Cœur de femmes

Savoir identifier un syndrome coronaire aigu

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Publié le 09/03/2017
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CARDIO

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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

Même si l’incidence de la maladie coronaire est plus élevée chez les hommes que chez les femmes, la mortalité cardiovasculaire est plus élevée chez ces dernières. Les maladies cardiovasculaires sont en réalité la première cause de décès chez les femmes, avant le cancer du sein (1). Cette situation rend indispensable des mesures de prévention spécifiques.

Ainsi en île de France, les données du registre e-MUST portant sur les syndromes coronaires aigus avec sus-décalage du segment ST (STEMI) ont montré que les femmes sont plus âgées que les hommes, le délai entre le début de la douleur thoracique et l’appel au SAMU est plus long, et la mortalité intra-hospitalière est plus élevée, même après ajustement prenant en considération les différences de prise en charge et d’âge, sans explication claire (2).
Dans la population féminine, l’athérome se répartit de façon plus homogène dans les coronaires que chez l’homme et une dysfonction microvasculaire est plus fréquente. Elle entraîne une ischémie sous-endocardique, même en l’absence de lésions coronaires significatives. Les érosions de plaque sont constatées le plus souvent chez les femmes jeunes fumeuses avec un syndrome coronaire aigu. La dissection spontanée d’une artère coronaire, cause rare de syndrome coronaire aigu, se voit dans 90 % des cas chez des femmes d’environ 50 ans sans facteurs de risque, et le spasme coronaire est plus fréquent chez les femmes, en particulier fumeuses.

Davantage de symptômes d’angor

Sur le plan clinique, dans la maladie coronaire stable, les symptômes d’angine de poitrine sont plus fréquents chez la femme que chez l’homme, même en l’absence de sténose coronaire significative. Les hospitalisations et les coronarographies répétées sont ainsi fréquentes (3). Cependant, le pronostic des femmes présentant un angor sans lésion coronaire significative est pratiquement multiplié par 2 pour chaque facteur de risque additionnel (4). La découverte de lésions coronaires non significatives chez une femme doit donc conduire à la mise en place d’un dépistage et d’un traitement des facteurs de risque.
Au total, il est nécessaire de faire mieux connaître dans le public l’existence de la maladie coronaire chez la femme et ses symptômes afin de faciliter le diagnostic précoce, et la prise en charge rapide en cas d’occlusion coronaire. L’atypie des symptômes doit être mieux connue des praticiens, et l’imagerie doit être préférée à l’épreuve d’effort lors de la recherche d’une ischémie myocardique. La lutte contre le tabagisme chez les jeunes femmes doit être intensifiée. Enfin, la recherche fondamentale et clinique doit encore mieux prendre en compte la population féminine.

1. Townsend N, et al. Cardiovascular disease in Europe: epidemiological update 2016. Eur Heart J 2016; 37(42): 3232-45 ; 2. Benamer H, et al. Longer pre-hospital delays and higher mortality in women with STEMI: the e-MUST Registry. EuroIntervention 2016;12(5):e542-9 ; 3. Hemingway H, et al. Prevalence of angina in women versus men: a systematic review and meta-analysis of international variations across 31 countries. Circulation 2008; 117(12): 1526-36 ; 4. Gulati M, et al. Adverse cardiovascular outcomes in women with nonobstructive coronary artery disease: a report from the Women's Ischemia Syndrome Evaluation Study and the St James Women Take Heart Project. Arch Intern Med 2009; 169(9): 843-50.

Dr Gérard Bozet

Source : Le Quotidien du médecin: 9562