Le CHRU de Strasbourg utilise, depuis quatre ans, la cryoablation par radiologie interventionnelle pour traiter les lésions d’endométriose pariétale. « Moins délabrante que l’option chirurgicale, cette intervention mini-invasive guidée par l’imagerie pourrait devenir la référence, lorsque le traitement hormonal ne suffit pas », est-il expliqué dans un communiqué conjoint du CHRU et de Boston Scientific.
Cette intervention, courte (une heure environ), sous anesthésie locale en ambulatoire, permet une guérison rapide avec peu de séquelles postopératoires. « Lorsque les patientes passent le cap des 6-12 mois sans douleurs cycliques, il est peu probable que la maladie rechute », explique le Dr Luigi Cazzato, oncoradiologue au CHRU de Strasbourg. D’abord réalisée de façon exceptionnelle, la cryoablation est désormais systématiquement proposée aux patientes du centre strasbourgeois. Les contre-indications sont rares, d'après le Pr Afshin Gangi, chef du service de radiologie interventionnelle au CHRU : nodule avec envahissement de la peau et prise d’un traitement anticoagulant. Une dizaine de centres hospitaliers français sont équipés de plateaux techniques de radiologie interventionnelle.
Le développement de la cryothérapie, qui consiste à congeler des masses à -40 °C, figurait dans le plan Cancer 2014-2019. Utilisée pour traiter les récidives de cancers prostatiques et les tumeurs de rein, cette technique permet aussi de cibler une métastase isolée dans les os ou à la base du crâne. L’idée de la proposer dans l’endométriose a germé à Strasbourg en 2017, suivant l’exemple américain de la Mayo Clinic.
Une origine postopératoire
L’endométriose pariétale est la forme la plus fréquente d’atteinte extrapelvienne. « Les cellules de l’endomètre se nichent dans le tissu musculaire de l’abdomen - souvent dans le muscle grand droit - généralement au niveau de l’aponévrose, plus rarement à l’intérieur du muscle lui-même, formant des nodules de 2 mm à 3 cm », explique la Dr Émilie Faller, chirurgienne gynécologue au centre expert Endo-Alsace du CHRU de Strasbourg.
Cette forme clinique sous-diagnostiquée « n’a rien à voir avec l’endométriose classique, car elle reste relativement superficielle », précise la Dr Aline Host, également chirurgienne gynécologue au centre EndoAlsace. Ces nodules, le plus souvent au pli inguinal ou près du nombril, sont sensibles en permanence et très douloureux lors des règles. Si on les palpe à ce moment-là en consultation, « les patientes en sautent au plafond », rapporte la Dr Host. L’hypertrophie hémorragique cyclique induit à long terme une fibrose cicatricielle du tissu environnant, formant une coque autour du nodule.
L’origine la plus probable semble être postchirurgicale, dans les deux ans après une intervention utérine ou pelvienne « Le risque s’élèverait de 2 % en posthystérectomie et serait de 4/1 000 après une césarienne », indique le Pr Gangi. En l’absence d’autre explication physiopathologique, « la supposition la plus logique est que la dissémination de cellules de l'endomètre est directement liée au geste chirurgical, qui les implante hors de l’utérus », poursuit-il.
Pour le diagnostic, « l’examen clinique suffit à 95 % pour poser avec quasi-certitude le diagnostic d’endométriose pariétal assez rapide dès lors que l’on se trouve face à ces trois signes : cyclicité des douleurs, présence d’une cicatrice et de nodules à la palpation », explique la Dr Host. L’IRM, quand elle est réalisée, retrouve un nodule fibreux à contours irréguliers ponctué de microfoyers hémorragiques et permet, par rapport à l’échographie, le diagnostic différentiel, principalement une tumeur desmoïde.
Procédure sous contrôle IRM ou scanner
Si la lésion n’est pas trop douloureuse, une simple surveillance peut suffire. Le traitement de première intention repose sur la prise d’un traitement hormonal continu, œstroprogestatifs ou progestatifs. Si cela se révèle insuffisant, il n’y avait jusqu’alors que l’option chirurgicale, invasive et possiblement délabrante, parfois avec récidive.
Une IRM en amont de l’intervention est pratiquée pour mesurer et localiser précisément le nodule. Lors de la procédure, le radiologue commence par introduire, sous contrôle échographique, une ou plusieurs fines aiguilles de cryothérapie selon la taille du nodule.
L’opération consiste à faire circuler dans les aiguilles un gaz réfrigérant au cœur du nodule sous contrôle IRM ou scanner, sans injection de produit de contraste. Cette technique permet de voir et de contrôler en direct la congélation du nodule. « La patiente reste quelques heures en observation dans le service avant de rentrer chez elle le jour même », explique le Dr Cazzato. Un œdème local peut descendre vers le pli de l’aine et les organes génitaux, il se résorbe en quelques jours. Les tissus détruits par la cryoablation laissent ensuite une fibrose, visible à l’IRM postopératoire réalisée un à trois mois après avant de finir par disparaître.
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