L’Institut national du cancer (Inca) vient de publier son appel d’offres pour un programme pilote de dépistage organisé du cancer du poumon. Cet appel à candidatures était préconisé par la Haute Autorité de santé en 2022 et doit apporter des réponses à certains points que l’institution voudrait clarifier avant une généralisation, dans un délai de cinq à dix ans.
Élaboré à la suite de plusieurs réunions entre un groupe de cotation (chargé de noter les propositions en fonction de la littérature scientifique) et des représentants du groupe de pilotage de la future expérimentation, l’appel à candidatures détaille les populations cibles : les adultes de 50 à 74 ans, fumeurs ou anciens fumeurs avec une consommation de 20 paquets/années ou plus pendant au moins quinze ans. Les autres expositions aux facteurs environnementaux comme l’amiante, le radon, le tabagisme passif ou la pollution atmosphérique ne sont pas pris en compte.
Des critères éprouvés depuis vingt ans
L’Inca prévoit deux tomodensitométries faible dose espacées d’un an, puis à deux ans d’intervalle. Seront inéligibles au dépistage les personnes avec comorbidités sévères, celles ayant un état général altéré, une dyspnée de repos, des antécédents de cancer, des symptômes évocateurs de cancer du poumon ou encore ayant réalisé une tomodensitométrie thoracique au cours des douze derniers mois.
Sur ces points, le texte de l’Inca n’est guère surprenant, puisqu’il reprend les critères connus depuis plus de vingt ans et déjà retenus par l'étude américaine NLST, son équivalente belgo-néerlandaise Nelson et l’essai Mild. Soit trois études qui ont démontré le bien-fondé du dépistage organisé du cancer du poumon. L’algorithme décisionnel préconisé dans l’appel à candidatures est d’ailleurs le même que celui de l’étude Nelson. L’utilisation de l’intelligence artificielle est envisageable au cours de l’expérimentation, à condition que cette dernière soit marquée CE.
L’objectif sera de définir en vie réelle la sensibilité, la spécificité et la valeur prédictive positive d’un programme de dépistage, ainsi que le pourcentage de surdiagnostic et de recours aux examens complémentaires invasifs et le risque de cancers radio-induits.
L’Inca souhaite également tester, au sein du programme pilote ou d’études menées en parallèle, plusieurs outils tels que des scores de risque (au minimum PLCOm2012) ou l’utilisation de biomarqueurs. Toute une batterie d’outils et de dispositifs d’arrêt du tabac devra être proposée aux actuels fumeurs entrant dans le programme de dépistage.
Le cancer du poumon est souvent dépisté tardivement en France, où l’on dénombrait 52 777 nouveaux cas diagnostiqués en 2023, dont 63 % chez des hommes. On estime que 33 000 décès lui sont imputables chaque année.
La France dans le peloton de queue
Cet appel à candidatures a lieu alors que se profile la Journée mondiale contre le cancer du poumon, le 1er août. À cette occasion, le collectif Ensemble nous poumons, créé et soutenu par AstraZeneca, plaide pour la mise en place rapide de ce programme pilote et d’études complémentaires, en préalable à un programme national. Le collectif rappelle que des expérimentations ont déjà été menées avec succès en France, et qu’elles apportent des données solides sur la faisabilité et l’organisation du dépistage.
La Croatie, la République tchèque, la Corée, Taïwan, la Pologne, la République populaire de Chine et l’Australie disposent déjà d’un programme national de dépistage organisé du cancer du poumon. En Europe, le projet européen Solace, lancé le 1er avril 2023 pour une durée de trois ans, doit aider les pays de l’Union européenne à implémenter des programmes de dépistage.
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