La spondylarthrite ankylosante (SpA) est une maladie polymorphe avec de nombreuses manifestations extra-articulaires, parmi lesquelles l'uvéite est la plus fréquente puisqu'on la retrouve dans 25 à 30 % des cas.
Pour être efficaces sur les uvéites ou les sclérites de la SpA ou de la polyarthrite rhumatoïde (PR), le contrôle de la maladie systémique est indispensable. Or 25 % des patients s'immunisent contre les anti-TNF et, contrairement à l'idée reçue, cette immunogénicité peut survenir précocement – dans 20 % des cas dès la 36e semaine. Elle diminue l'efficacité des anti-TNF, qui est directement lié à leur concentration dans le sang. Le phénomène concerne tous les autres rhumatismes inflammatoires – en particulier la SpA – et tous les anti-TNF.
« On sait maintenant que le méthotrexate (MTX) limite l'immunogénicité des anti-TNF, aussi préconise-t-on, lorsqu'on en prescrit que ce soit pour des motifs rhumatismaux ou ophtalmologiques, de ne pas arrêter le MTX d'associer les molécules. Cette notion a déjà été intégrée par les gastroentérologues dans la gestion des Mici, avec un algorithme thérapeutique qui pourrait être repris dans les autres domaines », commente la Pr Corinne Miceli Richard (hôpital Cochin, AP-HP).
En l'absence de réponse thérapeutique à l'anti-TNF, si son taux sanguin est bas et qu'il existe des anticorps, on peut changer d'anti-TNF, car le patient ne développera pas une immunogénicité vis-à-vis d'un autre anti-TNF. En revanche si la concentration d'anti-TNF est normale et qu'il n'existe pas d'anticorps, c'est que l'anti-TNF n'est pas efficace : dans cette situation, il est préférable de changer de famille thérapeutique.
Des nouvelles thérapeutiques à évaluer
Pour les traitements les plus récents, il est plus difficile de conclure à leur efficacité contre des lésions oculaires, qui ne constituent pas l'objectif principal des études.
De nombreuses molécules ont été développées dans les SpA, comme l'anti-IL 12/23 (ustekinumab), les anti-IL 23 spécifiques (guselkumab, risankizumab), et les divers anti-IL 17A (secukinumab, ixekizumab) ou anti-IL 17A et IL 17F (bimékizumab) ou les antagonistes du récepteur à l'IL 17 (brodalumab). Une revue d'essais menés dans la SpA indiquerait que le nombre de poussées est plus faible sous secukinumab que sous anti-TNF (entre 1 et 2,5 versus 3 à 8 pour 100 patients-années) mais il est très difficile d'extrapoler ces résultats, vu le nombre très limité de patients et le peu de données cliniques très fiables. Les résultats du secukinumab dans les uvéites de la maladie de Behçet sont décevants et il n'a pas d'effet sur les formes postérieures d'uvéites, liées ou non à la maladie de Behçet.
Quant au tocilizumab, un anticorps anti-IL 6, s'il semble prometteur dans certaines uvéites et sclérites non infectieuses réfractaires, il a été rapporté des épisodes d'inflammation oculaires paradoxaux (uvéites, sclérites, kératites ulcérantes périphériques) dans des PR traitées par tocilizumab.
Dans la PR et le rhumatisme psoriasique, on dispose aussi de petites molécules synthétiques, les inhibiteurs de JAK, ayant une efficacité très intéressante et très rapide. Leur effet sur le blocage des voies de signalisation des cytokines inflammatoires fait penser qu'ils pourraient avoir une action dans les uvéites et les sclérites, et les résultats sont encourageants dans des formes réfractaires même s'il ne s'agit que de cas rapportés.
Communication de la Pr Corinne Miceli Richard, rhumatologue, hôpital Cochin
Article précédent
Surveiller la rétine
Article suivant
Demain tous myopes ?
Surveiller la rétine
L'œil du rhumatologue
Demain tous myopes ?
Les nouveaux défis de Point Vision
Une répartition géographique inhomogène
Ce n’est pas toujours l’œil
Ronfler à perte de vue
Moins d'injections pour la DMLA
Les pièges devant un larmoiement chez l’enfant
Allonger les délais entre les fonds d'œil ?
Et si c'était Démodex ?
Y a-t-il un anesthésiste dans l'avion ?
Le succès de l'OCT
Les ophtalmologistes voient plus loin
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?