Quand la relation se dégrade avec votre personnel

Comment sanctionner la faute d'un salarié ?

Publié le 09/01/2020
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Votre secrétaire arrive de plus en plus fréquemment en retard. Elle se montre désagréable avec vos patients. Vous lui en avez fait plusieurs fois la remarque, mais son attitude ne change pas. Vous envisagez de lui notifier une mesure disciplinaire. Mais comment faire ?

Crédit photo : PHANIE

Avant toute sanction disciplinaire, il y a en une procédure à respecter, destinée à informer le salarié concerné et à lui permettre d’assurer sa défense. Suivez le guide.

Quelles fautes peut-on sanctionner ?

Si le comportement de votre salarié ne correspond pas à l’exécution normale de son contrat de travail, cela constitue une faute susceptible de faire l’objet d’une sanction.

Peuvent notamment être considérés comme fautifs : le non-respect des règles de discipline fixées dans l’entreprise, le refus de se conformer à un ordre de l’employeur, le non-respect de l’obligation de discrétion et de loyauté, les critiques, les injures, les menaces, les violences et les erreurs ou les négligences commises dans le travail.

Les caractéristiques de la sanction disciplinaire

Le point le plus important, c’est que la sanction disciplinaire doit être proportionnée à la gravité de la faute commise. À l’exception de l’avertissement, la sanction peut avoir des conséquences particulièrement graves pour le salarié. Elle est en effet de nature à affecter – immédiatement ou non – la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction ou sa rémunération.

Les sanctions disciplinaires peuvent être : l’avertissement, un blâme, une mise à pied disciplinaire (sans percevoir de salaire), une rétrogradation, une mutation, un licenciement pour faute réelle et sérieuse, un licenciement pour faute grave ou pour faute lourde. Les simples observations verbales ne sont pas considérées comme des sanctions disciplinaires.

Par contre, certaines sanctions sont interdites. Parmi elles : les amendes et autres sanctions pécuniaires, les sanctions en raison de l’un des motifs (origine, sexe, situation de famille, patronyme…) énoncés à l’article L 1 132 – 1 du code du travail qui interdit toute discrimination aux différents moments de la vie d’un salarié, les sanctions prises à l’encontre d’un(e) salarié(e) victime ou témoin de harcèlement sexuel ou moral.

La procédure disciplinaire

Avant de prendre une sanction (sauf pour l’avertissement), vous devez convoquer le salarié à un entretien préalable, en indiquant l’objet, la date, l’heure et le lieu de l’entretien. La convocation doit également préciser au salarié qu’il peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise. Lors de l’entretien, vous devez expliquer au salarié les motifs de la sanction envisagée et recueillir ses explications.

La sanction ne peut intervenir moins de deux jours ouvrables, ni plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien. Vous informerez alors le salarié par écrit de la nature et des motifs de la sanction prononcée à son égard.

Lorsque les faits reprochés au salarié sont d’une particulière gravité et rendent impossible son maintien dans l’entreprise, vous pouvez prendre à son encontre une mesure conservatoire de mise à pied à effet immédiat, dite « mise à pied conservatoire ». Dans ce cas, le salarié est dispensé d’exécuter son travail et vous devez engager immédiatement la procédure disciplinaire.

Si la mise à pied conservatoire est suivie d’un licenciement pour faute grave ou lourde, le salarié ne sera pas rémunéré pour la durée correspondant à cette mise à pied conservatoire. Et si la sanction encourue est le licenciement, c’est la procédure propre au licenciement pour motif personnel que vous devrez respecter.

L’avertissement

Sanction disciplinaire mineure, il vous permet de sanctionner une faute légère. Vous envoyez à votre salarié une remontrance par écrit en lui indiquant la faute qu’il a commise et en le mettant en garde contre le renouvellement de cette faute. Il peut ainsi (s’il le souhaite…) modifier son comportement.

Il n’est pas obligatoire de faire un entretien préalable pour notifier un avertissement au salarié. Il suffit de lui envoyer un courrier en recommandé avec avis de réception ou de le lui remettre en main propre contre décharge. Motivez suffisamment votre courrier et indiquez clairement qu’il s’agit d’un premier avertissement.

La faute simple

C’est une faute du salarié qui, sans justifier la qualification de faute grave, constitue une « cause réelle et sérieuse » de licenciement. Ce peut être par exemple une négligence grave commise par le salarié dans le cadre de son travail.

Le salarié licencié effectue alors son préavis, sauf si l’employeur l’en dispense. Il perçoit les indemnités liées à la rupture du contrat de travail (bien entendu, s’il y a droit) : l’indemnité de licenciement, l’indemnité compensatrice de préavis (s’il n’effectue pas ce préavis), l’indemnité compensatrice de congés payés. On verra qu’il en va différemment pour les fautes graves et lourdes.

La faute grave

On appelle faute grave une faute d’une telle gravité que l’employeur ne peut pas maintenir le salarié dans l’entreprise, même temporairement. La faute grave entraîne donc le départ immédiat du salarié.

Quelques exemples de faute grave : l’abandon de poste, l’insubordination du salarié (par exemple, s’il refuse d’accomplir une tâche de travail prévu dans son contrat de travail), le harcèlement, des violences ou des injures envers l’employeur ou d’autres salariés, un vol dans l’entreprise, un salarié en état d’ivresse pendant les heures de travail.

Quelles sont les conséquences de la faute grave ? L’indemnité de licenciement ne sera pas versée au salarié. Il en sera de même de l’indemnité compensatrice de préavis (puisque, par définition, le préavis n’aura pas été effectué). Le salarié licencié pour faute grave percevra uniquement l’indemnité compensatrice de congés payés (s’il y a droit).

La faute lourde

C’est une faute particulièrement grave qui révèle l’intention de nuire du salarié à l’encontre de l’entreprise et de l’employeur. Bien entendu, la faute lourde entraîne la rupture immédiate du contrat de travail. Attention, c’est à l’employeur d’apporter la preuve de l’intention de nuire du salarié. En l’absence de preuve, il ne peut y avoir une faute lourde.

Parmi les fautes lourdes fréquemment trouvées dans la jurisprudence, citons : la dégradation volontaire d’un outil de l’entreprise, des violences physiques et des menaces de mort envers l’employeur, le détournement de clientèle au profit d’un concurrent, la divulgation d’informations secrètes ou confidentielles.

Les conséquences pour le salarié licencié pour faute lourde sont les mêmes que pour une faute grave : pas de versement d’indemnités de licenciement et d’indemnité de préavis. Par contre le salarié perçoit, s’il y a droit, l’indemnité de congés payés.

La réaction du salarié

Le salarié qui conteste une sanction peut présenter ses explications à l’employeur et il peut saisir le conseil des prud’hommes. Celui-ci est en effet le seul compétent pour vérifier la régularité de la procédure disciplinaire et pour apprécier si les faits reprochés au salarié justifient la sanction infligée.

Le délai de prescription

Il est important de noter qu’aucun fait fautif ne peut donner lieu à sanction, passé un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance (sauf en cas de poursuites pénales). De même, aucune sanction datant de plus de trois ans ne peut être invoquée à l’appui d’une nouvelle sanction. Attention, il n’est pas possible de sanctionner deux fois la même faute.

Jacques Gaston–Carrère jgastoncarrere@orange.fr

Source : Le Quotidien du médecin