Cholangite biliaire primitive : deux agonistes de PPAR prometteurs en seconde ligne

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Publié le 29/02/2024
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Crédit photo : BURGER / PHANIE

Élafibranor et séladelpar, tels sont les noms de deux représentants de la classe des agonistes sélectifs de PPAR, qui pourraient faire leur entrée dans le traitement de seconde ligne de la cholangite biliaire primitive (CBP). Deux essais prometteurs de phase 3 (randomisés, contrôlés versus placebo en double aveugle) ont été publiés conjointement ce 29 février dans The New England Journal of Medicine.

Les deux molécules ont été testées chez des patients en échec du traitement par acide ursodésoxycholique. Environ 30 à 40 % des patients ne sont pas répondeurs à ce traitement de référence avec un risque élevé de progression et de pronostic défavorable. L’essai Elative (financé par Genfit et Ipsen) a évalué l’élafibranor, un agoniste double PPAR-α et -δ ; l’essai Response (financé par CymaBay Therapeutics) le séladelpar, un agoniste PPAR-α.

La CBP, comme le rappelle un éditorial associé, est caractérisée par une inflammation chronique des canaux biliaires d’origine probablement auto-immune entraînant fibrose hépatique et cirrhose. Le diagnostic est généralement posé entre 40 et 60 ans, les femmes étant à plus haut risque. Les signes cliniques les plus bruyants sont l’asthénie, le prurit et l’ictère progressif.

Un critère biochimique prédictif du risque de transplantation et de décès

Jusqu’à présent, en deuxième ligne, étaient utilisés l’acide obéticholique (AMM) et le bézafibrate (hors AMM), un agoniste pan-PPAR. Mais, là encore, environ la moitié des patients traités par acide obéticholique est en rechute, avec souvent l’apparition ou l’aggravation d’un prurit. Quant au fénofibrate, un agoniste PPAR-α, les données sont moins nombreuses, mais son effet thérapeutique probable le fait recommander en cas d’indisponibilité du bézafibrate, lit-on dans le protocole national de diagnostic et de soins (PNDS) de 2021. En dernier recours, la transplantation hépatique est une option représentant environ 15 à 40 greffes par an en France et environ 200 en Europe, rapporte le PNDS.

Ici, le critère principal de jugement, identique dans les deux essais, était la réponse biochimique à un an : un taux de phosphatases alcalines (PAL) < 1,67 fois la limite supérieure normale, avec une réduction ≥15 % par rapport à l’inclusion, et un taux normal de bilirubine totale. Ce critère est considéré comme prédictif du risque de transplantation et de décès. L’un des critères secondaires était le prurit mesuré sur une échelle allant de 0 (pas de prurit) à 10 (le pire imaginable). Les deux essais ont randomisé en 2:1 avec 160 participants au total dans Elative et 193 dans Response.

Au total une réponse biochimique a été observée chez 51 % des patients du groupe élafibranor par rapport à 4 % dans le groupe placebo dans l’essai Elative ; et chez 62 % des patients du groupe séladelpar par rapport à 20 % du groupe placebo dans Response.

Un effet sur le prurit à mieux comprendre

Pour le Dr David Assis, gastro-entérologue à la faculté de Yale, qui s’exprime dans un deuxième éditorial associé, ces résultats s’inscrivent dans la lignée du ceux du bézafibrate, mais plus intéressant est l’effet sur le prurit. Un effet significatif à 6 mois a été observé avec le séladelpar mais pas avec l’élafibranor. Cette différence entre les deux agonistes est-elle d’ordre mécanistique ? Sera-t-elle retrouvée en vie réelle ? Si l’éditorialiste pose des points à éclaircir dans le futur, il estime que « la capacité d’un agoniste PPAR à réduire significativement le prurit est à juste titre considérée comme un aspect important du traitement de la CBP ». Améliorer la qualité de vie est une demande des patients à laquelle les traitements doivent aussi répondre, poursuit-il.

Pour les cas difficiles à traiter ayant une réponse incomplète, des essais en cours testent l’association entre acide ursodésoxycholique, acide obéticholique et agonistes PPAR. Le spécialiste de la faculté de Yale souligne la nécessité de mieux comprendre le mode d’action des agonistes PPAR sur le prurit et le système immunitaire, ceci pouvant permettre d’identifier des biomarqueurs prédictifs de la réponse au traitement et d’aller vers un traitement personnalisé.


Source : lequotidiendumedecin.fr