L’expérience des téléconsulations en Aquitaine

« La télédermatologie est l’un des axes prioritaires de développement de la télémédecine, notamment dans le cadre de la santé des détenus et des personnes âgées dépendantes vivant en EHPAD », a rappelé la Pr  Marie-Sylvie Doutre (Bordeaux). Le parcours de soins de ces patients est en effet souvent complexe, car ils sont difficilement mobilisables, les établissements souvent éloignés des centres médicaux et les délais de rendez-vous longs.

Le programme aquitain de télémédecine en EHPAD a été mis en place par l’Agence régionale de santé en janvier 2016, initialement pour les plaies chroniques et les escarres, la démarche éthique et les soins palliatifs, les troubles du comportement chez les patients souffrant de démence et les troubles psychiatriques. Ce programme a été étendu, en avril 2016, à la téléconsultation en dermatologie. Une cinquantaine d’EHPAD sont équipées d’un chariot mobile et/ou d’une caméra fixe, qui permettent la vidéoconférence par internet via un réseau sécurisé.

En pratique, la demande de téléconsultation est adressée au centre expert avec une fiche de renseignements, parfois des photos, et un rendez-vous est donné dans un délai maximal de 15 jours. À côté du patient, le médecin coordinateur ou référent, un ou des soignants et un membre de la famille ou le tuteur sont présents lors de la téléconsultation. Un compte rendu est ensuite envoyé dans les deux heures qui suivent, avec le diagnostic, les éventuels examens complémentaires et le traitement proposé.

Entre avril 2016 et juin 2017, 100 téléconsultations ont été réalisées pour 78 patients, qui ont consulté majoritairement une fois, parfois à deux reprises (16 cas) et plus rarement à trois reprises (trois cas). Les 55 femmes et 23 hommes qui ont bénéficié de cette organisation étaient en moyenne âgés de 88 ans et, pour trois-quarts, très dépendants (GIR 1 à 3).

Les quatre motifs les plus fréquents de demande de téléconsultations ont été le prurit (dont trois cas de pemphigoïde bulleuse prise en charge au sein de l’EHPAD), la dermite d’incontinence, l’eczéma (qui a nécessité deux hospitalisations en deuxième intention) et les éruptions eczématiformes et les tumeurs cutanées. Dans ce dernier cas, une biopsie a le plus souvent été nécessaire, et alors réalisée, soit au sein de l’EHPAD, soit en consultation chez un dermatologue. Quatre dossiers, concernant deux mélanomes et deux carcinomes épidermoïdes chez des patients nouvellement installés en EHPAD, ont été discutés en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) d’oncodermatologie.

Les téléconsultations de dermatologie ont été appréciées par les patients, les médecins et le personnel paramédical. Elles permettent en effet un accès rapide à un avis spécialisé, évitent de déplacer des personnes peu autonomes et, bénéfice collatéral inattendu, elles participent à la formation des médecins et soignants des EHPAD, comme en témoigne la diminution des demandes en première intention.

D’après la communication de la Pr Marie-Sylvie Doutre, CHU, Bordeaux