10 % de praticiens en moins entre 2007 et 2017

La médecine générale confrontée à l’érosion de ses effectifs

Publié le 07/11/2012
Article réservé aux abonnés
1352254693386387_IMG_93110_HR.jpg

1352254693386387_IMG_93110_HR.jpg
Crédit photo : Source : CNOM 2012

AU 1ER JANVIER 2012, 92 477 médecins généralistes avaient une activité régulière. Selon les chiffres du dernier atlas de l’Ordre des médecins consacré à la démographie médicale, ce chiffre est en baisse de 5 % par rapport à 2007. Les projections ne sont pas encourageantes ; les généralistes ne seront plus que 88 860 à exercer en 2017. Cette baisse de la population médicale, conjuguée au vieillissement de la population et à l’explosion des maladies chroniques risque de compliquer encore l’accès aux soins dans plusieurs régions françaises.

• Une tendance générale à la baisse.

Entre 2007 et 2012, 77 départements ont affronté une baisse des effectifs généralistes. Contrairement aux idées reçues, les territoires ruraux ne sont pas les seuls touchés. Paris et le Val-de-Marne enregistrent la plus forte baisse de médecins de famille (- 16 %). Entre 2007 et 2017, l’Ile-de-France devrait même connaître une diminution de près de 30 % de ses effectifs.

Seuls six départements affichent une stagnation de la densité médicale sur les cinq dernières années : le Loir-et-Cher, le Maine-et-Loire, la Haute-Savoie, le Haut-Rhin, le Morbihan et la Drôme. Enfin, 13 départements connaissent une « légère augmentation » des effectifs de médecine générale : les Pyrénées-Atlantiques, les Landes, le Tarn-et-Garonne, les Pyrénées-Orientales, la Corse du sud, la Charente-Maritime, la Loire, l’Ain, la Savoie, le Doubs, la Loire-Atlantique, le Finistère et le Calvados.

• Des généralistes libéraux vieillissants.

La moyenne d’âge des généralistes libéraux en activité (6 sur 10 sont des hommes) est de 53 ans, observe l’Ordre. Mais plus d’un département sur deux a une moyenne d’âge supérieure. Dans l’Orne, cette moyenne frôle les 56 ans. Dans les Hautes-Pyrénées, 37,4 % des généralistes libéraux ont plus de 60 ans, (36,9 % dans l’Indre et 35,6 % à Paris). L’Ordre enregistre de plus en plus de médecins retraités actifs : ils sont un peu plus de 7 150 en médecine générale.

• Des départements fragilisés.

Cette effet ciseaux (départs non remplacés, moyenne d’âge plus élevée) met en péril l’offre de soins dans plusieurs territoires. Huit régions (Basse-Normandie, Bourgogne, Centre, Champagne-Ardenne, Haute-Normandie, Lorraine, Pays de la Loire et Picardie) ont une « faible » densité médicale (selon les critères ordinaux) avec moins de 118 généralistes pour 100 000 habitants - la moyenne nationale est proche de 140 médecins pour 100 000 habitants.

Plus que la moyenne d’âge qui augmente, le rapport entre les généralistes libéraux de moins de 40 ans comparé à ceux âgés de plus de 60 ans devient préoccupant. Dans le Cher, un tiers des omnipraticiens libéraux ont plus de 60 ans, tandis que les moins de 40 ne représentent que 4,3 % des effectifs. Les proportions sont sensiblement les mêmes dans l’Orne (5,8 % de praticiens de moins de 40 ans et 34,7 % de 60 ans et plus), l’Indre, (5,4 % et 36,9 %), la Nièvre (5,2 % contre 34,6 %), la Creuse (5,1 % contre 31,6 %), et les Alpes de Haute-Provence (6 % et 28,3 %). Ces départements, et quelques autres, vont se trouver confrontés d’ici à 2017 à des départs à la retraite massifs et à une relève quasi inexistante. Pour l’Ordre, « cette situation pose la question de l’accessibilité territoriale aux soins primaires en tout point du territoire ».

• L’exercice libéral en perte de vitesse mais…

Le nombre d’omnipraticiens ayant opté pour l’exercice libéral diminue. Seuls 59,7 % d’entre eux exercent en libéral exclusif (55 200 médecins), soit une baisse de 5,5 % en cinq ans. Selon les projections de l’Ordre, les effectifs de généralistes libéraux vont continuer à décroître au profit de la médecine salariée d’ici à 2017. Conséquence directe, le nombre de praticiens libéraux a baissé dans 84 départements entre 2007 et 2012. La Creuse va perdre plus d’un tiers de ses effectifs libéraux (- 34 %) durant cette période. Les Pyrénées-Atlantiques et le Vaucluse gardent une offre libérale stable et dix départements connaissent une hausse du nombre d’omnipraticiens libéraux. Parmi eux, le département des Hauts-de-Seine enregistre la plus forte hausse (15 %), suivi du Haut-Rhin (10 %).

• ... un généraliste sur trois s’installe en ville 5 ans après son inscription au tableau

Pour la première fois, l’Ordre a ausculté l’installation des diplômés en médecine générale cinq ans après leur inscription au tableau. Certains signaux sont encourageants. Les jeunes générations ne sont pas aussi hostiles au secteur libéral que certaines statistiques brutes pouvaient le laissaient croire. Ils sont certes seulement 10 % à opter pour la médecine de ville lors de leur inscription ordinale mais 34,5 % dans un délai de cinq ans, ce qui conforte l’idée que les jeunes médecins prennent leur temps avant de s’installer. 

Les internes souhaitent mieux connaître cette forme d’exercice au cours de leur cursus universitaire par l’augmentation du nombre de stages proposés en ambulatoire en y associant une réflexion sur les conditions de logement et de transport. « Il faut intervenir dans les forums métier auprès des lycéens pour expliquer ce qu’est l’exercice libéral », explique le Dr Michel Legmann, président du CNOM, qui plaide également pour le renforcement du compagnonnage. Ces installations en libéral interviennent après une période plus ou moins longue de remplacement. « Près d’un sur deux s’installe dans un délai de 4 ans », souligne l’Ordre des médecins, et 90 % s’installent dans la région où ont été effectués les remplacements.

• Généralistes salariés : du sang neuf.

Conséquence de la perte (relative) d’attrait pour l’exercice libéral, les effectifs des généralistes salariés ont augmenté de 2,6 % entre 2007 et 2012 avec d’importantes variations départementales. La Nièvre a ainsi perdu 26 % de ses effectifs entre 2007 et 2012. Dans le même temps, la Charente-Maritime a connu une hausse de 28 %. L’Ordre ne donne aucune explication à ces importants contrastes départementaux.

 HENRI DE SAINT ROMAN

Source : Le Quotidien du Médecin: 9185