Au niveau de la sphère urologique, le trouble urinaire du bas appareil (TUBA) le plus fréquent avec l'avance en âge est la nycturie, comme cela a été rappelé lors de la première session commune entre l'Association française d'urologie (AFU) et la Société interdisciplinaire francophone d'urodynamique et de pelvipérinéologie (SIFUD), à l'origine d'un rapport sur le vieillissement vésical en 2018. Ce symptôme témoigne du vieillissement dans sa globalité et non pas uniquement vésical. Sa prévalence est élevée, puisqu'on estime que 69 % des hommes et 76 % des femmes se lèvent au moins une fois par nuit pour uriner, et respectivement 28 % et 34 % au moins deux fois. La prévalence de la dysurie est variable, d'environ 22 % chez les hommes et 11 % chez les femmes, mais reste mal évaluée. Une hyperactivité vésicale est rapportée chez 30 % des hommes et des femmes, tandis que la prévalence de l'incontinence urinaire apparaît elle aussi très variable selon les enquêtes. La seule certitude est qu'elle augmente avec l'âge, mais qu'une rémission spontanée est ensuite observée dans la moitié des cas.
Qu'est-ce que le vieillissement ?
Les données urodynamiques sur le vieillissement vésical normal sont assez limitées chez l'homme, la baisse de débit urinaire étant l'observation la plus étayée. Plus nombreux, les travaux menés sur des modèles animaux ont mis en évidence une diminution de la capacité vésicale, de sa sensibilité et de sa compliance, et à l'inverse une augmentation de la pression vésicale de base et du résidu post-mictionnel, avec in fine une hyperactivité et une hypocontractilité du détrusor.
Depuis quelques années, un nouveau regard est porté sur le vieillissement, qui ne se limite pas à une notion d'âge chronologique, mais se fonde sur de nombreux autres paramètres. De fait, le vieillissement ne se fait pas sur un mode homogène et on distingue désormais le vieillissement pathologique qui s'accompagne de comorbidités, le vieillissement habituel où certains facteurs extrinsèques peuvent en accentuer les effets et enfin le vieillissement réussi où les facteurs extrinsèques peuvent jouer un rôle neutre ou bénéfique.
De multiples facteurs associés
Ainsi en pratique, l'âge chronologique ne constitue pas la variable d'intérêt, à l'inverse des facteurs de risque que sont les comorbidités et la polymédication. Les études ont montré une association entre le nombre de comorbidités et l'incontinence urinaire chez la femme et la progression de la dysurie et de l'hyperactivité vésicale chez l'homme. Quant à la polymédication, elle est associée à l'incontinence urinaire après ajustement sur l'âge, le sexe et les polypathologies.
Il existe aussi une association entre les TUBA et les paramètres de fragilité, et entre la nycturie, l'incontinence urinaire, l'hyperactivité vésicale et le risque de chutes. L'incontinence urinaire, lorsqu'elle est quotidienne, est également associée à un risque triplé de difficultés fonctionnelles ou de dépendance, et à une réduction de l’activité physique.
Au niveau physiopathologique, le vieillissement est associé à la dysfonction endothéliale, altération vasculaire responsable d'un stress oxydatif à l'origine d'une augmentation des cytokines pro-inflammatoires, source de dépôts de collagène, d'amincissement de l'urothélium et du détrusor. L'ischémie vésicale entraîne, à long terme des modifications dynamiques (hyperactivité du détrusor puis hypocontractilité), phasiques de l'expression des récepteurs muscariniques, une dégénérescence axonale, une fibrose et une atrophie du muscle lisse.
L'altération de la fonction urinaire avec l'âge s'intègre donc au vieillissement global, et résulte des atteintes plus larges au niveau cardiovasculaire, rénal, neurologique…
D'après les communications des Drs Rebecca Haddad, Paris et Xavier Biardeau, Lille.
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