Avec près de 10 000 nouveaux cas par an et 7 000 décès, le cancer primitif du foie reste l'un des plus meurtriers. Et pourtant, « 75 % des cancers dépistés précocement sont accessibles aux traitements curatifs et à la guérison », relève le Pr Victor de Ledinghen (Bordeaux), secrétaire général de l’Association française pour l’étude du foie (AFEF).
C'est ce que souligne une étude menée par l'Unité de recherche clinique en économie de la santé d’île de France et l’AP-HP que l'association présente à l'occasion de son congrès à Bordeaux (28 septembre au 1er octobre). Les chercheurs ont pour cela étudié l’efficience d’une surveillance systématique tous les 6 mois (avec un recul de 5 ans), par un dépistage du cancer chez les patients porteurs de cirrhose du foie.
Pour 53 euros de plus par an et par patient
Résultats : l'efficacité du dépistage par échographie abdominale semestrielle est sans équivoque. À 10 ans, la survie est de 76 % chez les patients cirrhotiques qui ont bénéficié de ce dépistage versus 67 % chez les patients cirrhotiques pour qui ce n'était pas le cas. Soit une augmentation de la survie de 5 mois. « Ce qui est un très bon résultat en cancérologie », soulignent les auteurs qui pointent un rapport coût-efficacité notable. Le coût supplémentaire lié aux échographies et aux traitements précoces n’est que de 53 euros par patient par an.
Le cancer primitif du foie est la principale cause de décès chez les malades présentant une cirrhose à laquelle il est associé dans 90 % des cas. « Tout malade ayant une cirrhose est donc à risque élevé de cancer et doit bénéficier d’une surveillance, insiste le Pr de Ledinghen. D'autant que ce cancer reste asymptomatique jusqu'à un stade avancé de la maladie ». Après apparition des symptômes, la survie à 5 ans est estimée à 10 %.
En conclusion, la stratégie optimale de dépistage, qui passe par la réalisation d’une échographie abdominale tous les 6 mois chez les patients cirrhotiques, permettrait de réduire la mortalité liée de l’ordre de 40 %.
Stéatose hépatique et syndrome métabolique
Les hépatologues de l'AFEF s'inquiètent par ailleurs d'une forte augmentation de la prévalence et de la stéatose non alcoolique (NASH). Une analyse rétrospective, menée par des équipes de l'hôpital Pitié-Salpêtrière*, montre qu’au cours des 20 dernières années, celle-ci est passée de 2,6 % en 1995-2000 à 19,5 % en 2010-2015, essentiellement du fait d’un syndrome métabolique parmi les patients présentant un cancer du foie résécable.
Dans ce contexte, la nouvelle campagne lancée par l’AFEF s’attache à interpeller, à la veille des élections présidentielles, les pouvoirs publics sur « l’urgence de mettre en place une politique responsable de lutte contre l’apparition des maladies chroniques du foie ». L'AFEF souhaite aussi sensibiliser les médecins aux enjeux du dépistage précoce et du suivi régulier des patients cirrhotiques et inciter généralistes et patients à se conformer aux recommandations de surveillance de l’évolution de cette maladie.
Forte de l'ensemble de ces résultats de ces travaux, l’AFEF sollicite auprès de l’INCa, la mise en œuvre d’une campagne de communication auprès des patients atteints de cirrhose, afin de les sensibiliser aux enjeux sanitaires associés à la réalisation d'une échographie abdominale tous les six mois.
*Carcinome hépatocellulaire sur foie métabolique : tendances évolutives sur une période de 20 ans, caractéristiques cliniques et pronostiques. Services d'hépato-gastroentérologie et de chirurgie hépato-biliaire et transplantation hépatique, Hôpital Pitié-Salpêtrière, APHP, Paris
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