« Chaque nouvelle molécule, disponible dans les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI), obtient un taux de réponse primaire significatif sur la rémission clinique et endoscopique, approchant plus ou moins les 40 %, avec l’éventualité d’un échappement thérapeutique progressif, remarque le Pr Xavier Roblin, service d’hépato-gastroentérologie du CHU de Saint-Étienne. Depuis les anti-TNFα en 1999, aucune molécule n’a encore réussi à faire mieux ». Mais alors que les inhibiteurs de JAK contrôlent déjà la production d’un large panel de cytokines, de nouveaux anti-JAK préférentiels sont attendus. D’autres molécules agissent sur le recrutement cellulaire vers l’intestin : modulateurs des récepteurs des sphingosines-1-phosphate, anti-β7 (comme l’étrolizumab). Elles peuvent aussi cibler certaines cytokines spécifiques comme l’interleukine (IL) 23.
Des anti-IL23 prometteurs
« Parmi les deux familles dont la disponibilité est imminente figurent les inhibiteurs sélectifs de l’IL-23 (anti-IL23), détaille le Pr Roblin. L’IL-23 joue un rôle central dans l’instauration et la perpétuation de l’inflammation intestinale, en stabilisant la différenciation des lymphocytes T vers un profil de sécrétion cytokinique Th17 à potentiel pro-inflammatoire. Le risankizumab devrait être le premier à être commercialisé dans la MC. Publiés en 2022, les résultats d’efficacité obtenus chez les patients complexes, bio-naïfs et réfractaires, tant en induction qu’en entretien, se situent aux alentours de 40 % (1). On observe également une cicatrisation muqueuse satisfaisante, une amélioration de la qualité de vie et une sécurité d’emploi favorable ». Par exemple, le taux de rémission clinique selon le score d’activité de la MC (CDAI) était de 45 % avec une différence ajustée, versus placebo, de 21 % sous risankizumab (600 mg). En cours, l’étude SEQUENCE face-face le compare à l’ustékinumab (anti-IL12-IL23), à des fins de positionnement en seconde ligne après échec aux anti-TNFα.
Le mirikizumab affiche lui aussi des résultats prometteurs, contre placebo, dans la RCH, à la fois en induction et en entretien (2). L’AMM européenne est attendue prochainement. « Comme observé dans le psoriasis, l’espoir est que les anti-IL23 soient plus efficaces que les anti-IL12-IL23 », explique le Pr Roblin. Quant au guselkumab, il est testé en phase III dans la RCH et la MC. Selon les résultats de phase IIb rapportés dans la RCH modérée à sévère, davantage de patients sous guselkumab (200 mg et 400 mg) ont obtenu une réponse clinique à la semaine 12, par rapport à ceux du bras placebo (respectivement 61,4 % et 60,7 % versus 27,6 %, p < 0,001), soit un différentiel de 30 %.
L’arrivée des anti-JAK-1
Le tofacitinib est un inhibiteur non sélectif des JAK disponible dans la RCH. Mais déjà, les inhibiteurs préférentiels des JAK-1 se profilent. Dans la RCH modérée à sévère, le filgotinib (200 mg par jour) s’avère supérieur au placebo, avec un taux de réponse toujours aux alentours de 40 % en moyenne. Ce bénéfice est retrouvé tant en induction qu’en entretien, et surtout chez les patients bio-naïfs. La sécurité d’emploi sur un an semble correcte. Le filgotinib vient d’obtenir une AMM dans la RCH en troisième ligne de traitement, après échecs des anti-TNF et du védolizumab (anti-intégrine α4β7). En revanche, l’essai de phase III DIVERSITY, évaluant le filgotinib dans la MC, a été décevant. L’upadacitinib, un autre inhibiteur de JAK-1, s’avère pour sa part efficace dans RCH et la MC, en induction et en maintenance. Une AMM est attendue avant la fin de l’année 2023. Cette molécule deviendrait ainsi le premier inhibiteur de JAK dans la MC.
Combothérapie : un effet additif ?
En 2022, le concept de « combothérapie » s’est concrétisé grâce à l’étude VEGA, menée dans la RCH modérée à sévère (3). Elle comparait le golimumab (anti-TNFα), le guselkumab (anti-IL23) et l’association des deux. À la semaine 12, le double blocage de l’IL-23 et du TNFα s’avérait supérieur à chacune des deux monothérapies : il induisait plus efficacement une réponse et une rémission clinique, une amélioration endoscopique, ainsi que des résultats composites histologiques-endoscopiques. « En fin de période d’induction, on observe presque un effet additif des deux biologiques avec des taux approchant 50 %, résume le spécialiste. De plus, en phase d’entretien, le guselkumab seul (le golimumab étant retiré) fait mieux qu’en monothérapie d’induction ».
(1) Ferrante M et al. Lancet. 2022 May 28;399(10340):2031-46
(2) D’Haens G et al. ECCO 2022, abstract OP26
(3) Feagan BG et al. Lancet Gastroenterol Hepatol. 2023 Feb 1;S2468-1253(22)00427-7
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