Dr Pascal Gendry, président de la FFMPS

« La maison de santé est attendue au tournant et doit évoluer »

Par
Publié le 08/03/2018
Article réservé aux abonnés
Pascal Gendry

Pascal Gendry
Crédit photo : DR

LE QUOTIDIEN : Les 7 èmes journées nationales de la FFMPS, à Nantes, fêtent les 10 ans d'existence des maisons de santé. Quel est le bilan ?

Dr Pascal GENDRY : Il est positif mais ce n’est pas sans difficultés ! Il y a dix ans, le concept des maisons de santé était flou tant pour les professionnels de santé que pour les politiques. Passer de l’exercice isolé à un exercice collectif pour des médecins qui avaient l'habitude de travailler seuls, partager un système d’information, intégrer une fonction de coordination : tous ces changements n'ont pas été simples. Mais depuis cinq ans, le mouvement s'est accéléré. Clairement, ce modèle a contribué à la structuration et à l’organisation des soins primaires. Aujourd’hui, il existe plus de 1 100 maisons de santé, sans compter les projets.

Agnès Buzyn compte doubler les maisons de santé en cinq ans. Cet objectif est-il réalisable ?

C’est jouable si les équipes sont accompagnées financièrement et méthodologiquement pendant la phase de création et de consolidation. Pour nous, la croissance du nombre de maisons de santé est inéluctable mais ce n'est pas une fin en soi.

La priorité est de ne pas construire des coquilles vides et de proposer des solutions appropriées aux équipes. L’ouverture d’une maison de santé doit se faire sur la base d'un projet de santé impliquant des professionnels pour une prise en charge coordonnée. Certaines ARS l'ont bien compris et financent des consultants pour accompagner les équipes. La FFMPS de son côté a changé son statut pour devenir une fédération nationale qui réunit des fédérations régionales. Ces dernières accompagnent les porteurs de projets de santé sur les territoires.

Comment imaginez-vous l’évolution des MSP dans les prochaines années ?

La révolution des soins primaires est en cours et la MSP est attendue au tournant ! Elle doit évoluer pour être à la hauteur des défis – un meilleur accès aux soins, le développement des pathologies chroniques, la pertinence et la qualité des soins.

Pour répondre aux objectifs ambitieux de prise en charge, une politique volontariste et des moyens sont indispensables pour les équipes. Il est aussi nécessaire d'évaluer les maisons de santé avec des indicateurs qualitatifs différents de ceux prévus dans l’ACI [accord conventionnel interprofessionnel, NDLR]. La Fédération souhaite réfléchir avec la Haute autorité de santé (HAS) à ces indicateurs d'efficience.

Il s'agit de savoir si l'exercice coordonné permet d'aboutir à des résultats plus probants que ceux obtenus dans le cadre d'un exercice isolé ou si les patients sont très bien suivis par un cardiologue, un ophtalmologue. Aujourd’hui, les MSP récoltent déjà ces données mais elles sont très peu analysées. Cela permettra aux équipes de progresser et – pourquoi pas – à l’assurance maladie de faire des économies. 

La rémunération introduite par l'accord conventionnel interpro (ACI) ne semble pas séduire toutes les équipes. Pourquoi ? 

La rémunération conventionnelle a été un vrai tournant pour les structures. Elle représente environ 50 000 euros pour une équipe de 15 professionnels de santé. Depuis son application en avril, seuls 600 MSP sur les 1 100 recensées  sont signataires de l'ACI. Certaines maisons de santé ont des réticences idéologiques et craignent de devoir rendre des comptes à l'assurance-maladie. D'autres ne s’estiment pas assez matures pour atteindre les indicateurs prévus – comme le système d’information partagé – et nous devons les aider. Si demain, malgré un accompagnement pertinent, nous constatons que 45 % des équipes n’ont toujours pas de rémunération conventionnelle, il faudra faire évoluer les indicateurs grâce à des avenants.

Propos recueillis par Loan Tranthimy Exergue 1/ La priorité est de ne pas construire des coquilles vides Exergue 2/ Il s'agit de savoir si l'exercice coordonné permet d'aboutir à des résultats plus probants que ceux obtenus dans le ca

Source : Le Quotidien du médecin: 9646