LE QUOTIDIEN : Dans l'inconscient collectif, les personnes asthmatiques ne sont pas très sportives. L'avez-vous constaté au cours de votre exercice ?
Dr YAN MARTINAT : Effectivement. Les patients asthmatiques sont gênés et essoufflés à l'effort. Comme ils sont différents des autres en pratiquant une activité physique, les enfants, en particulier, ont tendance à se mettre un peu à l’écart, à se désocialiser. Bouger ne sera pas chez eux une démarche spontanée.
Or, c’est vraiment délétère, car s’ils ne font pas d’exercice, ils sont plus exposés au remodelage bronchique lié à l’asthme. De plus, leurs muscles respiratoires ne pourront se développer. Il est donc important d'expliquer à l’enfant que faire du sport est bon pour lui, que s’il prend ses médicaments correctement, il ne sera plus gêné à l’effort et que cela va lui éviter de se sentir jugé par ses copains.
S’il se dit fatigué, il faut justement qu'il comprenne que le sport va le défatiguer et prévenir son asthme. Le jeune patient pourra alors s’adonner à la pratique physique avec d’autres et retrouver une vie normale.
Dans quelles conditions un asthmatique doit-il faire du sport ?
Il faut non seulement encourager les patients eux-mêmes mais intégrer aussi leur entourage. Les parents ou professeurs de sport sont souvent hésitants et peu formés. Les projets d'accueil individualisé (PAI) utilisés actuellement expliquent aux parents la procédure à suivre et les conditions médicales à respecter.
Il existe chez les enfants deux types d’asthme d’effort. Ceux qui font de l’asthme en se dépensant et qui sont strictement normaux au repos. C’est « l’asthme d’effort pur ». Et puis il y a les enfants qui ont déjà eu une exploration fonctionnelle. Dans ce cas-là, l’effort révèle un asthme sous-jacent et le traitement n’est pas le même.
Certains sports sont plus à risque d’asthme que d’autres. À éviter, ceux qui ont tendance à essouffler ou provoquer une gêne respiratoire en lien avec une hyperventilation. L’environnement est très important à prendre en compte, par exemple dans la pratique de la course, du vélo et de la natation. Ainsi, une atmosphère froide ou humide, le brouillard ou une température de 40 °C avec un air pollué sont très nocifs.
À quel rythme l’activité physique doit-elle être pratiquée ?
Tout d’abord, ne jamais commencer un exercice brutalement. Mais s’échauffer de manière progressive avant l’effort avec du fractionné : faire des petites foulées, s’arrêter, puis reprendre. Il faut également recommander la prise d'un médicament préventif d’asthme à l’effort, le plus souvent un bronchodilatateur de courte durée d’action.
Faire du sport intensif n’est pas recommandé, mais en faire trois fois par semaine est excellent. Le message à faire passer, c’est que malgré tout, il est possible d'être asthmatique et un excellent sportif de haut niveau. Il existe de nombreux exemples comme le joueur de tennis suédois Björn Borg ou le nageur français Alain Bernard.
Mais il est vrai que les nageurs qui s’entraînent six heures par jour avec du chlore sont plus susceptibles de devenir asthmatiques. La plupart le sont d'ailleurs. Et les sportifs pratiquant un sport extrême, les triathlètes qui ventilent au sein d’une atmosphère urbaine et qui respirent de l'air pollué peuvent aussi le devenir.
Le sport aide-t-il à guérir ?
Oui, il aide à contrôler la maladie. Les pédiatres ont l’habitude de dire « Asthmatique un jour, asthmatique toujours ». Je ne suis pas certain que ce soit totalement vrai. Certains font de l’asthme à un certain moment de leur vie. Ils sont traités, ils vont bien, disparaissent pendant 4 -5 ans puis reviennent. Mais ce n’est plus la maladie d’autrefois.
Maintenant, il existe des moyens de contrôler les patients et de leur faire faire de l’exercice physique. Mais il est important que le diagnostic soit bien fait et les prises en charge aussi. Les kinés jouent un rôle important, pour développer la cage thoracique avec des mouvements des muscles respiratoires, mais aussi pour remettre les patients sur un vélo de manière progressive.
Oui, le sport peut aider, si ce n’est à arrêter les médicaments, au moins à les diminuer et à trouver la dose minimale. Si la maladie est bien gérée pendant un certain temps, il peut être possible d'arrêter le traitement de fond. Mais ce n'est pas au patient de le faire seul, il doit savoir que cela ne peut s'envisager qu'après avis médical.
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