Quels sont les signes avant-coureurs, à l’adolescence, de l’apparition de troubles anxieux à l’âge adulte ? Pour répondre à cette question, les chercheurs du laboratoire Trajectoires développementales et psychiatrie (Inserm/ENS Paris-Saclay) et du Centre Borelli (CNRS/Université Paris-Saclay) ont eu recours à l'intelligence artificielle (IA). Trois éléments prédictifs ont été identifiés : le neuroticisme, le désespoir et les symptômes émotionnels. Leur travail est décrit dans « Molecular Psychiatry ».
Les troubles anxieux sont les troubles psychiatriques les plus fréquents chez les adolescents, environ un sur trois étant concerné. Il existe différents types de troubles anxieux : l’anxiété généralisée, le trouble panique, les phobies spécifiques, l’agoraphobie, le trouble d’anxiété sociale et le trouble d’anxiété de séparation.
« L'âge moyen d'apparition est avant 15 ans pour le trouble d'anxiété sociale et la phobie spécifique, alors que le trouble panique et le trouble d'anxiété généralisée ont tendance à apparaître un peu plus tard dans la vie, soulignent les auteurs. Les troubles anxieux peuvent rester instables à l'adolescence, avant de se consolider davantage au début de l'âge adulte. Il est donc crucial de détecter les individus présentant un risque élevé de développer une anxiété clinique. »
Le trouble anxieux, qui touche environ 21 % des adultes au moins une fois au cours de leur vie, se caractérise par une angoisse forte et durable sans lien avec un danger ou une menace réelle, entravant les activités quotidiennes. Un meilleur repérage chez les adolescents et jeunes adultes permet d'éviter une aggravation des symptômes au cours de la vie.
Évaluation de l'état de santé psychologique par questionnaire
Les chercheurs se sont appuyés sur l'étude de cohorte européenne Imagen, qui a inclus 2 223 adolescents de la population générale âgés de 14 ans entre 2008 et 2011. L'évolution du diagnostic de l’anxiété a été évaluée à l'aide de questionnaires qu'ils ont remplis en ligne sur leur état de santé psychologique à 14, 18 et 23 ans.
À l'aide du machine learning, les chercheurs ont pu déterminer quelles réponses formulées à 14 ans avaient un retentissement sur le diagnostic de trouble anxieux à l'âge de 18 ou 23 ans. Ils ont ainsi montré que la présence du neuroticisme, du désespoir et de symptômes émotionnels à l'adolescence augmente significativement le risque statistique de troubles anxieux plus tard.
« Le neuroticisme est un trait de personnalité fortement associé à l'expérience d'émotions négatives intenses et aux troubles d'internalisation », définissent les auteurs. Quant au désespoir, il est associé à un faible score concernant les réponses liées à l’optimisme et la confiance en soi. Les symptômes émotionnels peuvent être divers et prendre la forme notamment de maux de tête ou d'estomac, d'un sentiment d'inquiétude, d'abattement ou de peur.
Proposer une intervention précoce pour limiter la progression
Les chercheurs ont aussi étudié les images d'IRM cérébrale des volontaires en vue d'identifier des modifications éventuelles du volume de la matière grise prédictives de troubles anxieux. « Si l’imagerie n’a pas permis d’améliorer la performance de prédiction des troubles anxieux dans leur ensemble par rapport aux seules données issues des questionnaires, elle pourrait néanmoins permettre de déterminer plus précisément un type de trouble anxieux vers lequel une personne est susceptible d’évoluer », est-il expliqué dans un communiqué de l'Inserm.
« Notre étude révèle pour la première fois qu’il est possible de prédire de façon individualisée, et ce dès l’adolescence, l’apparition de troubles anxieux futurs. Ces signes avant-coureurs identifiés pourraient permettre de détecter les personnes à risque plus tôt et de leur proposer une intervention adaptée et personnalisée, tout en limitant la progression de ces pathologies et leurs conséquences sur la vie quotidienne », avance Jean-Luc Martinot, directeur de recherche à l’Inserm et pédopsychiatre, co-auteur de l’étude.
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