Pas de lien de causalité prouvé

L’association allergie et asthme, pas si simple

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Publié le 06/05/2019
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Allergie asthme

Allergie asthme
Crédit photo : Phanie

Il y aurait 70 à 90 % d'atopiques chez les asthmatiques adultes. « Dans les études de cohortes, c'est avant tout l'atopie qui est prise en compte, c'est-à-dire la sensibilisation aux pneumallergènes, définie par prick-test ou par IgE spécifiques. Cela est différent de l'allergie proprement dite, laquelle inclut des manifestations cliniques après exposition à l'allergène », souligne la Pr Cécile Chenivesse (CHU Lille). La cohorte Egea (étude épidémiologique des facteurs génétiques et environnementaux de l'asthme) a estimé à environ 73 % la part des asthmatiques atopiques dans la population générale française. Quant à la cohorte Cobra (cohorte obstruction bronchique et asthme), elle relève 88 % d'atopiques parmi une population d'asthmatiques suivis en CHU. Et, chez les enfants, l'association atopie et asthme est classiquement plus fréquente : dans la cohorte Egea par exemple, il y a 88 % d'enfants atopiques.

« On dit classiquement que l'implication de l'allergie est moins fréquente dans l'asthme sévère. Néanmoins, elle reste importante. Dans l'étude Enfumosa (european network for understanding mechanisms of severe asthma) la prévalence de l'atopie était de 60 % dans l'asthme sévère et de 80 % dans l'asthme non sévère. » Il en est de même dans la cohorte Sart (severe asthma research programme).

Un phénomène de pays industrialisés

Les données concernant plus précisément l'allergie sont plus difficiles à obtenir, car il faut alors aussi avoir des éléments cliniques. En général, c'est l'association asthme et rhinite allergique qui est étudiée. La prévalence se situe alors aux alentours de 60-65 % dans les différentes études de cohortes. « Cependant, il faut remarquer que la prévalence de l'association allergie et asthme est très variable en fonction des pays. On observe un gradient nord-sud : l'association est beaucoup moins fréquente dans les pays moins industrialisés », ajoute la Pr Chenivesse.

De plus, la prévalence de l'asthme allergique augmente, alors que celle de l'asthme non allergique reste stable. Une récente étude suédoise (1) a permis de préciser les tendances de l'asthme chez les adultes allergiques, ou non, sur une durée de 20 ans. Les résultats montrent que la prévalence de l'asthme est passée de 8,4 % en 1996 à 9,9 % en 2006 et 10,9 % en 2016. Celle de l'asthme allergique a été de 5 % en 1996, 6 % en 2006 et 7,3 % en 2016, tandis que la prévalence de l'asthme non allergique est restée stable, autour de 3,4 à 3,8 %. «  Cela suggère que les mécanismes impliqués dans l'asthme non allergique sont stables dans le temps, alors que les facteurs impliqués dans l'asthme allergique, notamment environnementaux, augmentent », explique la Pr Chenivesse.

Une prise en charge systématique

Lorsqu'on a la certitude que l'allergie est impliquée dans les manifestations d'asthme, des traitements particuliers peuvent être proposés. D'abord mettre en place, pour tous les asthmatiques allergiques, des mesures d'éviction de l'allergène. Cela permet entre autre de diminuer le risque d'exacerbation sévère d'asthme.

Dans les formes modérées d'asthme allergique, il est possible de proposer une immunothérapie allergénique, avec l'objectif de diminuer le risque d'exacerbation. En cas d'asthme sévère allergique, on peut avoir recours à un traitement par biothérapie anti-IgE afin de mieux contrôler les symptômes et diminuer le risque d'exacerbation.

exergue :

Alors que l’asthme non allergique reste stable, les facteurs impliqués dans l’asthme allergique, notamment environnementaux, semblent augmenter

Entretien avec la Pr Cécile Chenivesse, CHU Lille
(1) Backman H et al. Increased prevalence of allergic asthma from 1996 to 2006 and further to 2016 – results from three population surveys. Clin Exp Allergy 2017;47:1426-35.

Dr Christine Fallet
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Source : Bilan Spécialiste