Fractures, luxations, douleurs…

La rotule, l’Achille de la prothèse totale de genou

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Publié le 12/11/2018
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rotule fig 1

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Crédit photo : DR

rotule fig 4

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rotule fig 2

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rotule fig 3

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Les complications patellaires sont une cause de mauvais résultat des prothèses totales de genou pouvant conduire à des interventions itératives ou à un changement de prothèse. Elles peuvent survenir sur patella native ou après un resurfaçage, c’est-à-dire la pose d’un implant en polyéthylène à la place du cartilage. Il est important de noter que, pour certaines écoles chirurgicales, ce resurfaçage par un médaillon n’est ni indispensable ni impératif.

Les complications impliquant ce sésamoïde sont redoutées, car elles touchent l’appareil extenseur du genou et peuvent parfois aboutir à une arthrodèse (blocage définitif du genou) ou au port d’une orthèse en permanence à la marche pour éviter le dérobement du genou, car une prothèse ne peut fonctionner que si l’appareil extenseur est continu. Les complications les plus fréquentes sont les fractures, les luxations ou instabilités, et les douleurs.

Des complications redoutées

Sur patella native, la prise en charge d'une fracture est identique à celle d’une fracture sans prothèse avec mise en œuvre d’un traitement d’urgence, celle-ci survenant le plus souvent dans le cadre d’une chute, d’un traumatisme sur le genou.

Sur patella resurfacée, le diagnostic de fracture est souvent fait en consultation ou sur une radiographie de contrôle, car, dans la majorité des cas, elle n’est pas le résultat d’une chute, mais l’expression de phénomènes de nécrose au niveau de la patella (fig. 1). Dans ce cas, deux questions se posent : l’appareil extenseur est-il discontinu ? L’implant patellaire est-il descellé ? En cas de réponse positive à l’une de ces deux questions, une reprise chirurgicale est nécessaire (reconstruction de l’appareil extenseur, ablation de l’implant patellaire). Sinon, le traitement non chirurgical (attelle, plâtre) est de mise, car il expose à moins de complications.

Quant à l’instabilité patellaire sur prothèse (fig. 2), elle impose de réduire manuellement la luxation, positionner une attelle puis entamer un bilan complet pour comprendre pourquoi la patella s’est luxée. Il faut toujours rechercher une malposition de la prothèse, c’est-à-dire une erreur de rotation des pièces prothétiques survenue lors de l’implantation. En présence d’une erreur de rotation fémorale et/ou tibiale, un changement de prothèse doit être discuté. Sinon, il faut stabiliser la patella par une reconstruction du ligament fémoropatellaire médial et/ou une ostéotomie de transposition/médialisation de la tubérosité tibiale.

Un bilan complet souvent nécessaire

Le phénomène de clunk syndrome, un bruit survenant lors des mouvements de flexion, correspondant à l’incarcération de tissus à l’intérieur de l’espace articulaire arthroplastique (fig. 3), nécessite en premier lieu une tentative de traitement fonctionnel ; on proposera, par la suite, une résection arthroscopique, ou une exérèse à ciel ouvert en cas de récidive, cette dernière exposant à plus de complications.

Enfin, des douleurs antérieures patellaires imposent d’éliminer des causes curables précédemment répertoriées : fracture, instabilité, clunk, conflit entre la prothèse fémorale et la patella (fig. 4), ce dernier cas nécessitant parfois, si les douleurs sont bien localisées à cet endroit, un geste de régularisation. Sur patella resurfacée, le diagnostic de descellement (l’implant patellaire n’est plus fixé) doit être évoqué. Si lors de la pose initiale de la prothèse on avait choisi de laisser le cartilage en place, la décision d’un resurfaçage de seconde intention peut être prise, après élimination de toute autre cause de douleurs.

De 10 à 15 % des douleurs antérieures sont inexpliquées et ne doivent pas conduire à une reprise chirurgicale. Toute réintervention pour douleur patellaire nécessite donc un bilan soigneux et doit être discutée, car susceptible d’exposer le patient à de nouvelles complications. Il faut comprendre que, plus nous reprenons ces patients, plus nous nous exposons à avoir des pertes de substance, pour lesquelles des solutions existent, certes, mais dont aucune n’a fait la preuve de sa véritable supériorité.

D'après la conférence d'enseignement de la Dr Sophie Putman, CHU de Lille


Source : Le Quotidien du médecin: 9701