Les métiers de services à la personne : des conditions d’emploi difficiles

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Publié le 13/06/2024
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Les enjeux de la santé au travail des services à la personne sont caractérisés par des exigences élevées, tant sur le plan des capacités physiques que relationnelles et d’organisation. L’exercice se fait souvent au domicile de particuliers et, dans ce cas, le suivi médical et de prévention des risques professionnels de l’employé n’est pas toujours réalisé.

Des métiers à forte utilité sociale dont il faudrait renforcer l’attractivité

Des métiers à forte utilité sociale dont il faudrait renforcer l’attractivité
Crédit photo : BURGER/PHANIE

Les métiers de service à la personne constituent un ensemble flou et disparate : des professions diverses, des types d’employeurs multiples, des modèles économiques et organisationnels variés, allant du particulier employeur jusqu’à des structures associatives, privées ou publiques regroupant plusieurs dizaines de salariés.

Environ 1,3 million de salariés sont employés directement par un particulier. Ces salariés sont quasi exclusivement des femmes peu qualifiées (assistantes de vie, gardes d’enfants, employées de ménage, etc.). Elles exercent majoritairement leur activité au domicile de leur employeur. La plupart d’entre elles travaillent à temps partiel, pour plusieurs particuliers employeurs, parfois en complément d’un emploi principal dans un autre secteur.

Les aides à domicile moins suivies

« Le domicile privé, défini comme inviolable, n’est pas accessible au médecin du travail, limitant les possibilités d’action sur le terrain. De plus, lorsque l’employeur est un particulier, il n’a pas toujours connaissance de ses responsabilités en matière de santé et sécurité de son salarié, de son devoir d’information sur les risques auxquels il est exposé. L’adhésion à un service de prévention et de santé au travail interentreprises est aléatoire », souligne la Dr Laetitia Rollin (CHU de Rouen).

Les aides à domicile sont ainsi moins suivies par les services de santé au travail que les autres salariés. « Une étude a également mis en évidence qu’elles sous-estiment l’exposition aux risques chimiques (produits d’entretien…) et biologiques, alors qu’elles ont une bonne connaissance des risques physiques dus au port de charges », précise la Dr Rollin.

Elles sont également exposées à des risques psychosociaux, avec des amplitudes horaires de travail très importantes, davantage d’exigences émotionnelles et de conflits de valeurs. À l’inverse, elles apprécient d’être autonomes. D’après les études réalisées dans les services de prévention et de santé au travail, elles souffrent plus de troubles musculosquelettiques que d’autres salariés, mais n’ont pas plus de souffrance psychologique (syndrome dépressif, etc.).

Une amélioration possible ?

L’enjeu est donc d’améliorer les conditions de travail de ces salariés, de les accompagner et de renforcer l’attractivité de ces métiers à forte utilité sociale.

« Une étude (Van de Weerdt C, Th2-CO-1) a montré qu’un changement d’organisation dans des services d’aide à domicile, avec la création d’équipes autonomes et le délaissement du système hiérarchique classique, n’a pas, malgré les espoirs, augmenté l’épanouissement au travail… Au contraire, il y a eu plus de stress et de tensions et une surcharge de travail », rapporte la Dr Rollin.

Une autre étude (Guittienne M, Th2-CO-3) s’est intéressée aux troubles musculosquelettiques des aides à domicile. Les exosquelettes apparaissent comme une aide technique potentielle, d’après de premiers résultats qui restent à confirmer.

Les initiatives sont nombreuses. Citons ainsi la possibilité de faire intervenir, lors d’un premier rendez-vous d’aide à domicile chez le patient, un binôme composé par un ergothérapeute (pour le patient) et un ergonome (pour le salarié).

« Il est important de prendre en considération les attentes des salariés : la revalorisation des salaires, le recrutement de personnel supplémentaire, la reconnaissance de la profession, un véhicule disponible et un soutien direct en cas de problème avec un bénéficiaire », souligne la Dr Rollin.


Source : Le Quotidien du Médecin