Femme enceinte et voyage

Éviter les tropiques

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Publié le 10/11/2016
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TROPIQUES

TROPIQUES
Crédit photo : PHANIE

Le moment le plus propice pour voyager est le deuxième trimestre de la grossesse et idéalement, les zones tropicales doivent être évitées. Bien sûr, il faut tenir compte des antécédents obstétricaux et du déroulement de la grossesse et donner à la femme un duplicata de son dossier obstétrical. Il faut dans tous les cas prendre soin de vérifier les limites de terme imposées par l’assurance et la compagnie aérienne.

Il importe d’identifier les risques propres au mode de transport, à la destination et au type d’activités prévues pendant le séjour.

L’avion expose à un risque d’accident thrombo-embolique accru (5 fois plus fréquent) à cause de la dilatation veineuse, de la gêne au retour veineux et de l’hypercoagulabilité. Le risque d’hypoxie fœtale peut être augmenté par une anémie, une dysfonction placentaire ou une hémoglobinopathie. Il ne faut pas non plus oublier le risque traumatique en cas de turbulence. Il faut conseiller à la femme enceinte de choisir une place côté couloir, de se lever et de boire fréquemment en évitant la caféine et la théine et de porter des bas de contention. Le recours à des anticoagulants peut être discuté dans certains cas (obésité, antécédents de phlébite).

La croisière en bateau n’est pas autorisée après 24 semaines d’aménorrhée du fait du risque de mal de mer et de chute.

En voiture, il n’y a pas d’augmentation du risque thrombo-embolique, mais il est conseillé de ne pas faire plus de 6 heures de route dans la journée et de faire des pauses toutes les 2 heures 30. Le principal risque est celui d’accident de la route.

Le train est le moyen de transport le plus sûr chez la femme enceinte : pas de stress, accident exceptionnel. Elle doit là encore être encouragée à porter des bas de contention et à se déplacer fréquemment.

Il est conseillé d’éviter les destinations offrant de faibles capacités de prise en charge médicale et obstétricale et les pays à risque élevé d’infections : ceux classés dans le groupe 3 pour le paludisme, ceux à risque élevé d’infections sévères comme la dengue, le chikungunya, le virus zika ou les méningites bactériennes et ceux nécessitant une vaccination par un vaccin vivant atténué (fièvre jaune).

Toute vaccination impose une évaluation de son rapport bénéfice/risque. Les vaccins vivants atténués sont contre-indiqués pendant la grossesse, à l’exception de la fièvre jaune si le voyage est inévitable. Le vaccin rougeole/oreillons/rubéole est formellement contre-indiqué, le coquelucheux est non recommandé en France mais l’est par exemple aux États-Unis au 3e trimestre. Parmi les vaccins inactivés, diphtérie, tétanos et poliomyélite sont possibles, tout comme ceux contre l’hépatite A et B ou le méningocoque. Il n’y a pas de contre-indication au vaccin antirabique. Le vaccin antigrippal est conseillé, ainsi que le vaccin pneumococcique chez les femmes à risque. Certains vaccins, notamment celui contre la typhoïde, n’ont pas été évalués chez la femme enceinte.

La protection contre le paludisme est vectorielle et chimiothérapeutique. Chez les femmes non immunisées contre le plasmodium, il y a un risque accru de thrombopénie, d’hypoglycémie, de neuropaludisme et d’anémie. L’infection placentaire chronique, surtout décrite chez les autochtones, est responsable d’avortement, de retard de croissance intra-utérin et de prématurité. Le recours aux répulsif sur les zones découvertes doit privilégier les produits contenant 30 % de DEET (diéthyl toluamide), 20 % d’IR3535 et 20 % de KBR 3023 (icaridine).

La prophylaxie dépend des zones : zone 2 chloroquine et proguanil et zone 1 chloroquine. La zone 3 est fortement déconseillée.

La prévention de la turista mais aussi des hépatites A et E se fonde sur les règles d’hygiène : hygiène très rigoureuse des mains avec les solutions hydro-alcooliques, eau en bouteilles exclusivement, cuisson des aliments.

L’exposition solaire doit être limitée, de préférence le matin et après 16-17 heures, avec une protection pour éviter le chloasma.

Les sports dangereux ou fatigants sont à éviter, comme les baignades en eau douce (risque de bilharziose et de leptospirose), la marche nu-pieds sur le sable (risque de larva migrans et d’ankylostomose) et le contact avec les animaux.

La trousse de voyage doit contenir le dossier obstétrical et les assurances ; du paracétamol ; un antispasmodique ; un antihistaminique ; un antinauséeux ; un antidiarrhéique ; un antibiotique à large spectre et un antibiotique en cas de cystite sans fièvre ; en se référant si besoin au Centre de référence sur les agents tératogènes (CRAT, www.lecrat.fr)

D’après la communication de Fabienne Galley-Raulin (centre hospitalier, Verdun)

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du médecin: 9533