« J’étais tranquille, j’avais pris ma retraite au printemps 2016 », sourit le Dr Dominique Hérault, qui a exercé pendant trente-sept ans à Renazé, en Mayenne, à une quarantaine de kilomètres de Laval. Lorsqu’un jour, le téléphone de ce généraliste, qui a été un temps président de l’Association nationale des médecins généralistes des hôpitaux locaux, sonne. Au bout du fil, le président du Conseil départemental de l’Ordre de l’époque, qui lui dit en substance que le département, les communes et la Cpam reçoivent un nombre croissant de réclamations de patients qui se plaignent de ne pas avoir accès à un médecin traitant. Ces acteurs songeaient alors à faire appel à des généralistes retraités parce qu’il n’y avait plus qu’une seule généraliste installée pour s’occuper d’une zone qui regroupe 14 communes et compte 17 000 habitants. Le Dr Hérault ne voudrait-il pas donner un coup de main ?
C’est ainsi que le premier service médical de proximité (SMP) est né, à l’été 2017. « Un SMP est un centre de santé. Nous y faisons travailler des généralistes retraités, en tant que salariés. Chacun y exerce un jour par semaine. Donc pour avoir l’équivalent d’un temps plein, il en faut six. Nous avons de la chance car au SMP de Laval, ils sont douze. Ainsi, chaque jour, deux médecins retraités assurent les consultations du lundi au vendredi, 52 semaines par an », explique le Dr Hérault. Qui loue, de plus, la souplesse du dispositif. Si l’un de ces retraités veut prendre une semaine ou un mois de vacances, il est tout à fait libre de le faire.
Presque trop de volontaires
Ces praticiens qui ont repris le collier ont-ils été faciles à convaincre ? « Franchement, aujourd’hui, on refuserait presque du monde. D’une part, nous sommes tous un peu des drogués de la médecine, de plus on est contents d’être utiles, et enfin l’aspect financier n’est pas négligeable, c’est aussi un complément retraite », relève le Dr Hérault. Le montant du salaire perçu par ces praticiens ? Au SMP de Laval, il est de 450 euros par jour pour 10 heures de travail, donc 45 euros net de l’heure. Face au succès de la formule, et avec en tête l’idée de créer des vocations auprès de la jeune génération de médecins, l’équipe a décidé de monter un deuxième SMP. Intergénérationnel, celui-ci. « Pour montrer l’intérêt de l’exercice, ce qui nous est aisé à transmettre puisque nous avons presque tous été maîtres de stage. Quatre jours par semaine, nous avons un interne avec nous », explique Dominique Hérault.
Faire se rencontrer les plus anciens et les plus jeunes
Et une nouvelle expérience qui fait se croiser les plus anciens et les plus jeunes a débuté en avril. Le mécanisme est simple. Le SMP propose aux jeunes médecins qui débutent de les salarier, un an maximum (par un CDD de six mois renouvelable une fois). À l’issue, soit ils décident de s’installer en libéral sur le territoire et continuent à bénéficier, entre autres avantages, de l’accès au secrétariat médical multisite et du logiciel commun du SMP, soit ils prennent la décision de partir et le SMP fait appel à de nouveaux jeunes pour rééditer le processus pour une nouvelle année. « Nous verrons bien les résultats, certains sont enthousiastes, comme le Dr Maxime Des Aunais, un des tout jeunes qui va sauter le pas de l’installation. Pour d’autres, on ne sait pas encore. Mais ce qui est certain et malgré l’utilité de notre implication, c’est que l’avenir de la médecine générale n’est pas chez les médecins de 70 ans », conclut, philosophe, le Dr Hérault.
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