La réserve cognitive est un élément essentiel de la plasticité cérébrale. C’est un processus dynamique, qui se constitue tout au long de la vie et est modulé par l’éducation, le multilinguisme, les apprentissages, le mode de vie, le régime alimentaire… Elle rend compte des différences interindividuelles dans l’exécution de différentes tâches cognitives, ou de la résistance face à une pathologie neurodégénérative. La pratique de la musique, dans la jeunesse ou à l’âge adulte, aurait un impact positif sur la réserve cognitive et pourrait retarder les démences. La musicalité est une des dernières facultés cognitives à disparaître.
Écouter de la musique peut réduire les sensations de douleur, ou encore influencer positivement la locomotion et la cognition dans la maladie de Parkinson. La pratique musicale peut limiter le déclin cognitif, sensorimoteur et émotionnel cérébral, ainsi qu’augmenter le sentiment de bien-être chez les personnes âgées. Diverses études ont été menées pour mieux évaluer le rôle des interventions musicales dans le vieillissement normal et pathologique. De plus, l’entraînement musical est ludique, généralement motivant et peut être facile à intégrer dans les activités quotidiennes.
Initier à la culture musicale
Chez les personnes âgées en bonne santé, le déclin cognitif est lié à une atrophie cérébrale globale, qui affecte plus particulièrement le cortex préfrontal et l’hippocampe, très impliqué dans la mémoire de travail et la pratique musicale. Une étude a été menée en Allemagne et en Suisse chez 150 personnes âgées de 64 et 78 ans, en bonne santé et néophytes en musique. Un groupe pratiquait le piano, l’autre bénéficiait d’un « bain musical » avec écoute analytique et apprentissage de l’histoire de la musique. Les premiers résultats à six mois montrent, dans les deux groupes, une stabilisation ou une augmentation de la taille des micro et macrostructures cérébrales, avec une amélioration de certaines fonctions cérébrales et cognitives. L’épaississement du cortex auditif primaire s’associe à une meilleure perception de la parole dans le bruit. Si l’amélioration semble plus marquée chez ceux qui pratiquent, il est intéressant que constater qu’une intervention simple, avec initiation à la culture musicale, apporte aussi des bénéfices. « Des approches thérapeutiques innovantes, constituées d’activités musicales adaptées à une population âgée novice en musique, pourraient être ainsi proposées pour améliorer leurs capacités cognitives et sensorimotrices, ainsi que préserver leurs structures et fonctions cérébrales », note Clara James, responsable de l'unité de Recherche appliquée et développement au sein de la Haute école de santé de Genève.
Maladie d’Alzheimer : garder le rythme !
Les activités musicales à vocation thérapeutique se sont considérablement développées ces dernières années auprès des personnes atteintes de maladies neurodégénératives, et en particulier dans la maladie d’Alzheimer (MA). Même à un stade avancé, ces patients conservent une grande sensibilité à la musique. Les réseaux cérébraux impliqués dans le traitement de l’information musicale semblent relativement épargnés par la maladie. « Que ce soit après une intervention réceptive (écoute de la musique) ou participative, on constate une amélioration de l’humeur et de la mémoire épisodique, relève Lise Hobeika, ingénieure à l'Institut de recherche et coordination acoustique de Lille. L’amélioration de la mémoire à court terme, de la mémoire de travail, de l’état émotionnel et comportemental, sont plus marqués en cas d’intervention active ».
Là aussi, il est intéressant de voir que l’écoute a déjà des effets bénéfiques. La participation peut être simple, en demandant au sujet de danser ou de bouger selon le rythme musical. Il est possible qu’en synchronisant leurs mouvements avec le rythme de la musique les patients atteints de MA activent des circuits neuronaux, impliqués également dans le fonctionnement cognitif moteur et socio-émotionnel. De plus, bouger en rythme activerait les circuits de la récompense et stimulerait la libération de dopamine. L’activité de groupe, enfin, apporte des bénéfices en termes de communication avec les autres. Toutefois, on manque d’études précises et contrôlées, avec une évaluation adaptée aux patients atteints de MA, utilisant des mesures psychophysiologiques et les méthodes des neurosciences.
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