Si l’intérêt de l’intelligence artificielle (IA) et du machine learning (ML) en cardiologie est incontestable dans le domaine de la recherche – par exemple pour découvrir de nouveaux médicaments–, l’American Heart Association (AHA) souligne aussi l’existence d’un panorama d’applications possibles en pratique clinique--(1).
L’IA pour le diagnostic
D’abord, l’IA et le ML pourraient améliorer le diagnostic des maladies cardiovasculaires, notamment du fait de leurs applications en imagerie. Les algorithmes intelligents permettraient, selon l’AHA, de « planifier l’acquisition des images, analyser les clichés, réduire les temps d’acquisition et de reconstruction, réduire l’exposition aux radiations (…), assister le diagnostic et la rédaction des comptes rendus, aider la décision clinique et estimer le pronostic des patients », et ainsi d’optimiser la conduite des examens et la lecture des clichés, d’alléger la charge de travail des professionnels et de favoriser l’accès à diagnostic de qualité.
En imagerie cardiaque, ces technologies ont été testées – voire déjà utilisées – favorablement pour l’échocardiographie (afin d’automatiser la segmentation, l’estimation de la fraction d’éjection, l’évaluation des structures valvulaires, la détection d’une insuffisance cardiaque ou d’une hypertension artérielle pulmonaire, etc.), dans le scanner cardiaque (par exemple afin d’automatiser la quantification de la plaque d’athérome coronaire et le score calcique), en IRM cardiaque (estimation de la réserve de perfusion, prédiction du risque d’arrêt cardiorespiratoire ou d’AVC ischémique), en scintigraphie cardiaque (quantification de la perfusion myocardique et réserve de perfusion) et en angiographie (diagnostic d’AVC).
Des algorithmes d’IA ou ML sont aussi développés pour assister la lecture des électrocardiogrammes (ECG). L’objectif est notamment d’accélérer et affiner l’analyse des tracés. Et ce, suffisamment pour permettre la détection précoce – avant même toute expression clinique ou à l’imagerie – de diverses maladies (insuffisance ventriculaire, cardiomyopathie hypertrophique, amyloïdose cardiaque, sténose aortique, etc.).
L’IA pour la surveillance des patients
Au-delà du diagnostic, l’IA apparaît aussi prometteuse pour la surveillance des patients à l’hôpital. En effet, dans diverses études, des algorithmes intelligents ont montré leur capacité à réduire le taux de fausses alertes des appareils de monitoring cardiaque, à détecter des signes précoces de décompensation cardiaque, de sepsis ou d’hypotension en soins intensifs ou aux urgences, ou encore d’arythmie peropératoire, etc.
L’IA et le ML pourraient aussi améliorer la surveillance en ambulatoire à partir de données générées par divers capteurs portables – développés pour détecter le mouvement (et donc l’activité physique), le rythme cardiaque, la pression artérielle, etc.
L’IA pour le repérage des patients à risque
De plus, les algorithmes intelligents pourraient permettre de préciser l’estimation du risque cardiovasculaire.
Les nombreuses données enregistrées dans les dossiers médicaux électroniques pourraient alimenter des algorithmes intelligents afin d’améliorer encore l’estimation du risque cardiovasculaire et du pronostic des patients. Des études ont montré un intérêt de ces technologies pour prévoir le risque d’évènements cardiovasculaires majeurs à dix ans, le risque de décès après une admission en soins intensifs, etc. à partir de ces sources de données.
Tandis qu’avec les progrès du séquençage de l’ADN, de plus en plus de données génomiques sont disponibles, l’IA et le ML pourraient aussi permettre d’identifier, en recherche, des variants génétiques associés à des maladies cardiovasculaires, puis de mieux prendre en compte, en pratique clinique, la prédisposition génétique à ces pathologies.
Quoi qu’il en soit, l’AHA souligne que, dans la plupart des cas, ces algorithmes ne sont pas encore utilisables en pratique courante et restent à mieux étudier et valider. En particulier, nombre d’IA n’auraient pas encore montré d’impact sur la survie des patients dans des études prospectives. La société savante énumère également divers défis qui continuent de se poser en matière de développement d’algorithmes d’IA ou de ML en cardiologie : sources de données inadaptées, erreurs dans les données, manque d’interopérabilité, etc.
L’AHA rappelle enfin l’importance de considérations éthiques, de sécurité et confidentialité des données, d’accès à l’innovation, etc. Pour l’association, « l’IA n’a pas vocation à remplacer les professionnels de santé mais à les assister ».
(1) Antonis A. Armoundas, et al. Use of Artificial Intelligence in Improving Outcomes in Heart Disease: A Scientific Statement From the American Heart Association. Circulation. 28 Feb 2024
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