Perturbateurs endocriniens, passage systémique

La protection solaire remise en cause

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Publié le 17/01/2018
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Crédit photo : PHANIE

Indispensables pour protéger la peau des effets nocifs des UV, les produits de protection solaire font pourtant l’objet de critiques quant à leur efficacité, ou de doutes quant à leur sécurité.

En ce qui concerne le risque allergique, tous les filtres allergisants ont, en principe, été retirés de la composition des produits de protection solaire. Les produits vendus en pharmacie et parapharmacie avalisés par la Commission européenne font l’objet d’un marquage CE et sont tous d’une haute qualité technologique, la France étant une référence dans ce domaine, avec des critères bien plus rigoureux que ceux de la Food and Drug Administration (FDA), par exemple.

Faux débat mais vraie question

Certains filtres chimiques (benzophénone-3, et 4-methylbenzylidène camphre) ont toutefois été accusés (1) d’être des perturbateurs endocriniens. Les études, réalisées chez l’animal uniquement – en l’occurrence la rate – ont montré que ces substances étaient susceptibles de perturber la fertilité et d’être à l’origine de modifications hormonales qui pourraient favoriser la survenue de cancers hormonodépendants. « Aucun lien n’a été établi chez l’humain. Dans ces études, la voie d’administration, la quantité administrée et la quantité systémique induite potentiellement par pénétration transcutanée ne correspondant en rien à l’usage des produits de protection solaire », a souligné le Dr Jean-Claude Béani (La Tronche).

Ces filtres chimiques sont par ailleurs présents dans de nombreux autres produits d’usage quotidien, tels que shampooings, gel douche, savon liquide, lessive. Le risque imputé aux produits de protection solaire appliqués quelques semaines par an est donc probablement un faux débat, mais soulève en revanche la question beaucoup plus générale de la formulation des produits d’utilisation courante. La Commission européenne a décidé de limiter chez l’adulte la concentration de la benzophénone-3 dans les produits cosmétiques, à 6 % en tant que filtre UV et de ne pas l’utiliser chez les enfants âgés de moins de 10 ans.

Nanoparticules minérales

Les filtres minéraux, utilisés quant à eux sous forme de nanoparticules dans les produits de protection solaire destinés aux enfants et aux adultes ayant une grande sensibilité cutanée, soulèvent également de nombreuses questions quant à leur totale innocuité, compte tenu du risque de passage systémique lié à l’extrême finesse de ces particules. « L’ANSM recommande de ne pas utiliser de produit cosmétique notamment les produits de protection solaire contenant du dioxyde de titane sous forme de nanoparticules sur la peau lésée (par exemple après un coup de soleil), sur le visage et dans des locaux fermés lorsque ces dernières sont contenues dans des sprays aérosol », a rappelé le Dr Béani.

Efficacité prouvée

Mais les avis et recommandations émis par la Commission européenne et l’ANSM ne doivent pas servir d’argument pour dissuader d’utiliser les filtres solaires. Leur danger potentiel pour la santé reste plus que spéculatif. Ils ont démontré une efficacité certaine dans la prévention des effets chroniques du soleil (carcinomes épidermoïdes, kératoses actiniques, mélanome) à condition d’être correctement utilisés, de ne pas augmenter la durée des expositions volontaires et de permettre le bronzage sans désagrément. « Leur utilisation doit être raisonnée et pertinente », considère le Dr Béani.

 

D’après la session « Polémiques sur la protection solaire »
(1) Schlumpf M, Schmid P et al. Endocrine activity and developmental toxicity of cosmetic UV filters--an update, Toxicology. 2004 Dec 1;205(1-2):113-22

Dr Christine Fallet

Source : Le Quotidien du médecin: 9631