (CROP).
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