Des patients à risque infectieux élevé

Un référentiel sur la vaccination

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Publié le 06/11/2020
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Pour la première fois, la Société francophone du diabète publie un référentiel sur la vaccination des personnes diabétiques, chez lesquelles la couverture vaccinale est actuellement insuffisante.
De nombreux patients ne connaissent pas leur statut vaccinal

De nombreux patients ne connaissent pas leur statut vaccinal
Crédit photo : phanie

On sait que le diabète, de type 1 ou de type 2, est associé à un risque infectieux accru et que la couverture vaccinale est insuffisante chez les diabétiques, dans un contexte global de freins médicaux, paramédicaux et individuels à la vaccination.

Un constat qui a conduit la Société francophone du diabète (SFD) à proposer un référentiel sur la vaccination du patient diabétique (1), chez lequel il n’y avait jusqu’alors pas de recommandations spécifiques. « Ce référentiel, accessible sur le site de la SFD, émane d’un groupe de travail multidisciplinaire incluant des associations de patients », a précisé la Pr Ariane Sultan (Montpellier), qui en a assuré la coordination avec le Pr Bernard Bauduceau. Le groupe de travail s’était fixé trois objectifs : mener une enquête auprès de personnes diabétiques et de leur entourage, évaluer le ressenti et les pratiques des membres de la SFD, et rédiger un référentiel sur la vaccination chez la personne diabétique.

Au cours de l’enquête, réalisée en collaboration avec la Fédération française des diabétiques, publiée dans Médecine des maladies métaboliques en février 2020 (2), 68 % des personnes interrogées ont déclaré être vaccinées contre la grippe, 71,6 % contre le tétanos, 29,4 % contre le pneumocoque, 33,9 % contre l’hépatite B et 19,2 % contre le zona/varicelle, donc bien en deçà des objectifs des autorités de santé. Un nombre important ne connaissait pas son statut vaccinal (respectivement 3,5 %, 14,9 %, 32,6 %, 26,5 % et 36,2 %). L’enquête menée auprès des membres de la SFD a de son côté permis de souligner la confiance accordée à la SFD.

La préparation du référentiel s’est basée sur une même démarche pour chaque pathologie infectieuse : analyse des données de la littérature, preuves de l’efficacité vaccinale dans la population diabétique et in fine rédaction du texte de recommandations.

Grippes volontiers plus sévères

Plusieurs études rapportent la plus grande sévérité de la grippe en cas de diabète, et en particulier en cas de déséquilibre glycémique, ce qui se traduit par un risque accu d’hospitalisations, de pneumonies et de décès. Même si les essais randomisés font défaut, les nombreuses et vastes études de cohorte et cas-témoins chez les diabétiques soulignent les bénéfices de la vaccination antigrippale dans cette population : réduction de l’incidence de la grippe, de la mortalité de toute cause et des événements cardiovasculaires.

La couverture vaccinale est insuffisante, notamment chez les sujets de moins de 65 ans (autour de 30 %). Le référentiel rappelle que la vaccination peut être réalisée par les médecins, pharmaciens, infirmiers et sages-femmes.

Risque accru d’infections à pneumocoques

Là aussi, les données de la littérature convergent pour souligner l’augmentation du risque d’infections à pneumocoques chez les personnes diabétiques, avec un effet délétère de l’association diabète comorbidités, et une sévérité plus grande de ces infections en cas de diabète (hospitalisations, mortalité).

Actuellement, deux vaccins sont disponibles, qui doivent être utilisés de façon séquentielle pour une primovaccination. Le VPC 13, puis le VPP 23. Les bénéfices cliniques de la vaccination par le VPC 13 sont démontrés dans une étude randomisée, y compris en cas de diabète, et ceux du VPP 23 dans une étude rétrospective.

Zona, tétanos, hépatite B

Le risque de zona est accru au cours du diabète, et les bénéfices cliniques de la vaccination ont été démontrés dans une étude randomisée, y compris au cours du diabète. Le vaccin permet de réduire l’incidence du zona et des douleurs post-zostériennes chez les sujets de plus de 60 ans.

Le surrisque de tétanos en cas de diabète est bien établi du fait des plaies chroniques, en particulier au niveau des pieds. Il n’y a pas d’étude spécifique sur ce vaccin chez les diabétiques, le calendrier vaccinal est identique à celui de la population générale.

Le risque de contamination par le virus de l’hépatite B serait augmenté chez les diabétiques, tout comme celui d’évolution vers une cirrhose. Le bénéfice sérologique de cette vaccination en cas de diabète est établi et les experts rappellent que ce vaccin n’est pas associé à un risque accru d’affections démyélinisantes.

Chez l’enfant et l’adolescent

Chez l’enfant et l’adolescent vivant avec un diabète, le risque d’infection est faible si l’équilibre glycémique est bon, mais une infection peut entraîner un déséquilibre glycémique. La vaccination antigrippale est ainsi indiquée dès l’âge de 6 mois, les autres vaccinations devant être réalisées selon le calendrier vaccinal. Les experts soulignent, là aussi, l’absence de surrisque de maladie auto-immune après vaccination chez les enfants et les adolescents vivant avec un diabète.

SFD 2020. Session « Vaccination et diabète » 

(1) Sultan A et al. Référentiel de la Société francophone du diabète (SFD) : vaccination chez la personne diabétique. Med Mal Metab 2020;14(1):46–57. doi : 10.1016/j.mmm.2020.01.010

(2) Guillot C et al. Le rapport à la vaccination des personnes diabétiques. Résultats préliminaires d’une étude auprès de 3731 personnes diabétiques. Med Mal Metab 2020;14(1):58-63. doi : 10.1016/j.mmm.2020.01.011  

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du médecin